Chapitre 110

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La lumière est si éclatante qu'elle me brûle les rétines à travers mes paupières closes. La migraine qui me poursuivait auparavant est toujours présente, martelant l'ensemble de mon crâne. Je tourne lentement la tête sur le côté, un rictus sur les lèvres. Mon corps est lourd et douloureux. Et les souvenirs envahissent mon esprit.

La course poursuite, l'accident...

Les balles, le sang, la rage...

Emiko...

Tōji.

J'ouvre subitement les yeux et me redresse d'un coup, haletant et fiévreux. La respiration saccadée comme si je sortais d'un cauchemar, j'observe tout ce qui se trouve autour de moi. À priori, je suis dans ma chambre, assis sur mon lit et je ne comprends pas. Les rideaux sont tirés et dévoilent la lune qui demeure dans le ciel noir, dépourvu de nuage et d'étoile.

Combien de temps s'est-il écoulé depuis l'accident ?

Mon cerveau est en ébullition et ma seule priorité est de retrouver mes proches. Je bouge mes membres et une grimace se forme sur mon visage. Je sens qu'on pose une main sur mon épaule.

-          Yoshiro, rallonge-toi... Tu es...

-          Katashi ? émet-je, confus.

Il est là, devant moi et à travers ses lunettes il m'adresse un regard désarçonné. À ses côtés, un homme en blouse blanche s'applique à verser un liquide transparent sur une compresse et l'approche près de moi. Je gifle sa main sans attendre, effrayé et désorienté.

Qu'est-ce qu'il se passe ?

-          Doucement, tu es blessé, on doit te soigner, ronchonne le médecin à l'allure strict.

Du même gabarit que Katashi, il relève ses lunettes et les cales sur sa tête. Sa barbe grisonnante me fait comprendre qu'il a largement dépassé la cinquantaine et les rides près de ses yeux m'indique la fatigue qui l'habite. Katashi pose ses deux mains sur mes épaules et exerce une douce pression pour me tenir en place. Je ne bouge pas, la bouche entrouverte, complètement perturbé.

-          Où est Tōji et Emiko ? soufflé-je en fixant le vide.

Le médecin désinfecte la plaie qui se trouve sur mon crâne. Le sang a séché et est devenu poisseux. Je me laisse docilement faire, rassemblant les morceaux manquants dans mon esprit.

Comment est-ce que j'ai atterris là ? Je me rappelle être monté dans la voiture, il faisait chaud puis froid... Et j'étais très fatigué. Est-ce que je me suis évanoui ?

Katashi se pince la lèvre, le visage marqué par une rude inquiétude. Il pousse un soupire en abaissant légèrement la tête.

-          L'opération s'est bien passée mais Emiko a dû être plongée dans le coma et...

-          Quoi ?

-          Elle perdait beaucoup de sang, il fallait la stabiliser...

Le visage aussi livide qu'un cadavre, je tressaille à ses paroles. L'effroi s'empare de moi et je frotte instinctivement mes avant-bras, parcouru par un millier de picotements qui me ronge la peau.

-          Elle va s'en sortir, n'est-ce pas ? Elle respirait. J'ai vu ses doigts bouger ! m'exclamé-je.

Je m'agite, les membres tremblants. Le médecin enroule un bandage autour de ma tête et en grognant, je le repousse.

-          Arrêtez ça, c'est Emiko qu'il faut soigner ! vociféré-je.

-          Laisse-toi faire mon garçon, tu as une sacrée plaie sur la tête !

YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant