Celtica cligna des yeux plusieurs fois, pas vraiment certain du sens des mots prononcés par son père. Abandonner Ironie ? Sa voix résonna étrangement dans son esprit. C'était surréaliste.
— Mais... C'est impossible ! Ironie...
— Ta fiancée est déjà au palais, il faut célébrer vos noces sans plus attendre.
Celtica se sentit vaciller, comme au bord d'un gouffre béant.
— Mais sans Ironie, pas de couronne ! répliqua-t-il, s'attachant à cet unique espoir de retarder encore l'échéance. Selon nos lois...
— Je connais les lois, Celtica, pour en avoir rédigé certaines moi-même. Mais je ne suis plus aussi vaillant qu'avant, et Mérénos se rapproche tous les jours un peu plus de moi. Ironie n'est pas aussi nécessaire que tu ne le crois, mon fils. J'ai gouverné de longues années sans elle, et toi-même sauras en faire autant.
Celtica serra les dents, le cœur au bord des lèvres. Par Mérénos, de quoi parlait-il ? Depuis qu'il était enfant, on n'avait de cesse de lui répéter que l'épée était étroitement liée au trône, et qu'il fallait qu'il l'obtienne pour régner, et que sans elle, il ne pourrait être intronisé. Ni même marié.
Il se tourna vers ses amis pour trouver un peu de soutient. Mais Vlad et Fédra n'exprimèrent que de l'indifférence, comme s'ils n'écoutaient pas la conversation. Exactement comme lorsqu'ils se présentaient à la cour. Ils faisaient semblant de ne rien entendre, et n'affichaient aucune expression. Ils en discuteraient probablement après cette entrevue. Quant à Cléon, elle fixait Celtica, les sourcils froncés. Elle essayait sans doute de reconstituer le fil de leur conversation.
— Sabik m'a parlé du Chant des Astres. Et du Verset du Feu.
— Que t'a-t-il dit ? souffla l'empereur.
— Toi, qu'as-tu à m'en dire ?
Celtica planta ses yeux dans le regard fantomatique de l'image de son père. Cette méthode de communication ne permettait pas de montrer les plus infimes variations d'émotions, il était incapable de deviner les pensées de l'empereur. Son silence pouvait être traduit de manières si différentes ! C'était frustrant. Il n'avait d'ordinaire aucun problème à déchiffrer les expressions de cet homme qui était tout pour lui, mais là, il se faisait l'effet d'un aveugle.
— Ce n'est pas important, répondit-il enfin après de longues minutes, ce ne sont que des fables. De faux mystères autour de notre famille. Sabik ne sait rien, il s'inquiète de notre maison, ni plus ni moins.
— C'est Sabik qui m'a envoyé à la recherche d'Ironie, et tu n'as rien fait pour m'en dissuader, et à présent, tu me demandes de tout suspendre ?
— Je suis mourant, Celtica. Ce qu'il faut à ce pays, c'est un souverain jeune et alerte, pas d'un mort en sursis. Tu es mon seul enfant, mon fils adoré, mon héritier ! S'il t'arrivait quoi que ce soit... Ou si tu ne parvenais pas à récupérer l'épée à temps...
Celtica sentit une vague de rage gonfler en lui. Était-ce là du chantage ? Pourquoi lui mentait-il ? Il résista à l'envie de mettre un terme à leur échange, et crispa ses doigts sur la vasque. Toujours à lui dire ce qu'il devait faire ou non. À diriger les moindres détails de sa vie. Et à présent, ils étaient deux. Qui de Sabik ou d'Exodica disait la vérité ? Qui des deux avait à cœur les intérêts du Brasier ? Qui des deux pensait à lui ? À lui en tant qu'Humain, et non pas comme un instrument politique ?
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Le Chant des Astres - Tome 1 : Le Verset du Feu
FantasyDe l'autre côté de la voûte céleste Chantent les étoiles. Elles content une querelle millénaire qui oppose les dieux. Une fabuleuse épée, Ironie, est au centre de toutes les préoccupations, car son nom est synonyme de destruction. Pour retarder l'in...