42 Les plaines du septentrion (1/3)

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     La clarté grise du petit matin lui chatouilla les paupières. Lovée dans les bras de son impérial amant, Cléon s'éveillait. Dans son dos battait le cœur de Celtica, sa respiration lente et profonde exerçait une pression régulière contre sa peau. Son bras la recouvrait et la tenait jalousement contre lui. Elle se délectait de la sécurité qu'elle y éprouvait. Tout à l'étroit qu'ils étaient, elle ne se souvenait pas d'avoir un jour aussi bien dormi. Elle se rendit compte avec une certaine honte qu'elle devrait retourner dans sa chambre au plus vite, pour ne pas aviver de soupçons. Celtica n'avait pas besoin de cela !

     S'arrachant de mauvaise grâce à la torpeur, elle se redressa et s'étonna des douleurs qui parcouraient son corps. Elle espérait que leur... bêtise ne l'empêcherait pas de marcher. Elle se tourna vers Celtica qui dormait à poings fermés. La bouche entrouverte, le visage détendu, il paraissait dépouillé de ses tourments. Si paisible, si vulnérable... Comme il était étrange de le découvrir aussi fragile, lui qui était destiné à régner sur un pays si grand qu'il en semblait infini ! L'homme qui serait bientôt le plus puissant du monde était allongé là, complètement nu, tout près d'elle. Et elle l'aimait, sans condition, sans limite.

     La poitrine gonflée d'une tendresse sans fin, elle écarta une mèche de son front et déposa à la place un léger baiser. Puis elle s'assit sur le lit, une couverture serrée contre elle. Elle ne put réprimer les frissons qui l'assaillirent. Il ne faisait pas froid dans la chambre, mais la moiteur du lit l'avait marquée. Elle s'étira et tenta de déterminer l'heure d'après le peu de lumière qui filtrait à travers les rideaux. Tôt, décida-t-elle. Suffisamment tôt pour que son absence reste inconnue à jamais, espérait-elle.

     Des doigts malicieux remontèrent le long de sa colonne vertébrale, elle sursauta et poussa un petit cri de surprise. À présent bien éveillé, Celtica la dévorait des yeux, un sourire taquin.

     — Bien dormi ? s'enquit-il, faussement innocent.

     — Voyons... Tu prends toute la place, tu m'as étreinte comme un vulgaire coussin, j'ai eu très chaud et très soif... Mais j'ai bien dormi.

      Sans crier gare, Celtica lança ses bras autour d'elle et la ramena dans le lit, l'embrassa dans le cou.

     — Tu comptais t'échapper ?

     — Il faut bien que je retourne avec Fédra et les autres. Et puis... il faut que j'avale une potion...

     Le prince la libéra et son sourire disparut. Inquiet il posa une main sur son front.

     — Je t'ai blessée ?

     Avec douceur, elle lui prit la main et y déposa ses lèvres.

     — Ce n'est rien, je vais bien.

     Espiègle, Celtica la tira à lui et l'emprisonna dans ses bras.

     — Tu sais, les autres peuvent encore attendre un peu...

     Jouant les offusquées par sa proposition à peine voilée, Cléon lui donna une petite tape sur l'épaule.

     — Pas avant que tu me le dises !

     — Dire quoi ?

     Désarçonnée, la jeune fille chercha un moyen de se faire comprendre. S'il ne le lui disait pas, cette nuit n'aurait aucune valeur ! Elle se persuadait que ses engagements ne la peinaient pas, mais elle ne pouvait se résoudre à faire une croix sur ces trois petits mots ! Puis le visage de Celtica s'illumina, comme s'il comprenait enfin.

Le Chant des Astres - Tome 1 : Le Verset du FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant