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 "Il est possible que vous n'obteniez jamais la sensation de justice dont vous avez besoin."

-Maître Ouarda.


Point de vue Ken Samaras.

-Putain, j'peux pas me la voir cette chanson, je m'exclame en éteignant un peu trop violemment l'autoradio.

-Doucement avec ma caisse, répond Hakim dont les mains se resserrent un peu fortement sur le volant de la voiture.

-Baba, il aime pas qu'on casse sa voiture, m'explique Soan installé juste derrière moi.

C'est arrivé sans qu'on s'y attende et c'est encore étrange d'entendre le gamin appeler Haks, Baba. La première fois qu'il l'a fait, on a tous regardé notre kho qui s'est contenté à son habitude d'hausser les épaules. Mais son visage si placide en temps normal était orné d'un éclat solaire. Il aime ce gosse comme si c'était le sien, c'est pas vraiment une surprise que ce soit une forme d'accomplissement pour Hakim de l'entendre l'appelé de cette manière.

-Dis tonton Ken. C'est vrai que t'aime pas cette chanson parce que le monsieur il parle de Nanah ?

-Qui t'as dit, je me retourne pour lui adresser un regard.

-Tonton Zer. Il a aussi dit que la chanson est trop bien, mais qu'il faut pas te le dire.

-Alors pourquoi tu me le dis ? On t'a déjà dit que tu parle beaucoup maintenant ?

-Baba me le dist presque tous les jours. Le docteur pour enfants dit que c'est parce que j'ai retrouvé ma voie. V O I E pas V O I X.

-Donc, maintenant, t'as décidé de parler ?

-Et de dire la vérité à tout le monde. Yaya dit que la vérité libère.

J'ai le temps de le voir hausser les épaules dans une parfaite imitation de son Baba, avant de me retourner dans mon siège.

-Ouais bah, la vérité, c'est que la chanson craint.

La musique est subjective, la manière dont on perçoit un son va déprendre de l'humeur, du moment de la journée, du temps qu'il fait. Le contexte qui entoure Lolita me donne une parfaite légitimité à considérer que cette chanson craint.

On en a pas trop parlé avec Dinah. J'ai pas voulu lui mettre la pression. Elle le fait pas exprès d'être, drôle, lumineuse, brillante, magnifique. C'est juste elle. Et même lui finalement, je lui en veux pas. Je suis le premier à être tombé à pieds joint sous son charme. Ce serait hypocrite de ma part, de ne pas comprendre qu'un autre homme puisse en faire de même.

Il m'a fallu plusieurs jours pour digérer la pilule. Je suis pas sûr que ce soit si bien passé que ça.

Mais si on n'en a pas parlé plus que ça, c'est pour une autre raison. La raison pour laquelle la voiture d'Hakim s'arrête en double file devant le bureau d'un avocat spécialisé en droit pénal.

-Merci, pour la course, je dis à Hakim. Soan, continues à dire la vérité. Juste pas à moi. Je préfère un bon mensonge.

-Si tu préfères tonton Ken, pensant que je ne l'entends pas, il ajoute pour Hakim. Je crois que maintenant, je comprends pourquoi Yaya dit toujours qu'il est fragile.

Je ne perds pas non plus les rires d'Hakim et sa réponse :

-Yaya a toujours raison fils.

Je claque la portière de la voiture et me retourne vers l'immeuble. Poussant la porte, j'ai une boule au ventre. Je ne suis pas sûr qu'elle soit là. J'ai déjà eu beaucoup de mal à la convaincre de prendre ce rendez-vous. Alors non, on n'est pas à l'abri qu'elle ne vienne pas.

STORMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant