Chapitre 2

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A la base, Saki et moi devions prendre du bon temps dans cette maison close, découvrir les fameuses geishas de Kabukichō et boire de tout nôtre saoul. A la base, je voulais rentrer chez moi pour jouer à la console confortablement affalé sur mon canapé-lit. A la base, on n'aurait jamais cru risquer nos vies ce soir-là.

Mes yeux s'écarquillent au fil des secondes. J'entends mon cœur battre dans mes oreilles. Est-ce la peur ou l'alcool qui chamboule tous mes sens ? Mes jambes tremblent, pourtant je tente de me relever. L'homme aux cicatrices appuie sur mon épaule pour me forcer à rester à genoux. Je me sens incroyablement vulnérable ainsi. Tentant de reprendre mes esprits, je laisse mes yeux se balader dans la pièce. D'après ce que je vois, on se trouve dans une sorte de bureau aménagé en salon décontracté, avec un grand billard installé sur le côté. Les tons rouge et noir sont abordés. Des sabres, des éventails et des peintures de dragon ornent les murs qui nous entourent. Mes yeux se posent sur une desserte débordante de bouteilles d'alcool. A leur étiquette, je me doute qu'elles coutent une fortune. Je reviens à la réalité lorsque la voix de l'homme se fait entendre.

- Des gamins ? C'est eux qu'on entend depuis tout à l'heure ? demande-t-il en fourrant ses mains dans les poches de son costume.

Sa voix est grave et profonde. Elle s'immisce dans mes oreilles jusqu'à raisonner dans mon cerveau. Je jette un coup d'œil à Saki qui ne bronche pas, le visage livide. L'autre homme l'a forcé à se mettre à genoux, lui aussi. On a l'air de deux pauvres gamins qui ne vont pas tarder à se faire punir. La situation est ridicule.

- Ils n'ont pas de quoi payer patron, répond l'homme.

Le patron nous fait volte-face et part s'installer sur un fauteuil en velours. Il croise aussitôt les jambes, pose un coude sur l'accoudoir et nous scrute du regard. Au même moment, un homme entre dans la pièce. Son costume trois pièces est impeccable et ses cheveux noirs sont parfaitement coiffés en arrière. Son visage mature reste fermé lorsqu'il nous voit. Il porte une main sur ses lunettes carrées, les remettant en place.

- Monsieur, laissez-moi m'occuper de ce cas. Vous avez rendez-vous au port d'ici une demi-heure.

Le patron lève la main tout en nous fixant. Je sens son regard perçant dériver sur moi. Peut-être que ma vision me joue des tours mais j'ai l'impression de voir un sourire carnassier s'afficher sur son visage.

- Ça ira, Katashi. Etant donné que je suis présent ce soir, je vais me faire un plaisir de régler ce petit 'soucis', souffle-t-il doucement.

Mes dents grincent entre elles dans un sifflement aigu. Me faire jeter contre une porte aurait dû me calmer mais je bouillonne d'autant plus de rage, surtout lorsque je vois l'air narquois dudit patron. C'est le gérant de la maison close et alors ? Il se prend pour qui ce connard ?

- C-c'est moi qui n'avais pas d'argent... Mon ami n'y est pour rien. Qu'est-ce que je peux faire p-pour y remédier ? demande soudainement Saki, la voix tremblante et les yeux baissés.

Il est là, effrayé et vulnérable. Je ne l'ai jamais vu comme ça. Je l'ai toujours connu extravagant, débordant de joie. Ça me serre le cœur car je sais qu'il ne mérite pas de vivre cette situation. On a trop bu au bar et l'argent s'est évaporé...

Le patron porte son attention sur Saki. Il relève le menton en le toisant.

- Qu'est-ce que tu as à me proposer, gamin ?

- Je... Je peux travailler pour rembourser... peine-t-il à articuler.

- Tu vas vendre ton corps pour me dédommager ?

YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant