Chapitre 104 : Étranger en sa propre maison

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Sans avoir y prêter attention, la lumière déclinait et Andrios constata qu'il se fatiguait à lire ses documents dans la pénombre. Il appela un esclave pour allumer les lampes à l'huile et lui permettre de continuer son travail sans être interrompu. Pourtant, un autre esclave débarqua dans son bureau et s'inclina profondément.

- Le conseiller pour l'entretien est là, mon roi, annonça-t-il.

- Je l'avais oublié, marmonna Andrios pour lui-même. Fais-le entrer.

Il s'effaça et laissa entrer le conseiller qui se courba devant son souverain avant que ce dernier ne l'invite à prendre place face à lui. Andrios mit de côté les documents qu'il étudiait et attendit que la porte soit fermée pour commencer l'entretien.

- Le rapport habituel. Où en sont les récoltes, la situation aux frontières avec Athènes et l'Eubée, se contenta de dire Andrios.

- Un orage a détruit les récoltes au nord, les vignes et les champs de blé ont été durement touchés, mon roi.

- La totalité a été perdue ?

- Grâce aux dieux, non, certains champs ont été épargnés et les récoltes des années précédentes seront suffisantes pour vivre, mais ce n'est pas le cas partout. J'ai peur que cela n'impacte durement le tribut dû à la reine de Delphes. La délégation est en chemin et il est à craindre qu'elle soit mécontente d'apprendre que ce que nous lui devons n'arrivera finalement pas.

- Pour la reine de Delphes et sa délégation, je m'en occuperai personnellement. Le plus urgent est de voir si avec ces champs épargnés les habitants qui cultivent la terre auront de quoi vivre et si une part peut être acheminé jusqu'ici pour l'intégrer au grenier à blé et pouvoir passer un hiver serein. Je veux qu'un cavalier soit envoyé là-bas et fasse état des dégâts. À partir de là, nous verrons si nous gardons le même prix pour le blé ou si au contraire, nous devrons l'augmenter, ce que je n'espère pas.

- Il serait judicieux de faire cela dès maintenant, mon roi. Pour remplir au plus vite la salle du trésor que ton père...

- Le précédent souverain, corrigea très sèchement Andrios.

- Pardon. Que le précédent souverain a vidé dans sa quasi totalité.

- Je ne commettrai certainement pas cette folie. Mon prédécesseur s'est mis à dos le peuple entier qui mourrait de faim à cause du prix exorbitant du blé. Or, si nous reproduisons cela, il ne restera plus que des cadavres dans les champs, et même les esclaves seraient incapables de cultiver la terre. Ici, nous risquerions de mourir de faim. Par contre, nous imposerons aux marchands étrangers de payer le droit de passage un peu plus cher. Sur les marchands athéniens par exemple, ils ne manquent pas d'argent et nous les soulagerons de quelques drachmes quand ils viendront ici.

- Le conseil ne devrait pas y voir d'objection à une telle proposition, mon roi. Quoi qu'il en soit, il n'y a rien à signaler aux frontières, l'Eubée et Athènes ne semblent pas d'humeur belliqueuse.

- Tous semble donc à peu près normal. Je communiquerai dès que possible mes décisions. En attendant, l'arrivée de la délégation de Delphes est très importante, j'ignore si la reine vient en personne ou si elle a envoyé quelqu'un en son nom, mais il est nécessaire de s'acquitter de ce tribut. Ce sera tout, merci.

- Avec tout mon respect, mon roi, j'aimerai t'entretenir d'une dernière chose qui est très importante.

- La quelle ?

- Il paraît raisonnable de penser à trouver une reine qui donnera un futur héritier à notre chère cité, mon roi. Il ne manque pas de jeunes et jolies jeunes filles qui seraient dignes de Thèbes et qui enfantera le prochain roi. Les pères sont désormais rassurés et voient que tu n'es pas comme ton prédécesseur, ils veulent dès à présent trouver le meilleur parti pour leur fille en la faisant reine. J'en connais beaucoup qui viennent de familles honorables, et même qui descendent des Spartoi. J'ai moi-même quatre filles qui sont en âge d'être mariées.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant