Chapitre 123

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Allongés sur le lit de la grande chambre qui nous offre une vue imprenable sur le quartier de Shinjuku, j'éclate d'un rire aigu et rejette la tête en arrière. Je me tortille sous les chatouilles de mon amant tout en tentant de reprendre mon souffle. Les joues rouges, les yeux quelques peu vitreux, je reporte mon attention sur Tōji qui s'amuse à mordiller ma peau. Sa bouche chaude se pose sur mon flanc droit et une morsure m'arrache un petit gémissement. Il esquisse un sourire amusé et passe sa langue sur ses lèvres.

- Alors ?

- C'est bon j'abandonne ! Je me rends ! gloussé-je en emplissant la pièce de mon rire sincère.

Satisfait, le mafieux se redresse et se positionne au-dessus de moi. Il se fraie un passage entre mes cuisses et plante son regard acéré dans le mien. Du bout des doigts il replace une mèche de cheveu derrière mon oreille et dépose ses lèvres dans mon cou. Je profite de ce moment pour prendre une longue inspiration et réaliser que cela fait plus de deux heures que nous nous amusons à imprégner toutes les pièces de nos présences.

- Comment tu te sens ? demande-t-il doucement, ses yeux plantés dans les miens.

- Je vais bien... mieux... Je pense, avoué-je.

- Que cela dure, souffle-t-il.

J'étire mes lèvres pour dévoiler un petit sourire. Tōji continue de me contempler avec une profondeur qui lui est inconnue.

- Je vais bientôt avoir vingt-quatre ans... murmuré-je comme si c'était un secret.

- La vie ne fait que commencer. Quel projet as-tu en tête ?

- Je pensais... peut-être reprendre un poste en restauration... Et rendre visite à ma grand-mère. Et...

Une moue songeuse traverse mon visage. Mon cœur désire beaucoup de chose mais je m'interdis de franchir le cap. J'ai pris conscience que plus rien ne serait comme avant, désormais.

- Enfin, c'est bête d'y penser... Je dois rester enfermé de toute manière, il n'y a pas lieu de penser à tout ça, marmonné-je en forçant sur mon sourire.

- Laisse-moi encore un peu de temps et je te promets que tu pourras retrouver ta vie d'avant. Je pourrais même t'acheter un restaurant, qui sait ?

- Arrête... ! L'argent ne fait pas tout, raillé-je en levant les yeux au ciel.

Le yakuza penche la tête sur le côté, intrigué par mes propos. Sa main glisse sur ma taille et se pose sur ma cuisse nue.

- Avec ou sans Aleksander, je ne sais pas si j'arriverai à retrouver une vie normale, ajouté-je.

- C'est ce que tu penses ?

Sa question reste sans réponse. Je me contente de l'observer puis finalement, je me tourne sur le côté et mes yeux restent rivés sur la grande fenêtre. Mon visage affiche une expression neutre mais à l'intérieur de moi, c'est la tempête. Les médicaments contiennent ce tourbillon d'émotion et à cet instant, j'ai ce regret d'être anesthésié.

Mais je n'ai pas le choix, je dois aller mieux. Saki ne supporterait pas de me voir dans cet état.

- Je ne pourrai jamais agir comme si rien ne s'était passé. Les derniers évènements sont ancrés en moi et que je le veuille ou non, ça m'a changé, reprends-je en me recroquevillant.

Je sens le torse de Tōji contre mon dos. Son souffle chaud m'hérisse les poils de la nuque. La lumière de la lune éclaire la pièce sombre et les étoiles chahutent entre elles. Je me perds à les observer, perdu dans mes songes.

YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant