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"Viens avec moi fils, t'as besoin d'un café."

-Marc Duval. 


Point de vue Ken Samaras

Je me réveille en sursaut. Les images ne refluent pas bien au contraire, elles sont imprégnées dans ma mémoire. C'est pas juste une cauchemar, c'est un souvenir. La musique forte alors que j'entre dans l'appartement, les cds et vinyles éparpillaient partout sur le tapis du salon et puis elle au milieu de ce tas d'affaires. Allongée dans son sang. Il y a tellement de sang. Je me fige un instant, quelques secondes à peine. Mon cerveau se déconnecte et je commence à agir. La ceinture pour faire un garrot, l'appel au pompier. Mes fringues pleines de sang, son sang. Le cœur qui bat vite, mes tempes sur le point d'exploser.

Je tente de reprendre ma respiration, d'évacuer ses souvenirs qui m'empêchent encore de dormir. Il y a plein de trucs que j'ai oublié dans ma vie. Cette journée-là, je l'oublierais jamais. Je la revois, me faire un signe de main alors que je lui demande de m'appeler quand elle est arrivée chez elle. Je revois son image s'échapper dans le dédale des couloirs de l'aéroport de Nice. Et puis cette pression dans mon estomac. Cette certitude sortie de nulle part que si je la laisse partir maintenant, je ne la reverrais jamais.

La route qui se sépare en deux. Comme un véritable cliché. D'un côté, je rejoins les mecs pour le concert à Marseille. De l'autre, je remonte sur Paris. La pression qui circule dans mon corps et qui sans mon autorisation me fait prendre l'autoroute qui remonte vers Paris. J'ai roulé tellement vite ce jour-là. Sans savoir pourquoi. La panique qui monte progressivement alors que je m'approche de la capital. 

Et puis, le doute qui s'insinue. Dinah va bien, je me tape encore une phase, les mecs vont me démolir et elle aussi. Je sais qu'elle me trouve trop pressant, trop sur son dos. C'est plus fort que moi. Je l'aime à en crever cette meuf et j'ai toujours eu un côté un peu obsessionnel. Les deux ne se mélangent pas très bien. Alors je m'arrête sur une aire d'autoroute pour reprendre mon souffle pour l'appeler. Pour me rassurer. Je me souviens de sa respiration forte des mots qu'elle m'a dit, de l'intonation de sa voix. Ça ressemblait à des adieux. Ça m'a pas rassuré du tout, au contraire,  ça m'a glacé le sang.

Je suis remonté dans la voiture et j'ai roulé encore plus vite. Jusqu'à Paris, jusqu'à son appartement.

Aujourd'hui, je ne saurais toujours pas expliquer ce qui m'a poussé remonter sur Paris, sauf a parler de pressentiment. Inès dit que c'est Dieu qui m'a conduit sur le bon chemin, ce n'était pas l'heure de Dinah et c'était à moi de la trouver. Je suis arrivé à temps, c'est tout ce qui compte.

J'essuie d'un geste brusque la sueur qui colle sur mon front. Je dors plus depuis que Moh nous a annoncés qu'elle est revenue. Je dormais déjà plus des masses avant maintenant, c'est presque une forme de torture que me fait subir mon cerveau. J'arrive pas à croire qu'elle est rentrée. Et je ne pourrais pas y croire tant que je ne l'aurais pas vu. Je veux la voir, j'ai besoin de la voir.

Plus encore alors que les souvenirs sont aussi présents dans mon esprit. Mes mains couvertes de son sang. Elle qui me demande de la laisser partir. Je pince l'arête de mon nez. C'est pas efficace. Il faut que je respire sinon, je vais étouffer.

Repoussant les couvertures, je sors de mon lit pour rejoindre le salon. Doucement, pour ne pas réveiller Inès, j'enfile une paire de basket et attrape ma veste en jean accrochée sur la patère dans l'entrée. Les escaliers défilent sous mes pieds. L'air extérieur encore chaud, ne m'apporte pas le réconfort que j'espère.

Dès que je démarrer le contact de ma voiture, mon téléphone se connecte à la commande centrale. D'un geste du doigt, je fais glisser ma liste de contact jusqu'à trouver le bon : Sorcière. Ça sonne, ça ne sonnait pas avant. La ligne a été rétablie. J'ai l'impression d'halluciner, mon cœur bat plus vite, mes mains deviennent moites.

STORMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant