Chapitre 26

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Je m'installe à table sous les regards interloqués de mes compagnons de 'voyage'. Les mains croisées entre elles, Isao me scrute du regard.

-          Toujours aussi ingrat à ce que je vois, s'exclame-t-il en relevant un de ses sourcils épais.

C'est vrai que je pourrai être plus agréable. Ils sont venus me chercher en Corée et soit dit en passant, m'ont sauvé la vie. Pourtant... Je n'arrive pas à être plus enjoué. Je me sens vide et je sais qu'à la moindre réflexion, je pourrai exploser.

-          Mange, réplique Tōji en remplissant mon assiette.

La table est recouverte de nourriture, passant par des aliments autant sucrés que salés. Il me sert un verre de jus d'orange que je prends aussitôt. Je suis complètement déshydraté.

-          Merci, soufflé-je mollement en portant le verre à ma bouche.

Les quatre hommes discutent entre eux calmement. Je n'écoute pas vraiment, absorbé par la tenue du yakuza. J'ai toujours été habitué à le voir porter des costumes alors aujourd'hui, lorsque je vois qu'il porte un simple t-shirt en col v blanc et un pantalon en lin marron, je reste déconcerté. Ce style décontracté lui va bien et je me surprends à le reluquer.

Renfrogné sur mon siège, je bois ma boisson, le regard absent. Je passe inaperçu, personne ne fait attention à moi et ça me va très bien. Je peux tranquillement me perdre dans mes pensées et laisser mon cerveau se torturer avec délectation.

Je sens le regard de mon mentor sur moi avec une insistance que je déteste. Je relève mes yeux hazel sur lui. Son sourire malicieux m'irrite au plus haut point.

-          Quoi ? dis-je sèchement.

-          Tu as passé une bonne nuit, Yoshiro ? demande-t-il.

Je plisse les yeux. J'en étais sûr. Il a tout entendu, ce bâtard. Etant donné que je ne réponds pas, Isao s'excite d'avantage.

-          Eh bien ? Tu as perdu un peu de voix non ?

-          Isao, rétorque brutalement Ian en tapant du poing sur la table.

Je suis surpris et je ne suis pas le seul. Tous les regards dérivent vers lui et on peut déceler de l'étonnement dans chaque visage. Tōji observe attentivement son homme de main.

-          Laisse-le tranquille. Tu aimerais qu'on t'emmerde après une telle épreuve ? s'agace l'Américain.

-         Ça va, ce n'est que de la taquinerie ! Il me connait, proteste Isao en levant les mains en l'air.

Je les observe à tour de rôle, la bouche entrouverte, un peu hébété. Ian a pris ma défense ? Depuis que je l'ai rencontré, on s'est brièvement parler.

Ian porte son regard vers moi et désigne mon assiette toujours pleine du bout du menton.

-          Tu devrais manger, ça te redonnera des forces, assure-t-il.

-          Je n'ai pas faim, avoué-je doucement.

Je ne peux pas manger. La boule au creux de mon estomac ne veut pas partir. Elle est là et elle s'accentue de plus en plus. Tōji se lève et regarde l'heure sur sa montre.

-          Les eaux sont calmes, profitons-en pour repartir, réplique le yakuza.

Ses hommes de mains acquiescent en se levant à leur tour. Je lève mes yeux vers Tōji, fourrant mes mains dans le sweat-shirt qu'il ma dégoté.

-          On rentre au Japon ?

-          Oui.

Je me sens un peu soulagé à l'idée de remettre les pieds dans mon pays natal. Je vais pouvoir tenter de remettre un peu d'ordre dans ma vie. J'ai besoin de faire le point.

YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant