L'accouchement s'éternisait et les cris de douleur de Sophia commençait à lasser. L'assistance qui attendait depuis un jour avait fini par s'impatienter et tentait de tromper l'ennui en discutant à voix basse, se tournant parfois vers la porte pour voir si une sage-femme ne viendrait pas pour informer de la situation.
Desdémone l'avait fait une première fois vers la soirée, se présentant pour décrire l'accouchement laborieux et douloureux de Sophia qui hurlait jusqu'à s'en briser les cordes vocales. Loïmos n'avait rien compris du vocabulaire trop technique qu'elle avait utilisé mais en regardant Tharros pour trouver une interprétation, Loïmos avait constaté avec plaisir qu'il avait blêmi quand la princesse avait parlé d'un accouchement par le siège compliqué. Avec un peu de chance, elle mourrait en donnant la vie et quand cette vieille peau de reine succomberait aus ciseaux d'Atropos, il réaliserait son désir le plus cher. Il occuperait le trône d'Onchos et irait cracher sur les cendres de Terpsis et Clelia.
Il fut ramené à la réalité quand un cri plus fort que les autres traversa les murs du palais. Les conseillers se turent et se tournèrent presque aussitôt vers Tharros qui était de plus en plus pâle et resserrait sa main autour de sa coupe de vin pur. Il avait fini par en réclamer très discrètement à un esclave pour éviter de se faire remarquer et atténuer la réalité. Si sa jumelle mourrait en couches, il ne le supporterait pas et viendrait lui reprocher de l'avoir tué indirectement. Pourtant, il doutait être le père de l'enfant, Sophia avait dû accueillir dans son lit une autre présence que la sienne. Mais elle ne paraissait pas être enceinte au moment où il était revenu, il avait scruté attentivement son corps pour voir si sa poitrine n'avait pas gonflé ou si son ventre n'était pas dur.
Tharros se servit pour la troisième fois du vin alors qu'un autre cri de douleur s'échappait de la chambre de la parturiente. Il était comme sa mère, il ne buvait du vin seulement quand il se sentait mal et qu'il voulait l'occulter. Autrement, il était plutôt sobre et discret, n'aimait pas les banquets et appréciait une compagnie restreinte, seulement avec ses proches. Mais il était aussi observateur, intelligent et aussi sanglant que sa mère. Loïmos voyait que son beau-frère le suspectait d'avoir orchestré l'agression contre Pistos puis lui. De peu, les imbéciles qu'il avait engagé pour réaliser cette besogne auraient pu révéler son nom. Un homme était mort par la torture insoutenable ordonnée par Tharros et il avait préféré exécuter les autres en infligeant au centuple ce qu'il avait subi au moment de son agression.
Loïmos déglutit rien qu'en imaginant ce qui l'attendrait si on découvrait son projet. Clelia était sans pitié, ses enfants aussi. Il se souvenait de la chasse à l'homme qu'avait mené Sophia sur la demande de sa mère. Elle avait gagné le nom de tueuse d'homme et il avait vu de quoi elle était capable, sa grande habileté à manier les armes et menacer. Ses loups étaient une arme permanente et ils veillaient mutuellement entre eux. Ils obéissaient à Sophia et se donneraient plaisir à le mettre en pièce si elle leur en faisait l'ordre, ils ne l'avaient jamais apprécié.
Pour Tharros, il venait de révéler un côté que personne n'aurait pu croire voir un jour. Le calcul minutieux qu'il employait pour se venger de ce qu'on lui avait fait. Derrière cet agréable visage, cet éphèbe et excellent musicien était aussi un tueur-né, capable de voir et entendre une musique de cris de souffrance sans broncher, certainement à la recherche d'un bon rythme qui lui plaisait. Il avait vu le résultat aux portes de la cité et il avait frémit en voyant les cadavres écorchés, le sang ruisselant à leur pied. Il avait souri de ravissement quand le dernier homme avait rendu son souffle puis s'était tourné vers lui, avec ce même air de contentement macabre. Une menace implicite.
Andrios à Thèbes n'avait eu aucune pitié pour les conjurés, ils les avaient torturé en public et tenait cette fois-ci et pour de bon le pouvoir mais aussi l'assurance que plus personne ne s'en prendrait à lui. Il avait enfin soumis la cité qu'il gouvernait en menaçant mais en amadouant également, en faisant cadeau au peuple de pains gratuits pour remercier les dieux de sa survie. Peu après avoir réglé ses problèmes, Loïmos avait eu la surprise de recevoir de sa part une lettre qu'il lui destinait. Il lui avait promis les mêmes tortures qu'infligeaient aux conjurés. Ceux-là avaient été moins résistants, les traîtres avaient avoué mais Andrios ne pouvait rien faire. Pourtant, la lettre était aussi un avertissement. S'il ratait une seconde fois, lui réussirait et le tuerait. Il avait ajouté en conclusion qu'il serait ravi d'avoir son sang sur ses mains. Terrifiant.
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De Delphes toute puissante
Fiksi SejarahGrèce antique. Les grandes cités de Grèce se disputent une cité en particulier, gouvernée de façon particulière : des femmes sont à la tête, puissantes et indépendantes, aimées et respectées par leur peuple, prêtresses et médecins, guerrières et str...