Chapitre 51

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La distance se creuse de plus en plus entre le yakuza et moi. Comme à son habitude, il reste très peu à l'appartement, seulement pour prendre une douche et dormir quelques heures. Il ne prend même plus ses repas et ça m'évite de cuisiner. Je n'en suis pas plus soulagé.

A mon sujet, je ne sors pas beaucoup. Je reste la plupart du temps cloîtré dans ma chambre, enroulé dans ma couverture, plongé dans mes pensées.

Je ne cesse de repenser à ma rencontre avec Minoru et à ce qu'il m'a dit. Ses mots m'ont réellement ébranlé et maintenant, je ne vois plus les choses de la même manière. Je suis convaincu que Tōji va me jeter d'un moment à l'autre. Comme il m'esquive, j'en déduis qu'il n'a pas encore le courage de le faire.

De toute manière, j'ai décidé que je serai le premier à partir. Je ne lui laisserai pas l'occasion de prendre cette décision. Il a assez pris le contrôle de ma vie ces derniers mois.

Et déjà, pour commencer, je dois me débarrasser de Choso. Il est agréable et serviable mais je ne veux pas d'un garde du corps. Je n'en n'ai pas l'utilité et je n'accepte pas qu'on prenne la décision à ma place.

Il est encore tôt dans la journée et j'entends des pas dans le couloir. Ma porte n'est pas entièrement fermée et j'aperçois la lumière du jour qui tente de s'infiltrer dans mon royaume de noirceur. Mais aussi, en posant mes yeux sur l'embrasure de la porte, j'aperçois la silhouette du mafieux. Il est immobile et surtout silencieux. Je ne vois qu'un bout de sa manche et son visage reste hors de ma portée. Je retiens mon souffle. Il va entrer dans ma chambre ?

On ne s'est pas parlé depuis notre altercation. Je n'ai pas eu le courage de le confronter une nouvelle fois. Pourquoi faire de toute manière ? Alors depuis, je fais comme lui. Je l'esquive et surtout, je me protège.

Je continue de fixer la porte, mon cœur tambourinant dans ma poitrine. S'il pose un seul pied dans MA chambre, j'insulte tous ses ancêtres. S'il entre, je le dégage. S'il entre...

Mais il ne pousse pas la porte et reprend son chemin. Peu de temps après, la porte d'entrée claque et je me retrouve de nouveau seul. Mais en réalité, depuis le début, je l'ai toujours été.

Il n'a jamais été avec moi.

J'encaisse le coup, la gorge serrée. Je voulais qu'il entre dans ma chambre. Je voulais qu'il vienne à moi, qu'il entame la discussion même si c'est pour me sermonner car j'ai failli casser la machine à laver. Je voulais une présence, une parole, un geste.

Une attention.

Mais il en n'est rien et je dois l'accepter. Je dois penser à moi et surtout me reprendre en main.

Alors je rejette la couverture et bondit du lit. J'attrape mon téléphone et compose le numéro de Saki. Hors de question que je reste ici à me morfondre !

Mon ami répond après plusieurs sonneries et sa voix joyeuse transperce mes oreilles.

-          Holà Yoshi ! J'ai cru que tu étais mort.

-          Salut, Saki. Désolé, j'étais un peu occupé ces derniers temps...

Ouais, à me lamenter.

-          Ce n'est pas grave, rétorque-t-il doucement.

-          Euh, c'est un peu précipité mais ça te dirait qu'on se fasse une sortie tous ensemble aujourd'hui ?

-          Tu veux dire avec la bande ?

-          Oui, c'est cela.

-          Je les contacte et je te dis ça. Ok ?

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