- Ma reine, ma reine ! s'époumona Timia.
La jolie rousse ouvrit en grand la porte du gynécée, occasionnant au passage le sursaut de l'intéressée et des cris de Chloé qui s'était réveillée. Sa mère pesta contre la fautive qui s'en moqua éperdument.
- Quoi, que se passe-t-il ? pesta Terpsis en remettant en ordre ses rouleaux de papyrus.
- Tu ne sais pas ce qui s'est passé à Sparte ? s'écria Timia.
- Comment veux-tu que je devine ? Je ne lis pas dans les pensées des autres ! Alors Timia ?
La rousse prit le temps pour s'installer sur un coussin, juste à côté de la souveraine qui la regardait, son attention focalisée sur elle. Timia prit une grande inspiration et commença :
- Il paraît que la fille de Tyndare avait beaucoup de prétendants, tous les hommes venus ici en somme, gloussa-t-elle ensuite. Même des nobles de Delphes. Enfin, ses hommes « virils » se sont disputés la main d'Hélène dans des jeux et au personne n'arrivait à se départager. Puis un seul homme « viril » y est parvenu.
La jeune affranchie émit un autre gloussement qui eut le don d'énerver la souveraine. Terpsis était au comble et s'impatientait. Elle devait reconnaître que Timia avait des talents de conteuse et qu'elle savait tenir en haleine son auditoire.
- Eh bien ? la pressa la souveraine.
Timia prit une grande inspiration et fixa droit dans les yeux la reine. Elle ne cachait plus son sourire et elle avait un air qui laissait croire que la nouvelle était comique.
- Eh bien, elle épouse Ménélas !
- Pardon ?! s'étouffa Terpsis en lâchant un cri.
Tous le gynécée leva la tête vers Terpsis pendant que Clelia se tournait de rire, pliée en deux devant la réaction écœurée de sa mère qui en resta bouche bée. La reine ne dit rien pendant au moins deux minutes et esquissa une moue de dégoût. Elle tourna la tête vers sa fille qui n'arrivait plus à se calmer et qui essuyait des larmes dut à son fou rire.
- Mais... mais comment ? bégaya-t-elle.
- Ça, je ne sais pas, fit Timia en haussant avec désinvolture ses épaules, mais je sais par contre que tous les hommes qui étaient présents ont dû faire serment devant le père de protéger Hélène s'il lui arrivait quelques choses. Ils ont tout accepté. Le mariage a eu lieu je crois il y a deux semaines.
Terpsis eut un haut-le-cœur. Inconsciemment, elle tourna sa tête vers sa fille qui s'était enfin calmée. Elle avait sur son visage un grand sourire ironique. Mais cela n'amusa pas la reine qui se sentit étreindre par l'inquiétude. Elle se rappelait de la prédiction et un frisson lui parcouru l'échine. Cela faisait cinq mois depuis cet affaire dans le temple avec Clelia. Terpsis pensait alors que plus aucun problème n'aurait lieu, mais apparement, elle avait eu tort. Elle fit pourtant son possible pour cacher son trouble et toisa Timia.
- Et comment sais-tu cela ?
- Au marché, expliqua-t-elle avec cette même désinvolture. C'est un marchand de soie qui avait fait un passage par Sparte qui me l'a dit. Et en plus, tu ne sais pas ? Alors que ces hommes se querellaient pour savoir qui épouserait la fille de Sparte, le roi d'Athènes, Thésée, l'a enlevé puis il est parti aux Enfers. Et pour la récupérer, il a fallut que ses deux frères qu'on appelle les Dioscures, aillent la chercher.
- Elle a notre âge mais déjà elle cause tant de problèmes ! s'esclaffa Clelia.
Terpsis écouta vaguement la fin de la phrase. Elle avait connu brièvement Thésée, fils d'Égée, l'assassin du Minotaure. Elle était jeune alors, au début de son règne et à ce moment, le fils du roi athénien qui avait eu avec la reine des Amazones, Antiope, son fils Hippolyte était mort par la faute de sa belle-mère. Les Amazones qui étaient alors sans souveraine, avaient proposé Terpsis à leur tête. Si d'abord elle en avait été flattée, elle n'avait pourtant pu s'y résoudre car personne à Delphes à part Aédone ne sait ce secret si jalousement garder. Il pourrait déchoir plutôt qu'aider.
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De Delphes toute puissante
Ficción históricaGrèce antique. Les grandes cités de Grèce se disputent une cité en particulier, gouvernée de façon particulière : des femmes sont à la tête, puissantes et indépendantes, aimées et respectées par leur peuple, prêtresses et médecins, guerrières et str...