Chapitre 133 : Réparer

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« Tomas se disait : coucher avec une femme et dormir avec elle, voilà deux passions non seulement différentes mais presque contradictoires. L'amour ne se manifeste pas par le désir de faire l'amour (ce désir s'applique à une innombrable multitude de femmes) mais par le désir du sommeil partagé (ce désir-là ne concerne qu'une seule femme). », extrait de L'insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera.

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Un peu après que Shoto m'ait déposé sur mon canapé et qu'il soit directement reparti chercher ses affaires, je végète sur mon sofa, sans but, avec à l'esprit Katsuki qui doit sûrement être dans tous ses états. Je l'imagine très bien hors de lui tandis que les médecins font de leur mieux pour l'aider et je m'en veux un peu de ne pas pouvoir être là quand il en a besoin, ne pas être capable de lui expliquer que je ne lui en veux pas. Et quand je me décide à allumer la télévision pour patienter, la main tenant la télécommande, je renonce à découvrir les actualités, tout en sachant que Yuei va encore une fois être en proie aux critiques des médias et que Katsuki, qui a agi bien contre son gré, sera tout autant châtié que le prestigieux lycée. Parce que s'il y a bien quelque chose qui est clairement incapable de changer ce sont les mentalités. J'ai beau dire à tout le monde que je m'en suis sortie, qu'aujourd'hui Justice fait partie du passé, la réalité c'est qu'au fond je suis rentrée dans la catégorie des rares personnes qui ont traversé les mailles du filet. Si je suis une héroïne, si je ne suis pas derrière les barreaux à l'instant t, c'est uniquement grâce à Tomura et le fait qu'il ait kidnappé Izuku en même temps que moi. Je pourrais presque dire que je remercie le ciel que Shigaraki soit autant un taré, et que toutes les blessures qu'il m'a infligées ne sont qu'un ticket de sortie pour la liberté tant espérée. J'aimerais cependant que ce soit la même chose pour Katchan, j'aimerais qu'il ne joue pas sa place de numéro trois pour des stupidités. Seulement, mon discours remontant à deux ans, le public a tout simplement oublié. Ca se passe toujours comme ça. Les gens sont choqués, émus, touchés de vos mots et puis après un certain temps, ils oublient, ils retournent à leurs petites vies, la catastrophe n'est plus qu'une simple histoire à raconter, ou, dans le pire des cas, une anecdote qui peut faire office de métaphore.

Tout en repensant pendant un certain moment à la dure réalité que l'agence du blond va affronter dans les prochaines semaines, je m'allonge entièrement sur le canapé, en grimaçant quand mes omoplates rencontrent les coussins qui traînaient là, pour sentir ma gorge se serrer d'épuisement. Je ferme alors les yeux, éprouvée par mes plaies et par ce sentiment d'impuissance que je dois tout simplement réprimer, et que je vais devoir partager avec mon meilleur ami jusqu'à ce un autre sujet fasse autant parler de lui. Je me laisse ainsi bordée par les bras de Morphée jusqu'à laisser entièrement le sommeil me guider.

Une sieste sans rêve après, je me fais réveiller par un bruit frémissant provenant de la cuisine. Ajouté à cela, je sens une légère odeur de porc fumé qui fait immédiatement saliver mes papilles desséchées. Je rouvre lentement les paupières pour remarquer la grande lumière de mon salon éteinte, tamisant les ombres de chacun de mes meubles. Ni une ni deux, je m'aide de mes bras pour me relever du canapé, tout en découvrant un plaid qui me recouvre. Les frétillements se font plus intenses et je relève la tête vers la cuisine, voyant que la lumière y est bien allumée là-bas, avec Shoto qui a tout l'air de nous préparer à manger. Je me mets à tousser une première fois, ce qui fait relever également la tête du héros dans ma direction. Quand il m'aperçoit, il semble légèrement soulagé et il ne tarde pas à lâcher ce qu'il avait dans la main pour contourner le demi mur, qui sépare ma cuisine de mon salon, afin de me retrouver.

« Tu as bien dormi ? sourit t-il.

A l'aide de mes bras, je me pousse à me mettre debout en toussant une deuxième fois, au passage.

L'Ombre et la Lumière (Shoto fanfiction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant