28 Festivités (4/4)

34 10 4
                                    


     Après de nombreuses salutations, Celtica retrouva la tranquillité de la krièn't. Les bruits des festivités lui parvenaient plus étouffées. Mais la magie... Elle ne connaissait aucune frontière ! Légèrement nauséeux, il se laissa choir sur sa natte et commença à dégrafer sa tunique nâémoise. Il appréciait sa coupe, sa couleur et le toucher du tissu. Il gardait de l'humidité et chassait efficacement la chaleur - une bénédiction sur cette île ! - mais elle n'était pas idéale pour dormir.

     Le plancher à l'entrée grinça.

     — Ah ! Aljinan ! C'était une belle fête ! lança le jeune homme. Où étiez-vous avec Arkh ? J'avais espéré vous voi...

     Fūrrin apparut derrière le rideau de l'ouverture.

     — Qu'y a-t-il ?

     — Moa toa manque.

     Celtica fronça les sourcils. Ce nouvel exercice mental pour reconstituer du sens accentuait sa migraine. Il abandonna et admira la silhouette de la jeune femme. Comme toutes les Sorcières, elle était longiligne, un peu anguleuse, sa musculature peu développée. Les rondeurs féminines se faisaient aussi moins prononcées que chez les Humaines.

     La Sorcière sautilla vers lui et s'agenouilla. Avec un large sourire, elle posa les mains sur son genou, Celtica frissonna. Son cœur et son souffle s'accélérèrent. Fûrrin était vraiment désirable. La lumière ornait sa peau rougeâtre de sublimes reflets de bronze. Ses prunelles brillaient de douceur et de malice. Sa vitalité lui rappelait quelqu'un, mais qui ? Elle tendit les mains et s'empara de son visage, puis colla son front contre le sien. Peau contre peau, Celtica ferma les yeux et savoura le contact tiède et suave. Il répondit par une caresse sur sa joue, mu par ses pulsions.

     — Toa sen ? Moa, toa, parèye. Toa mon kin'ran'i. Toa Moa tré bocou aime toa.

     Celtica cessa de respirer.

     Fūrrin déposa ses lèvres sur les siennes.

     Un éclair fendit son âme.

     La déception parasita le cœur du Brasien. Un voile sombre et glacial tomba sur le monde. Elle caressa doucement sa joue, son cou, son torse. Il ne lui rendit aucun signe d'affection. Froid, il la laissa explorer sa peau, incapable de la repousser. La magie œuvrait.

     La cruelle évidence transforma le désir naissant en une terrible amertume.

     Il n'y avait pas d'amour. Juste l'instinct. Mais cela ne lui suffisait pas. Ce ne serait jamais suffisant. Son corps pouvait toujours lui faire croire le contraire, mais sa tête le rejetait en bloc.

     Sans céder à la panique, il chercha à détacher l'influence de la jeune femme sur sa ligne. Un travail inextricable, à cause de son inexpérience. Son sang bouillait, sa chair réagissait, mais son cœur se vidait. Il n'y régnait que la tristesse. Bon sang, pourquoi ? En toute franchise, il l'aimait bien, Fūrrin. Elle était séduisante et intelligente. Pourquoi ne pouvait-il pas jouir de ce qu'elle lui offrait ?

     Une image et un éclat de voix, troubles mais impérieux, s'imposaient dans son esprit

     La Sorcière délaissa ses lèvres et l'embrassa dans le cou. Des frissons se répandirent dans son corps, sans le plaisir dans leur sillage. Il aurait dû ressentir quelque chose, un minimum d'intérêt, au moins ! Mais rien. Pas de délicieux troubles, ni d'espoirs d'aucune sorte.

     Elle glissa ses mains jusqu'à sa ceinture et commença à la déboucler. Vif, Celtica lui saisit les poignets.

     — Non, finit-il par articuler. Arrête, Fūrrin.

Le Chant des Astres - Tome 1 : Le Verset du FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant