25 Toavec moa (1/4)

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     Celtica grimaça. Assis face à Arkh, il subissait ses assauts magiques à travers leurs doigts entrelacés, paume contre paume. Une vive douleur longeait ses os, continue et agressive. Elle lui tirait de cruelles larmes inextinguibles. Et comble du malheur, sa gorge paralysée refusait d'émettre le moindre cri salvateur !

     Depuis plus d'une heure, à présent, elle éprouvait ses résistances. La magie coulait en lui, tel un torrent furieux. Elle devait tout chambouler dans son pauvre corps, tant il souffrait !

     Torse nu, Celtica ne portait qu'un pantalon offert par ses hôtes. L'étoffe légère et ample aurait dû lui procurer une sensation de fraîcheur, mais là, son corps entier lui paraissait en feu ! Avec horreur, il voyait saillir sous sa propre peau son réseau veineux, se contracter ses muscles. Il n'était plus que douleur.

     Aljinan observait en silence le « traitement ». Il grignotait un fruit, concentré sur la tâche de son bourreau. Celtica lui jeta un regard mauvais. Il promit devant tous les dieux sa vengeance... S'il en sortait indemne. L'imberbe avait insisté pour rester, par intérêt « scientifique », mais le prince le soupçonnait d'assouvir sa perversité.

     Face à lui, les lèvres d'Arkh remuaient, enfilaient les syllabes silencieuses, tel un véritable collier de perles. Ses yeux surnaturels le fixaient sans ciller, sans cligner. Même s'il voyait au quotidien ce regard, il ne s'habituait ni à leur couleur, ni à cette lueur qui se mouvait comme si elle possédait une conscience propre. Légèrement luminescents, ils renvoyaient sur la peau brunâtre de l'Ancienne les reflets mystiques d'un autre monde.

     Son calvaire s'accentua soudain, le torrent accéléra. Cette-fois ci, la magie lui montait à la tête, il pouvait sentir ses tempes battre tambour. En revanche, il ne percevait plus ses larmes sur ses joues engourdies. La sueur le recouvrait comme s'il s'agissait de la pluie, la moiteur étouffante s'amusait à le priver d'un air précieux et vital. Son parfum se renforçait, chauffé par sa peau brûlante. Il en eut le tournis.

     Et ce fut la libération.

     Arkh le lâcha, il s'écroula sur le côté, haletant, confus. Il ferma les yeux, ignora la voix d'Aljinan. Il comprit qu'il s'adressait à lui, mais il ne voulait répondre. En fait, il en était bien incapable. Une trombe d'eau s'abattit sur lui, il poussa un cri de surprise et se redressa.

     — Bien, tu vas p't-être arrêter de bouder, maint'nant ! lança l'imberbe, fier de lui. Comment tu t'sens ?

     — Mal...

     Sa tête tournait et son estomac se tordait.

     — Ca ira mieux dans quelques instants, assura l'Ancienne. J'ai réussi à créer une connexion avec votre ligne, elle est à présent pleinement active.

     — Pourquoi cela m'a-t-il fait si mal ?

     Arkh ne répondit pas tout de suite et lui donna une outre d'eau. Elle exigea qu'il la boive entièrement. Le liquide, étrange et suave, glissa dans sa gorge, puis se répandit dans son corps, déposa un baume apaisant sur les dégâts de cette connexion. Sa température s'abaissait petit à petit, la touffeur ambiante s'amenuisait.

     — Essayez donc de produire une flammèche, l'incita-t-elle quand il eut fini.

     Celtica hésita. La première fois qu'il avait essayé ici, il s'était retrouvé paralysé, incapable de parler ou de bouger. Comme tout à l'heure. Arkh pencha la tête sur la gauche, il comprenait à présent ce geste. « Vas-y » lui disait-elle. Incertain, le jeune homme fit rouler ses épaules, chassa l'engourdissement de ses membres et concentra son énergie au creux de son être. Cela ne prit pas une seconde, et aussitôt qu'il la relâcha, une gerbe de feu crépitante jaillit de sa paume. Il sursauta et faillit incendier les grands arbres alentours ! L'Ancienne, sans craindre de se brûler, renferma sa main sur la sienne et condamna le flux. Un rire tonitruant et incongru éclata dans les fourrés. Cerbère se payait sa tête !

Le Chant des Astres - Tome 1 : Le Verset du FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant