Chapitre 32 : À la sagesse cède la fougue de la jeunesse

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Clelia était fourbue et courbaturée. Cela faisait une semaine qu'elle battait la région pour repérer des mouvements suspects. On pensait qu'Antipater avait fait son retour.

Elle confia Oxypous à un palefrenier et rejoignit le quartier des esclaves en trainant des pieds. Elle s'écroula sur le premier banc et poussa un long soupir alors qu'elle se déchaussait. Elle n'osait imaginer à quoi elle devait ressembler. En passant sa main dans ses cheveux, elle les devina emmêlés et hérissés sur son crâne.

- Tu es fin prête à pétrifier les gens, la taquina Timia en entrant.

- Éléos est là ?

- Non, toujours aucune nouvelle de lui. Tu es la première arrivée.

La rousse s'installa en face d'elle, un sourire narquois aux lèvres. Sa soeur de lait ne releva pas au début, trop fatiguée. Elle avait faim et manquait de sommeil, elle ne rêvait que de son lit pour se reposer.

- Elle est là, lâcha sans préambule Timia.

Immédiatement, un long frisson parcourut Clelia. Quand les esclaves disaient «elle» c'était en général une très mauvaise nouvelle. Surtout pour Clelia qui pâlit soudainement. Elle lâcha la pomme qu'elle tenait, plus éveillée que la minute précédente. Loin de compatir, Timia éclata de rire en voyant sa tête. Les visites de Catarina étaient plus que redoutées, et pour son plus grand malheur, elles étaient régulières et tournaient toujours autour du même sujet.

- Depuis quand ? demanda-t-elle, d'une voix blanche.

- Une heure. Elle a eu le temps d'énerver mère alors qu'elle t'attendait patiemment. Elle est maintenait d'une humeur massacrante et il vaut mieux qu'elle et Catarina ne se trouvent pas dans la même pièce. J'ai presque cru qu'elle allait lui crever les yeux.

L'humeur massacrante d'Aédone ne devait être qu'un euphémisme. Quand l'intendante du palais était en colère, il valait mieux ne pas être dans les parages et encore moins la contrariée davantage. Mais pour parvenir à énerver Aédone, il fallait la provoquer sur un sujet délicat.

- Qu'est-ce qu'elle lui a dit ?

- Que sa couleur de ses cheveux est laide et qu'elle ferait mieux de les teindre ou de les cacher.

Clelia poussa un long soupir et se leva, résignée à mettre dehors au plus vite sa belle-mère. Normalement, elle devait passer voir en premier Terpsis pour lui faire part de ses observations, mais il valait mieux qu'elle se débarrasse d'abord de la présence envahissante de Catarina.

- Tu vas la voir ? Tu devrais t'arranger un peu, elle ferait une attaque si elle te voyait ainsi, suggéra la rousse, montrant ses jambes qui n'étaient pas épilés et son chiton court poussiéreux.

- Qu'elle en fasse, ça m'est bien égale !

Alors qu'elle quittait le quartier, elle entendit les esclaves rire entre eux de la blonde, imitant sa voix suraiguë ainsi que les remarques que subissaient Clelia à chacune de ses visites.

Elle entra dans le gynécée, déterminée à la mettre dehors au plus vite. Elle la trouva en train de faire les habituelles remarques sur la façon de bien tenir sa navette à une esclave, pourtant réputée pour être aussi excellente qu'Athéna ou Arachné.

Les esclaves lui lancèrent un regard à la fois soulagé et compatissant. La jeune femme allait passer un mauvais quart d'heure, si cela ne se transformait pas en heures interminables !

Clelia s'installa sur le siège placé en face de Catarina et lui offrit un sourie hypocrite avant de demander du vin pur pour elle.

- Quelle tête ! s'écria la blonde en prenant  une voix de tête horripilante. Je me demande si Persée a bel et bien achevé Méduse. Mais en te voyant, j'ai la preuve que non. À part ce détail qui ne convient pas à une princesse comme toi, comme vas-tu ? Toujours aucun signe de grossesse ?

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant