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Tout à coup, sans prévenir, il se tourne de moitié vers la sortie de la salle :

— Je crois que nous allons poursuivre cette conversation plus tard.

— Mais c'est pas dans le texte, ça... couiné-je, surprise.

— Je reviens.

Il bouge de sa place sans prévenir et s'éloigne en direction de l'entrée. Je me demande ce qu'il fait.

Je sursaute : un frisson glacé me parcourt l'échine quand j'entends un coup de feu et des cris. Je suis tétanisée, je n'arrive plus à bouger.

Soudain, je vois apparaître un groupe de mecs qui viennent vers nous ; ils tiennent le collègue d'Ethan en otage, un couteau sur la gorge, ce qui empêche les autres hommes d'intervenir, mais ces derniers les suivent de près, déterminés à intervenir à la moindre ouverture.

Effrayée, je viens me placer derrière Ethan, qui n'a pas l'air d'avoir peur.

Quand ils voient Ethan, les nouveaux venus s'immobilisent. Leur visage se décompose et ils paraissent soudain inquiets.

— Et merde. Qu'est-ce qu'il fait là, lui ?

Ils lâchent leur otage au sol, mais maintenant qu'ils sont devant Ethan, personne n'ose intervenir.

Plusieurs d'entre eux semblent sur le point de s'enfuir, d'autres le regardent avec crainte et hostilité. Et même une certaine forme de terreur. Aucun d'entre eux n'ose bouger malgré leur supériorité numérique. Qu'est-ce qui peut justifier un tel changement de comportement ?

On dirait qu'ils le connaissent, qu'ils le détestent et en même temps qu'ils le craignent véritablement.

Ethan n'en démord pas. Absolument pas stressé, il les regarde très calmement.

Le leader, celui qui tenait le type en otage, semble pourtant prêt à l'affrontement. Son visage apeuré laisse transparaître une haine féroce.

Mais les autres se méfient des conséquences, s'il fallait affronter Ethan.

— Faites gaffe à ce mec, vous savez pas qui c'est ? Je le connais, lui... moi je me barre, essaie-t-on de le dissuader.

— Je m'en fous, il n'est pas avec ses potes cette fois. Il ne me fait pas peur.

Ethan ne bouge pas d'un cil, toujours parfaitement calme. Il leur adresse un sourire arrogant et provocateur. Il n'a clairement pas peur d'eux.

Le leader ne semble pas apprécier son attitude, et s'avance d'un pas vers lui avec une hostilité de plus en plus forte.

Plusieurs reculent, et s'apprêtent à s'enfuir car ils ne veulent surtout pas rentrer en conflit avec Ethan. Mais le leader n'abandonne pas : menaçant, il s'approche encore plus du jeune homme. Qui lui ne bouge toujours pas.

Le mec fait un violent mouvement vers lui pour essayer de le frapper ; Ethan bloque le coup avec l'avant-bras puis il me pousse et m'attire immédiatement derrière lui pour me protéger. Éviter que je ne me prenne un éventuel coup.

J'ai senti à son geste qu'il n'est pas si tranquille que ça : il craint qu'il m'arrive quelque chose.

Je n'ose pas bouger pour ne pas envenimer les choses. Mais mon ventre s'est noué et mon cœur tambourine à m'en faire mal.

L'espace d'un instant je crois qu'ils vont réellement se battre ; mais l'autre n'attaque pas à nouveau. Il n'a fait qu'esquiver un geste pugnace pour tenter d'intimider Ethan.

Mais sans donner suite pour le moment. Même lui n'ose pas se fritter avec Ethan.

Tandis que cet attaquant a reculé après sa tentative avortée d'intimidation, Ethan considère des yeux l'ensemble des criminels. Tel un fauve qui analyse ses proies. J'ai l'impression qu'il s'apprête à les éliminer un par un.

Puis il se rappelle de ma présence. Dès lors il décide de ne pas rester dans la provoc' : il ne veut pas risquer que je sois prise dans le combat. Il veut absolument éviter que ça arrive.

À contrecœur il décide de quitter les lieux. Ne gaspillant pas sa salive à parler, il passe à côté du groupe tandis qu'ils s'écartent tous. À leurs mouvements je vois qu'ils sont vraiment effrayés par lui. Il ne prend pas la peine de saluer le tatoué qui essaye péniblement de se remettre debout.

Il se dirige vers la sortie avec moi sur ses talons. Personne n'intervient.

Je passe la porte des lieux restée ouverte, juste après Ethan, et on sort du bâtiment.

Je le rejoins dehors, sans un mot. On se dirige vers la moto. Je ne prononce pas une seule parole jusqu'à ce qu'on monte sur le bolide, je vais derrière lui.

Il fait rugir le puissant moteur de la ténébreuse moto et se prépare à démarrer ; à cet instant je me plains, tout en passant mes mains autour de la taille du jeune homme :

— Mais qui c'est ces types ??

— C'est à cause de toi que je ne peux pas rester, rétorque-t-il froidement. Si tu n'avais pas été là j'aurais pu en finir avec eux.

— Quoi ??

J'arrive pas à y croire ! Et maintenant ça va être de ma faute, en plus ! Putain, c'est pas demain la veille qu'il se remettra en question !

Je lui lance :

— Dans quoi tu m'as amenée, encore ? Si tu as des ennemis, on va pas pouvoir tourner la scène ici ! Et en plus, on doit être quatre dans cette scène, tu crois quand même pas que je vais inviter Laetitia et Mégane ici ? Pour que ça se finisse en fight !

— Je viens juste d'arriver en ville, il faudra que j'en discute avec quelqu'un qui ne peut rien me refuser. En attendant, on tournera dans l'un de mes appartements. Adapté au mieux possible à la géographie scénique du film.

Il me tend le casque. Que je saisis, malgré ma colère, qui vient tout juste de remplacer ma peur de tout à l'heure. Puis il fait violemment vrombir le moteur, le son puissant de la Yamaha s'élève et remplit les lieux.

Des fois je le déteste vraiment, mais pourquoi a-t-il fallu que je tombe amoureuse d'un criminel ? D'un fauve comme ça, violent... probablement impliqué dans des luttes entre factions rivales, pour le contrôle de la ville.

J'aime beaucoup travailler avec lui et il est un metteur en scène hors pair, un acteur qui fait vibrer, mais il a tout gâché en me rappelant sa vraie nature. Au moment même où j'avais enfin réussi à l'oublier. Pfff, et moi qui ai cru qu'il pouvait être un mec bien, et même parfois se montrer gentil...

J'enfonce les ongles dans le torse d'Ethan pour essayer de lui faire mal, histoire de le punir, mais il a le vêtement trop épais. Pourtant, j'ai la sensation qu'il frémit sous mes doigts. Comme s'il appréciait mais qu'il ne voulait pas le dire.

En tout cas, je me demande s'il aime bien se battre, comme ça, et peut-être même aller jusqu'à tuer des gens. C'est une petite distraction, pour lui.

Il met la moto en mouvement, et on reprend bientôt la route. Je peux à nouveau apprécier de sentir l'air me fouetter le visage et souffler dans mes cheveux au rythme de la vitesse.

Qu'est-ce que je vais dire à mes amies ? Qu'Ethan gâche tout avec ses conneries ? Mais, au fond, je n'arrive même pas à lui en vouloir...

La Panthère de LumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant