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« Je veux juste que tu m'aides, je peux pas le faire toute seule. »

-Dinah Duval

Point de vue Dinah Duval.

La nuit est tombée depuis un moment. Je n'avais jamais imaginé qu'une nuit calme puisse être aussi terrifiante. J'entends tous, le chuintement des pneus de voiture contre la route humide, le grincement de la porte de la cuisine bougée par le vent, les murmures des arbres qui se balancent par l'effet de ce même vent. Sa respiration. J'entends surtout sa respiration, si régulière qu'elle en devient entêtante.

Je ne fais pas que l'entendre.

Je peux aussi la sentir contre ma nuque, elle en hérisse mes poils, mais je n'ose pas bouger. J'ai trop peur de la réveiller. Si je la réveille, je devrai à nouveau faire semblant. C'est d'ailleurs ce semblant qui m'a conduit dans ce lit. J'ai joué toute la journée, jusqu'au soir, pour la convaincre de ne pas me renvoyer pas dans le hangar. Je ne pensais pas, que la contrepartie du hangar serait une place dans son lit. Je me serais abstenue de si bien jouer dans ce cas.

Je ne veux pas penser à ce qu'implique le faire semblant, pourtant c'est la seule chose qui m'obsède. Je me revois rire à ses blagues. Je me revois lui faire la conversation, lui raconter des choses intimes sur moi pour confirmer la confiance qu'elle commence à m'accorder petit à petit. Je l'ai laissé me toucher. Des caresses délicates sur mes bras, mes hanches. Des murmures tout près de mon oreille me permettant de sentir les épices dans son parfum trop sucré. La nausée n'était jamais très loin. Elle n'est jamais loin parce qu'elle me touche encore. Son bras est posé au travers de mon corps, le contacte directe de sa peau contre la mienne me brûle mais je n'ose pas bouger. J'ai trop peur de la réveiller.

La drogue m'a beaucoup aidé a pas totalement flipper. L'air de rien elle a continué d'en verser dans tout ce qui avait le malheur de toucher mes lèvres, le thé, la nourriture. Je l'ai senti à chaque fois, et à chaque fois mon esprit en été plus brouillon, mon corps plus réceptif. Mon corps ce traitre. Les frissons n'étaient plus de dégoût même si tout au fond je me sentais hurler à la mort. Je vois plus clair désormais. Parce que ça doit faire des heures que je suis dans ce lit, les yeux grands ouverts et le regard posé négligemment sur le mur qui me fait face.

À la recherche non pas d'une idée, mais de la bonne idée.

Celle par laquelle, je pourrais enfin mettre fin à ce cauchemar. Je me repasse les événements de la journée pour trouver le moindre détail. La moindre petite chose qui pourrait m'aider. J'en reviens toujours au même point. Tant que je ne serais pas parfaitement sobre je ne pourrais rien faire, ma prise de décision, mon temps de réaction, seront toujours beaucoup trop long.

J'ignore combien de temps il me faudra pour combattre les effets de la drogue. Plusieurs heures, plusieurs jours ? Je ne peux pas attendre des jours. Je n'y suivrais pas, j'ai trop peur qu'elle ne devient plus insistante que ses caresses ne soient plus prononcées. Non je ne peux pas. Je m'y refuse, sauf que ma volonté sur la question n'a pas d'importance. Je vais devoir attendre ces jours.

Sauf si...

Sauf si, elle aussi voit son temps de réaction ralentir, devenir aussi long voire plus long que le mien. Plus long de beaucoup. Je pourrais alors tirer mon épingle du jeu. Mais pour cela, je dois trouver où est-ce qu'elle conserve, la drogue qu'elle me donne. Et si je pouvais découvrir de quoi il s'agit je serais peut-être en mesure de savoir comment l'utiliser de manière efficace.

De ma vie, je n'ai jamais été aussi ravi d'avoir un passé de consommatrice de drogues diverses et variées. Mais ce serait bien trop présomptueux de croire que je les ai toute testé. J'avais mes limites, même à l'époque. Fumer, sniffer, inhaler, avaler oui, injecter, jamais.

STORMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant