Chapitre 105

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Les gouttes d'eau s'écrasent sans interruption sur les baies vitrées du salon, assombrissant d'autant plus la pièce où je me trouve. Les pubs défilent sur l'écran de la télévision que j'ignore royalement, concentré sur ma conversation avec Saki. Étant en appel visio avec lui depuis un bon quart d'heure, je vagabonde dans la pièce en trainant des pieds, le téléphone posté devant mon visage. Saki arbore une mine joyeuse et il babille sur les derniers évènements qu'ils lui sont arrivé.

Je l'écoute en souriant, appréciant d'avoir de ses nouvelles car avec la situation actuelle, il ne m'est toujours pas permis de le voir.

- Et comme je te disais, on a fini super tard car la dernière table ne voulait pas partir ! J'étais super frustré. Pour la peine, j'me suis enfilé deux shoots de saké, s'exclame-t-il en ricanant.

- Ça ne m'étonne pas de toi, tu trouves toujours un prétexte pour picoler, raillé-je en m'affalant sur le grand canapé.

Je passe un bras derrière ma tête et croise les jambes sur la table basse.

- C'est pas faux, glousse-t-il.

À travers l'écran, Saki se déplace dans son appartement que je connais bien. Il pousse doucement une porte et entre discrètement dans une nouvelle pièce. Un sourire espiègle franchit ses lèvres pleines.

- Regarde-moi ça... souffle-t-il.

Les yeux plissés, j'approche légèrement l'écran de mon visage et, alors que Saki fait pivoter son téléphone, j'aperçois un corps étendu dans son lit. Allongé sur le ventre et le dos nu, un garçon semble dormir profondément. Une expression d'incompréhension s'installe sur mon visage et aussitôt, elle se transforme en surprise.

Akira est dans le lit de Saki, à moitié nu. Je reconnais ses cheveux bruns et ses tâches de rousseurs ainsi que sa silhouette musclée.

Bordel.

Il n'était pas censé être de garde, lui ?

- Saki... ! Me montre pas ça ! chuchoté-je comme s'il pouvait m'entendre à travers le combiné.

- Et pourquoi pas ? Il dort, il n'y a rien de choquant ! répond mon ami en gloussant.

- Il est censé assurer la protection d'Emiko et de la mienne mais en réalité, il préfère batifoler avec toi... marmonné-je en haussant un sourcil.

- Non, il est venu après la fin de son service ! Mauvaise langue, ronchonne Saki en quittant la pièce.

Je lève les yeux au ciel, peu affecté par sa réflexion justifiée.

- Tu critiquais mes goûts mais t'es pas mieux que moi. Maintenant, tu fricotes avec les mafieux, toi aussi, ricané-je en abordant un sourire malicieux.

Saki se déplace avec nonchalance. Je le vois rejoindre sa petite cuisine et se préparer un thé. Il me jette un petit coup d'œil.

- Akira n'est pas comme ton yakuza, je te rassure. Il se rapproche plus des gens banales, comme moi... Et comme toi, souffle-t-il.

- Si tu le dis.

Je hausse brièvement les épaules, laissant un léger silence s'installer entre nous. Saki est naïf de croire Akira inoffensif. Même si je ne l'ai pas vu en action, je sais très bien qu'il n'hésiterait pas à trancher des gorges. C'est un yakuza, lui aussi. Qu'il le veuille ou non.

Et même moi, malgré mon inactivité physique, je suis aussi pourri qu'eux. Avoir les mains propres ne signifie pas être innocent. Je contribue à la corruption et aux vices. Je fais partie de ce milieu-là et je l'assume, à présent. Et seulement parce que je me suis épris d'un stupide mafieux.

YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant