Chapitre 142 : Le banc sous la neige

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« Le cœur humain ne peut contenir qu'une certaine quantité de désespoir. Quand l'éponge est imbibée, la mer peut passer dessus sans y faire entrer une larme de plus. », Victor Hugo.

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« Madem... [...] vous m'entendez ? »

Un bruit éreintant bourdonne dans mes oreilles, j'ai les sens complètement endoloris. Une légère odeur arrive à mes narines, un mix étrange entre du parfum masculin et une émanation aseptisée. Mais dès que j'essaye de me concentrer dessus, pour revenir à la réalité, je me sens retomber dans un gouffre sans fond. J'ai tantôt du mal à inspirer et tantôt du mal à expirer. Ma cage thoracique est comme bloquée, je suis incapable de me débattre pour me sortir de cet enfer, je suis incapable de parler pour répondre à la personne qui me demande si je l'entends. A chaque fois qu'elle me parle, que ses mots parviennent à mes oreilles, sa voix éclate en mille morceaux dans ma cervelle, je n'arrive pas à comprendre une seule phrase complète, je n'arrive plus à faire le lien entre l'endroit où je me trouve et comment j'y suis arrivée. Tout me fait défaut.

« Doct..[...] crois qu'elle bouge. » ajoute une voix plus féminine.

Qui bouge ? Moi ? Qu'est-ce qui se passe ? Je suis où ? Qui sont ces gens ?

Soudain, un goût singulier entre dans ma bouche. Un goût à la fois si repoussant et si mauvais que j'en ai la nausée. Mais en même temps, un goût si particulier, si reconnaissable avec cette légère odeur âcre et ferrailleuse que je suis certaine que ce n'est pas la première fois que je la sens. C'est alors qu'une bride de souvenir me revient. Je suis chez moi, je viens de me réveiller, il y a ce fameux goût repoussant dans ma bouche, je me lève soudainement de mon lit et je cours à toute vitesse vers les toilettes pour y vomir. J'arrive clairement à revoir la scène, la sensation épouvantable de mes poumons qui se compressent quand mon œsophage me brûle, mes innombrables larmes qui coulent en éprouvant la douleur, et finalement ce sentiment que quelque chose ne va pas, que je devrais en parler, que je ne devrais pas attendre que ça s'empire.

Je.. Que s'est-il passé à partir de ce moment là ? Pourquoi je ne m'en souviens pas ? Pourquoi je..

Puis, quelques secondes plus tard, j'ouvre les paupières de force. En entrant dans mes pupilles, la lumière perçante des allumages artificielles au dessus de ma tête me brûlent les rétines. Je vois flou, je suis éblouie, mes tympans s'assourdissent, j'ai du mal à ne pas gigoter, j'ai envie de crier pour qu'on me laisse tranquille. Seulement, au bout de quelques instants, ma vision s'adapte. La lumière qui m'empêchait de comprendre quoique ce soit paraît moins violente, les bruits environnants reviennent peu à peu, mes pulsations cardiaques se calment. C'est là qu'apparaissent deux personnes dans mon champ de vision, un homme et une femme, tous deux habillées d'une blouse blanche. En me voyant reprendre conscience, l'homme est le premier à s'approcher tout en vérifiant mes réflexes.

« Mademoiselle ? Est-ce vous m'entendez bien ? demande t-il d'un timbre de voix lent et apaisant.

-Oui.. ma voix déraille. Je.. Je vous entends bien.

-Bien. sourit t-il. Vous savez où vous êtes ?

Avec mes yeux, je balaye l'intégralité de la pièce où nous nous trouvons pendant que la femme, qui me regardait jusqu'à présent, s'affaire à sortir quelque chose d'un placard à ma droite.

-Je.. Je suis dans un hôpital.

-C'est exact. Et savez vous pourquoi vous êtes à l'hôpital ?

Je le dévisage longuement en inspirant par la bouche.

L'Ombre et la Lumière (Shoto fanfiction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant