STORM

PROLOGUE

"Elle t'a vraiment brisé le coeur"

-Inès Itondo

Mai 2021

Point de vue Ken Samaras

Les acclamations du public, mon blase scandé en rythme par des milliers de personne en même temps. Ça fait des années que je vis ça. Ça cris, ça hurle, s'en est presque gênant. Je ne suis toujours pas habitué. Je m'habituerai jamais, j'crois. L'adrénaline continue de circuler dans mon corps, alors que nous faisons nos adieux au public. La scène. J'échangerais tout ce que je possède pour ne pas perdre cette sensation qui m'étreint alors que nous rejoignons les coulisses.

-Le Fennec est de retour, s'exclame Doum's en me secouant par les épaules.

Le sourire sur son visage est énorme. Ils sourient tous. J'crois qu'ils sont fiers de moi. J'pensais pas en sortant "Cyborg", qu'il me faudrait plus de quatre ans, pour sortir un nouveau projet solo. Les retours du public ont été énormes, malgré ma longue absence. Je mesure la chance que j'ai, pendant une demie seconde, moi aussi je suis fière de moi.

Je prends rien pour acquis. Personne ne sait la pression que je me mis pour cet album. Personne ne peut imaginer l'anxiété, les prises de tête. Plus simplement l'enfer que ça a été. Pas seulement parce qu'avant de pondre les trente-quatre titres que compte « Les Etoiles Vagabondes : Expansion ». Je n'avais rien écrit pendant dix-huit mois. Dix-huit mois, c'est long quand écrire c'est ton gagne-pain principal.

Mais je l'ai fait, et je suis pas mécontent du résultat. Est-ce que ça aurait pu être mieux ? Ça peut toujours être mieux. Je ne serais jamais parfaitement satisfait. On enregistre, on clipe, on tourne et on recommence avec un nouveau projet. Pour faire mieux, toujours faire mieux. C'est comme avoir la dalle, manger, mais ne jamais être rassasié. La faim ne disparaît jamais vraiment.

Mekra redresse ses sourcils dans ma direction avant de s'éloigner, phone à la main. Il le lâche quasiment jamais son phone. Il attend des nouvelles de sa copine comme un junkie attend sa prochaine dose. J'envie sa position. Lui au moins en rentrant sur Paname, il va la retrouver sa Billie. Celle pour qui, il déplacerait des montagnes. Alors certes, dans cinq minutes, il va tirer la gueule parce qu'elle va lui dire avec sa délicatesse habituelle d'aller se faire foutre. Mais il l'aime comme ça sa Billie. Même si elle n'est pas sympa.

Moi, je suis pas pressé de récupérer le mien de phone. Je vois une meuf en ce moment. Je sais pas si c'est sérieux. Je mets pas fin au truc parce que c'est une meuf bien. J'ai suivi les conseils de Billie justement. J'me suis trouvé une nana avec un job stable, sans problème existentiels, ni d'ex un peu trop lourd. Une meuf bien quoi. Mais j'ai pas envie de lire les messages qu'elle a du m'envoyer pour me souhaiter bon courage. J'peux pas. Pas tout de suite.

J'arrive pas à penser à Priya et encore moins à lui parler à la fin des concerts.

J'ai écrit « Les Étoiles Vagabondes » en pensant à la femme de ma vie. Cette femme, ce n'est pas Priya, c'est difficile de ne pas être noyé par son absence quand on fait certain titre de l'album. Surtout « Elle pleut », mais elle plaît au public, alors forcément elle est sur la tracklist. En conséquence, j'ai du mal à penser à la meuf que je vois en ce moment en sortant des concerts. C'est con, c'est une chouette nana Priya.

Elle est belle. Sa peau est brune, ses longs cheveux noirs sont lisses, sa taille fine. Mais justement sa peau brune est trop claire, ses cheveux noirs sont trop lisses, sa taille trop fine. Je ferme les yeux pour faire fuir son image à Elle, celle qui efface avec facilité celle de l'indienne qui partage ma vie. Puis je martèle mon mantra de ces dernières semaines, celui qui me permet de me lever le matin.

Elle reviendra pas, elle reviendra pas, elle reviendra pas.

Pendant, longtemps, j'me suis rassuré en me disant, qu'elle finirait par me pardonner, qu'elle finirait par revenir. J'ai mis ma vie sur pause pendant des mois. Le monde a continué à tourner sans moi. J'ai fini par me dire qu'il fallait que j'écrive pour faire le deuil de notre histoire. En le faisant, je me suis convaincu que la sortie d'un nouvel album, qui parle d'elle en plus la ferait revenir. L'album est sorti, elle n'est pas revenue.

Elle m'a appelé en revanche. L'ironie du sort à fait en sorte que je ne sois pas en mesure de répondre à son appel. J'ai écouté le message vocal, seule trace de son existence, une centaine de fois. Au départ pour y chercher un message caché qui n'existe pas. Puis juste pour entendre le son de sa voix. L'entendre m'appeler « Kenny ». Elle ne dit même pas si elle a aimé l'album ou non, seulement qu'elle a pleuré. Et puis elle me demande avec sa petite voix de réparer mon cœur.

D'où le mantra. Si elle veut que je répare mon cœur, c'est qu'elle-même a réparé le sien, qu'elle est passé à autre chose. Non ? Après tout, c'est elle qu'est partie, c'est elle qui m'a quitté.

Avec l'adrénaline, la sensation de fierté disparaît. Il ne me reste que ma fatigue. Elle au moins, elle ne me quitte pas. Subitement c'est trop, les éclats de rire, l'agitation dans la loge. Je fuis mes la présence de mes gavas en sortant dans le couloir. Inès semble m'y attendre. Inès, c'est ma go sûre de ouf. Mais à cet instant, je n'ai pas envie de la voir parce que, la future femme de Sneazzy, lit trop facilement en moi. L'éclat d'inquiétude dans son regard me fait de la peine. Je lui ai dit mille fois qu'elle se faisait trop de soucis pour moi.

Elle m'a ramassé, littéralement, dans des états tels qu'elle se fera du soucis pour moi toute sa vie.

-Ça va, elle demande après un long moment d'observation.

-Ouais t'en fait pas.

-Pas à moi Ken, elle répond, mais n'insiste pas à la place, elle me tend mon phone. Priya t'a appelé plusieurs fois.

Je récupère l'objet et le glisse immédiatement dans la poche de mon jean sans le regarder. Me voyant faire, la futur marié fait la moue. Elle ne voit pas d'un bon œil ma relation avec Priya. C'est une meuf bien Priya, elle mérite mieux que moi. Je ne suis pas juste avec elle, parce que je suis pas encore prêt pour m'engager dans une nouvelle relation.

Non, je ne suis pas prêt, mais j'ai besoin de l'être. Je force un peu le destin, c'est tout.

-Elle t'a vraiment brisé le coeur, elle conclu comme on réaffirme quelque chose que tout le monde sait déjà.

Je ne prends pas la peine de lui répondre. C'est rare, pour une fois, Inès se trompe.

Dinah Duval, n'a pas brisé mon cœur. Je l'ai brisé tout seul comme un grand. Elle n'est pas partie, de sa propre volonté, je l'ai poussé à le faire. 

On signe enfin mon grand retour, j'ai pas vraiment d'idée sur l'échéance des publications mais plusieurs fois par semaine c'est certain. 

Si vous êtes nouveau ici, bienvenue (n'hésitez pas à faire un tour sur mon profile). Si au contraire vous me suivez depuis un moment je vous remercie d'être toujours aussi présent.

En espérant que cette histoire vous plaira  

Je vous envoie plein d'amour 

Nesy