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"Arrête de me regarder comme si j'étais sur le point de mourir"

-Dinah Duval


Point de vue Dinah Duval

J'ai pas dormi de la nuit, quasiment pas en tout cas. Trop concentré sur la respiration de Dinah. De peur qu'elle ne devienne sifflante, de peur que ce ne soit une indication. Elle est mignonne elle avec ses « fais-moi confiance », comme si par la force de sa volonté elle pouvait faire fonctionner son coeur sans considération pour les mots des médecins et surtout de la science.

-Quand elle décide un truc de toute manière, me dit Marc en haussant les épaules.

Je lui ai fait un topo sur la situation. Il me dit ça maintenant parce qu'il est monté pour tenter de la convaincre de suivre les indications du médecin et qu'il s'est fait jeter aussi délicatement que moi hier soir.

-Faut voir le côté positif, au moins désormais elle assume les petits, il y a quelques semaines en arrière leur simple évocation lui donnait des frissons.

-Ouais, je préférerais si elle n'était pas autant dans les extrêmes, je réponds doucement.

Elle est toujours dans l'abus cette meuf, je suis à bout. Elle peut pas faire comme tout le monde et admettre qu'elle n'est pas obligée de mettre en danger sa vie pour mettre au monde nos enfants. La pression dans mon corps est tellement forte que mes doigts, tenant la cigarette commencent à frémir.

-Elle fait quoi en ce moment ?

-Elle médite pour atteindre la victoire de l'esprit sur son corps, je dis en levant les yeux au ciel.

Ouais, je l'aime, de fou même, mais ce qu'elle peut m'agacer. Et autant je suis super ouvert d'esprit et j'ai beaucoup de respect pour ses croyances, ses pierres à la con, sa pratique de la méditation, mais je crois pas que ça puisse freiner une insuffisance cardiaque, d'où l'agacement.

J'abandonne le filtre de ma cigarette dans le pot déposé sur la table du jardin :

-La victoire de l'esprit sur le corps, dit Marc en secouant la tête. Elle a mangé au moins ?

-Non, je vais lui monter un truc, je réponds en rentrant dans la maison.

Je fais un rapide tour dans la cuisine histoire de lui faire un plateau. Rien de ouf parce qu'elle parvient toujours pas à manger. En plus de la désormais traditionnelle compote, j'ajoute un verre de jus d'orange et Marc dépose sur le plateau le smoothie. Pas besoin d'être devin pour savoir qu'elle va tirer la gueule. Ça lui fera les pieds.

-T'as mangé ce matin ?, je demande tout de même en entrant dans sa chambre.

Assise en tailleur sur le sol de la chambre, elle met plusieurs minutes avant de me répondre. Le calme qu'elle dégage tente de se projeter vers moi mais ne parvient pas à m'atteindre.

-Je peux rien manger.

-Dinah, tu dois manger quelque chose, s'il te plaît. Je t'ai monté une compote et un verre de jus d'orange, je dis en déposant le tout sur ma table de chevet. Y'a aussi le smoothie cadeau de Marc.

Elle fait la moue à la vue du smoothie avant de me répondre :

-Arrête de me regarder comme si j'étais sur le point de mourir. Un mois Ken, c'est juste un mois.

STORMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant