Chapitre 14 : La discrétion, mère de sûreté

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Nyx n'avait toujours pas chassé quand une légère agitation s'empara du palais. Quelques personnes couraient à travers les corridors pour préparer le maigre bagage qu'emmènerait la princesse. Clelia avait pris la décision de n'emmener que deux chitons, un long et un court, son himation, sa cuirasse, son arc et son glaive.

Elle trépignait d'impatience et ne tenait plus en place. Pour la première fois elle prendrait la mer et elle retrouverait les Amazones. Pistos avait été mis dans la confidence mais pas son père qui ignorait ce secret. Terpsis, pour la couvrir, avait prétexté un désir de revoir une amie que Clelia s'était faite chez sa nourrice, mariée et vivant en Thrace. Ce n'était en somme qu'un demi mensonge. Et puis Xiphos n'accordait pas grande attention à ce prétexte. Il avait donné son accord et cela convenait à la jeune fille.

Clelia trotta jusqu'au perron, son baluchon sur son épaule. Ses parents attendaient justement là. La jeune fille s'avança et les embrassa chacun. Étrangement, son père s'attarda longuement avec elle, lui donnant des conseils pour se protéger des pirates qui infestaient les mers et d'autres criminels. Elle prit les consignes à la légère, sachant pertinemment qu'avec elle, aucun homme ne survivrait.

Elle passa à sa mère qui le serra dans ses bras, sans dire un mot. De toute façon, elles avaient discuté durant la nuit. Il était donc inutile de distribuer de nouveau des conseils. Clelia savait ce qu'il fallait faire, tout allait bien se passer.

Une dernière fois, elle embrassa ses parents et Timia avant de prendre les rênes de son étalon alezan que tenait un esclave. Elle grippa avec agilité, imité par Pistos qui embrassa son oncle et sa tante. Le dernier à s'installer fut Héliodore qui s'entretenait avec les souverains avant de serrer dans ses bras son frère. En le voyant si proche, Clelia se demanda qui pourrait être l'aîné entre son père et son oncle.

- C'est mon père qui est l'aîné, lui répondit Pistos en réprimant un bâillement. Si ton père n'avait pas épousé Terpsis, jamais il ne serait à la place où il se trouve.

Et Terpsis prenait un malin plaisir à le répétait sans cesse à son époux lorsqu'il se permettait de prendre des décisions qui déplaisaient à la reine. Plus le temps passait, et plus Terpsis commençait à avoir une véritable emprise sur la cité et sur le conseil. Xiphos ne siégeait là-bas que par devoir et il voyait son pouvoir s'étioler si lentement, mais sûrement et son épouse récolter patiemment les fruits de son labeur.

Enfin, Héliodore s'écarta de son frère et rejoignit les deux cousins déjà prêts. Il monta à son tour sur sa monture. Il les accompagnerait jusqu'au port donnerait durant le voyage les conseils nécessaires pour Pistos.

Un dernier adieu avant ce voyage. Ils talonnèrent leurs montures et rejoignirent les portes de la cité avant de les lancer au galop. Avec un peu de chance, ils atteindraient le port avant la nuit. Mais le plus tôt était le mieux. Ils allèrent vers le sud, près de Corinthe. Il était risquait de longer la cité, ennemie implacable de Delphes qui n'avait toujours pas digéré la perte de ses ports. L'arrivée aux abords nécessitait donc de cacher les signes distinctifs qui pourraient laisser croire que les voyageurs sont de Delphes.

C'était exactement ce que firent les trois voyageurs en reconnaissant la cité. Clelia qui portait alors une médaille d'argent aux emblèmes de sa cité se hâta d'enlever le sautoir et de le cacher dans son baluchon. Elle rabattit également son himation de laine sur sa tête, afin d'éviter que des personnes déjà venu chez elle ne la reconnaisse. Pistos et Héliodore firent de même et reprirent leurs routes, évitant les patrouilles qui se trouvaient dans les parages. Ils étaient méfiants et préféraient quitter au plus vite les abords de la cité.

Au final, ils mirent moins de temps que prévu. Hélios achevait alors sa course dans le ciel quand ils arrivèrent au port. Celui-ci avait l'avantage de se situer sur l'isthme de Corinthe. Il y avait bien évidemment un autre port appartenant à Delphes, un peu plus au sud mais celui-là n'était tourné que vers l'Ouest, vers la Grande Grèce, contrairement à l'autre qui se tournait vers l'Est en direction de Troie, Pergame et la Thrace. Rien que cette pensée réjouissait Clelia.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant