Chapitre 105 : Petite souris

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Du bruit et un juron tira Andrios de son sommeil. Il ignorait si le soleil commençait à se lever ou pas, mais il trouva suspect d'entendre du bruit en pleine nuit. La femme avec qui il avait passé la nuit était endormie dans son lit et ne bougeait pas.

Lentement, il tira de sous son oreiller sa dague et se tourna doucement vers l'ombre qui évoluait en tentant de faire le moins de bruit possible, une lampe à huile dans sa main.

- Cesse immédiatement tout mouvement ou je serai obligé de te tuer, déclara d'une voix posée Andrios. Montre-moi ton visage.

La silhouette obéit et se tourna vers le roi en approchant la flamme de son visage. Malgré lui, il fut surpris de voir une jeune femme qui se tenait en face. Les traits lui semblèrent familiers et il chercha dans sa mémoire où il avait bien pu l'apercevoir. Elle n'était pas une esclave, c'était certain. Malgré la quasi obscurité, son chiton était fait dans une belle étoffe de lin. Elle devait être une fille de bonne famille, peut-être de marchand ou même de noble.

- Qui es-tu et qui t'a permis d'entrer dans ma chambre ?

- J'ai entendu dire que notre roi cherchait une épouse. Je viens apporter une liste améliorée de toutes les filles de nobles en âge d'être mariée, avec leur qualité et leur défaut. La première liste apportée par mon père est une véritable faute de jugement, et je me suis permise d'en apporter une autre bien plus honnête puisque je fréquente quotidiennement les futures heureuses élues.

- Quelle prévenance de ta part, j'en suis presque touché. Mais tu ne réponds pas à mes questions. Dépêche-toi avant que je n'appelle les gardes pour te jeter aux geôles.

- Ce serait une grave erreur avec un père comme le mien, prévint la jeune femme en levant le menton. Les gardes étaient assoupis, je suis passée discrètement. Je te laisse donc retourner à tes occupations. Tu agis comme ce monstre désormais ?

Dans la pénombre, elle pointa le corps nu de l'esclave avec qui Andrios avait passé la nuit. Il détailla l'attitude suffisante de la jeune fille. Il continuait à chercher dans sa mémoire où il avait bien pu la voir, en vain. Mais ce qui était certain en la voyant, c'était l'agacement qu'engendrait en lui les manières de cette inconnue qui se faisait déjà trop familière à son égard. Il savait qu'elle lui rappelait quelqu'un mais il avait du mal à s'en souvenir.

- Pour ta gouverne, je ne force pas les femmes à coucher avec moi. Elle est consentante, elle me l'a assurée. Ensuite, si la véritable question est la possibilité que j'égorge dans un accès de folie, rassure-toi, je ne crois pas être encore victime de la malédiction des dieux. Maintenant, ton nom et celui de ton père.

- Alors je me sens plus ou moins rassurée et en sécurité, le railla-t-elle. Je suis la fille d'un de tes conseillers, celui avec qui tu t'entretiens le plus en privé. Métis, pour te servir mon roi.

Elle s'inclina, non par respect mais toujours dans une attitude railleuse et provocante. Elle ne paraissait nullement impressionner. Elle se contentait de le fixer alors qu'il était dans le plus simple appareil, une fossette d'amusement qui venait creuser ses joues.

Elle commença à rejoindre la porte pour sortir mais il la retint d'un ordre. Elle se tourna et la flamme montra la surprise sur son visage.

- Tourne-toi, je vais te faire sortir du palais discrètement, sans que tu ne te fasses remarquer par les gardes ou les ouvriers et sans que l'honneur de ton père ne soit souillé.

Encore interloquée, elle décida finalement d'obéir et se retourna pour ne pas le voir. Rapidement, Andrios attrapa une chlamyde et agrafa la fibule avant de l'approcher. Il lui prit des mains la lampe à l'huile et poussa délicatement la porte en jetant un regard à la femme endormie dans son lit. Elle dormait encore et il s'engagea dans les corridors, suivi par la fille de son conseiller.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant