Elles étaient toutes là, réunies à l'avant-poste, la dernière barrière avant d'accéder au monde des hommes. Clelia avait abandonné la tunique de peau contre son chiton long. La jeune fille regardait avec tristesse toutes les femmes réunies. Le temps avait fait défaut à tous.
- Que les dieux te protègent, Clelia, lui dit d'une voix émue Penthésilée après l'avoir prise dans ses bras.
- Vous aussi.
Elles s'adressèrent un dernier regard avant que Clelia ne monte Oxypous. Elle avait finalement avancé le départ, à contrecœur, certes, mais elle ne voulait pas faire attendre Pistos. Elle devait gagner Troie au plus vite.
Son estomac se serra en une boule quand elle quitta pour de bon le territoire des Amazones. Elle avait passé un séjour merveilleux, sans tourment. Tout ce qu'elle espérait en galopant dans la forêt, c'était de les revoir bientôt.
Clelia avait prit avec elle un peu d'argent donné par les Amazones. C'était un de leur butin qui ne servait à rien mais qui convenait à Clelia. Avec l'argent, elle pouvait se payer une place sur un bateau et accélérer ainsi son voyage. Encore fallait-il trouver un navire prêt à l'embarquer, avec Oxypous dans la cale. Elle pouvait aller à Cardia, sur l'Hellespont. Si les vents étaient favorables, il n'y aurait guère qu'une ou deux semaines de voyage. Si tout ce passait bien.
Sans réfléchir davantage, Clelia prit la direction du sud ouest. L'Hellespont était une fine bande de terre, séparée par l'eau. Il fallait un navire pour traverser le détroit, mais elle, elle voulait arriver à Troie sans épuiser sa monture et sans prendre trop de temps.
Près d'un taillis, Clelia mit pied à terre et de hâta de changer son chiton long contre l'autre court et elle releva ses cheveux. Elle ne pouvait les couper, sinon on penserait qu'elle était en deuil. Tout ce qui lui restait à faire, c'était de prendre un large chapeau de voyageur. Elle prit soin de dissimuler son sautoir avant de reprendre sa route vers Cardia.
Le trajet ne prit que deux jours jusqu'au port de Cardia et elle trouva la place qu'elle avait espéré, pour elle et Oxypous. C'était parfait, le navire partait dans une heure. Sans attendre, Clelia confia Oxypous à un esclave pendant qu'elle montait à bord. Elle avait mit à sa ceinture de cuir sa dague, préférant la sécurité à l'inconscience. Les esclaves s'activaient autour d'elle pour préparer la voile et lever l'encre. Le vent était fort et le ciel sans nuage. Mais s'il y avait bien une chose que Soter lui avait dit, c'était que le temps en mer est traître. D'un ciel bleu le matin, l'on pouvait faire connaissance avec Poseidon l'instant d'après, englouti par l'eau. Et Clelia ne tenait certainement pas à rencontrer Poseidon, malgré tout le respect qu'elle pouvait avoir pour le seigneur des mers !
Elle prit une grande bouffée d'air pour se calmer. C'était inutile de paniquer de la sorte, c'était la saison de navigation, tout était propice pour s'aventurer en mer. Elle s'accouda au bastingage et laissa le vent s'engouffrer entre son chapeau. Elle le retint ainsi que son himation, ne voulant pas dévoiler sa vrai nature. Son himation lui permettait déjà de cacher sa poitrine qu'elle trouvait volumineuse. Il fallait juste qu'elle reste sur ses gardes et qu'elle fasse attention à ce qu'elle disait.
• • •
Une semaine plus tard, le navire sur lequel Clelia avait embarqué accosta près de Troie. Comme la dernière fois, des chaloupes venaient faire la liaison encore le navire et la plage. On fit descendre en premier Oxypous qui renâcle violemment et qui eut du mal à rester sur la chaloupe. Clelia dut rejoindre l'homme pour calmer l'étalon qui s'énervait.
- Vite, ordonna Clelia.
L'homme s'attela à la tâche et fit de grands coups de rame. Malgré la présence de Clelia, l'étalon menaça plusieurs fois de renverser la frêle embarcation. Au bout d'un moment, l'animal sauta dans l'eau et rejoignit la plage. L'étalon piétina l'herbe et menaça de ses dents quiconque voulant s'approcher de lui. Clelia attendit que la chaloupe atteigne le sable avant de sauter et de courir vers Oxypous. Dès qu'il la vit, l'animal se calma et elle lui caressa les naseaux.
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De Delphes toute puissante
Historical FictionGrèce antique. Les grandes cités de Grèce se disputent une cité en particulier, gouvernée de façon particulière : des femmes sont à la tête, puissantes et indépendantes, aimées et respectées par leur peuple, prêtresses et médecins, guerrières et str...