21 Arkh'rrèn Di'yendèr (3/3)

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     — Il faudra que tu dormes dans une krièn't, continua Arkh. En ce moment, le Nâèm Nyara'ndr'â crache sa colère jusqu'à trois fois par jour.

     Aljinan ouvrit grand les yeux. Jamais le volcan qui surplombait l'île ne s'était montré aussi actif. Décidément, les choses s'aggravaient de jour en jour.

     — Tu peux pas simplement enchanter mon vaisseau ? Ce serait beaucoup, beaucoup plus...

     — Dangereux, termina la tête aux yeux bleus. Tu n'es qu'un simple Humain. C'est déjà risqué pour un Sorcier, alors toi...

     — Cerbère a raison. Tu ne veux pas partager la krièn't avec le prince ?

     Aljinan se passa une main sur le crâne, couvert de sueur. Partager la cabane avec Celtica ne lui disait rien, mais il devait bien se ranger à leur avis. En matière de sécurité, il leur faisait une confiance aveugle.

     Le Nâèm Nyara'ndr'â, qui donnait son nom à l'île, n'était pas à prendre à la légère. Il ne crachait ni fumée, ni feu, mais des vagues d'énergie, celle-là même qui rendait la magie possible. « Nâèm » pouvait se traduire par « puits », mais Aljinan lui préférait le terme de « pompe ». Ce volcan traversait les dimensions, plongeant ses racines dans les tréfonds des royaumes de Mérénos et levait la tête haut dans le ciel de la sphère mortelle. Il puisait ainsi l'énergie dans le monde des morts et la redistribuait dans le monde des vivants. Sans lui, plus de Sorciers, et encore moins d'Anciens. Ou de dieux.

     Il était sans doute l'une des raisons pour lesquelles Arkh voulait rencontrer le petit prince. Nâèm Nyara'ndr'â était, de par sa nature, directement lié au Chant, et Aljinan ne pouvait qu'imaginer par quels troubles passait cette immense créature, presque aussi sacrée que le dieu des Anciens, Yimasii. Les Nâèmois le considéraient comme un membre de leur petite communauté, un ami, un frère. Aljinan le comprenait, Nâèm Nyara'ndr'â était vivant. Il pouvait le sentir battre comme un cœur gigantesque. Boum. Boum. Boum. Il vivait ! Il le sentait, du plus profond de ses tripes ! Cette pulsation se répandait dans ses membres, impérieuse, vibrante. Ce qui indiquait que les espoirs étaient encore permis.

     — Va pour le partage de la kriè't !

     — Krièn't, corrigea la tête aux yeux jaunes.

     — J'espère qu'il supportera tes ronflements, raillèrent les yeux rouges.

     Aljinan lui décocha un regard noir. Pourquoi fallait-il que ce cabot ait le don de parole ? Et Arkh qui ne disait rien ! L'imberbe se leva et vida son bol d'un trait.

     — Où est-ce que tu vas ? demanda calmement l'Ancienne.

     — Déménager quelques affaires du Chaos, et dormir un peu avant qu'tu m'assommes.

     Elle eut un sourire amusé. Le même qu'il y avait quinze ans.

     — Alors dépêche-toi ! Profite de ton séjour pour te reposer, le Chant n'est pas encore irréversible.

     Aljinan la dévisagea. Au fond de ses yeux extraordinaires s'étendait une infinie sagesse, qui ne manquait jamais de l'épater. Les Anciens étaient des créatures dignes de confiance et d'attention. Il lui avait juré de les protéger, et par tous les dieux, il tiendrait parole ! Le monde ignorait à quel point ce peuple restait vital.

     — Tu sais où se trouve Ironie ?

     — Et je sais même où se trouve ton fils. Et quels crimes il a commis.

Le Chant des Astres - Tome 1 : Le Verset du FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant