Chapitre 10: Les larmes du démon

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L'instant où la hache toucha la première marche, Bélial sentit une vive douleur au niveau de son ventre. Tyrian venait de fermer la distance qui les séparait en un instant, et avait porté le premier coup.

Propulsée par la puissance de l'attaque, elle glissa sur le sol sur plusieurs mètres. Alors qu'elle se redressait avec peine, elle sentit une ombre au dessus d'elle, mais elle n'eut pas le temps d'éviter le coup de pied plongeant qui l'écrasa par terre.

Elle ne comprenait pas comment elle en était arrivée là. Si elle ne tenait pas compte de l'abandon de son arme, Tyrian avait agi exactement comme elle l'avait prédit, mais sa vitesse et sa force méconnaissables l'avaient réduite à l'impuissance.

Il s'accroupit face à elle et la souleva de quelques centimètres en la tirant par les cheveux. Se délectant de la scène, il ne put s'empêcher de se moquer.

– Dire qu'avant, j'avais du respect pour le peu de force que tu as... soupira Tyrian qui semblait déçu. Comme les choses ont changé...

Il empoigna son crâne qu'il serra, lui arrachant un premier cri de douleur.

– Voilà ce que je voulais entendre ! se gaussa-t-il.

Il frappa alors le sol avec sa proie, la lâcha, se releva, et l'écrasa sous sa botte en riant comme un dément.

– Enfin à ta place, j'aime mieux ça ! Tu aurais moins souffert si tu...

Alors qu'il la croyait incapable de réagir, Bélial s'empara de la cheville qui se trouvait derrière sa tête d'une main. Avant qu'il n'ai eu le temps de se dégager, elle la serra de toutes ses forces, la brisant sans efforts. Tyrian grimaça en se laissant tomber sur son séant.
Devant lui, Bélial était à présent sur ses genoux, la respiration lourde. Elle était maintenant très faible, et pourtant son regard n'avait toujours pas perdu l'intensité qu'il avait au début du combat.
Son visage meurtri se couvrit d'énergie obscure, et certaines de ses blessures commençaient déjà à guérir.

– J'avais jamais compris comment tu faisais ça ! ricana Tyrian. Ta mère et toi êtes les seules capables d'utiliser l'énergie obscure pour vous soigner vous même ! Enfin, ça, c'était avant!

Choquée, Bélial vit Tyrian utiliser son propre pouvoir pour se soigner, chose dont il avait toujours été incapable, et réussit à soigner en une poignée de seconde une blessure qui aurait pris à Bélial au moins deux jours.

Il se leva et donna des coups dans le sol pour montrer qu'il ne bluffait pas.

– Bon, et maintenant...

Le corps de la mère de Bélial s'écrasa alors juste à côté de sa fille. Tétanisée, la jeune femme réalisa qu'elle était couverte de sang et qu'il lui manquai un bras.

– Je me lasse de ces petits jeux...

Les deux démons interrompirent leur combat pour fixer Saga qui analysait le membre qu'il venait d'arracher. Puis, n'y trouvant pas d'intérêt particulier, il le jeta par dessus son épaule. Il frappa ensuite dans ses mains et s'adressa à l'assemblée comme si celle ci était constitué de jeunes enfants.

– Ce n'est pas tout ça, mais j'ai encore beaucoup de choses à faire ! Tant de détails à régler avant l'opération de Qalb Alsahra dans trois mois ! Je n'ai vraiment pas le temps de m'amuser avec vous !

Saga concentra une grande quantité de magie devant lui. Tyrian décida de se déplacer derrière le mage pour sa propre sécurité. Une fois le sort prêt, Saga le lança sur les deux femmes.
Raya hurlait à Bélial de s'échapper, mais c'était en vain. Vidée de ses forces, Bélial ne put rien faire pour éviter ou se protéger de cette attaque qui allait à coup sûr l'achever.
Pleine de regrets, elle refusait encore d'accepter son sort, mais ne voyait pas d'issue. Elle ferma les yeux et attendit la fin, la boule au ventre.

La première chose qu'elle sentit fut inattendue. C'était comme si elle venait d'être couverte par une chaleur douce et apaisante qui lui était étrangement familière.

Elle se mit à sourire, ne pensant pas qu'elle se sentirait aussi réconfortée au moment de sa mort.
Puis, elle reçut une puissante onde magique qui vibra jusqu'au plus profond d'elle. Le choc la repoussa et elle se retrouva sur le dos. Elle souffrait atrocement, et se demandait quand cela cesserait enfin. Plusieurs secondes passèrent, et elle finit par comprendre qu'elle n'était pas morte. Elle ressentait cependant un poids sur elle.

Elle se décida enfin à entrouvrir un œil pour voir ce qui se passait. Elle regretta cette action jusqu'à la fin de ses jours.

Bélial vit d'abord le visage de sa mère, et crut un instant qu'elle avait réussi à les sauver toutes les deux. Mais elle réalisa bien vite que quelque chose n'allait pas. Pourquoi était elle sous sa mère qui gardait les yeux fermés ? Et pourquoi ne disait elle rien ?

– M'man ?

Pas de réponse. Sa mère semblait beaucoup trop paisible vu la situation. Bélial posa sa main sur son dos pour essayer de la réveiller et se figea. Elle venait de toucher une substance qu'elle connaissait bien, mais qu'elle ne voulait pas trouver à cet endroit. Horrifiée, elle tourna lentement sa main pour en examiner la paume.
Elle était rouge de sang.

– M'man !

Avec l'énergie du désespoir, elle se dégagea de sous sa mère et put enfin constater ce qui venait de se passer. Alors qu'elle avait baissé les bras, sa mère avait par un quelconque miracle réussi à rejoindre sa fille et à la protéger avec son corps.
Le sort avait déchiqueté la peau et les os de la femme, lacérant ainsi les organes exposés. La réalité s'imposait peu à peu dans la tête de la démone qui refusait de l'accepter.
Elle agrippa le corps sans vie et le secoua, comme si ça pourrait ramener sa mère.

– Allez M'man, arrête de me faire marcher... On en a pas encore fini avec ces deux là... on doit encore...

Bélial...

– Non ! beugla Bélial. Ça peut pas être vrai ! Elle est pas...

Je suis désolée...

Les mots simples mais pourtant lourds de sens de Raya furent le déclic qui tira Bélial de son état second. Les larmes qui commençaient déjà à se former au coin de ses yeux déferlèrent alors sans retenue. Elle frappa le sol et poussa un cri du plus profond de son âme.
Elle avait échoué sur toute la ligne.
Ayant regardé la scène avec beaucoup d'intérêt, Saga se mit alors à applaudir.

– Ah, l'amour d'une mère... Que c'est touchant, tant d'émotions... Bon ! La prochaine, c'est la bonne !

Saga se prépara à lancer un sort, mais il fut interrompu par Tyrian qui lui bloqua la voie avec son bras tendu.

– Ah ? Voudrais tu l'achever toi même ? Je ne suis pas contre si tu y tiens, mais essaye de...

– Non, j'ai une bien meilleure idée. Depuis que je la connais, cette peste a toujours tout fait pour être insupportable, et pourtant, tout le monde l'adorait ! Mon père voulait même faire d'elle le prochain chef du village !

Il tourna le dos à Bélial qui était prostrée sur le corps de sa mère et monta les marches.

– Alors d'accord, je m'incline ! annonça Tyrian. C'est toi le chef ! Je te souhaite bien du plaisir à régner sur les cadavres de ceux que t'as pas réussit à sauver ! Vis dans ce village vide, toute seule ! C'est tout ce que tu mérites pour avoir osé me tenir tête !

Saga attendit quelques secondes pour voir si l'un d'entre eux allait ajouter quelque chose, puis haussa les épaules.

– C'est toi qui vois... Je l'aurais bien prise avec moi pour accélérer un peu l'ouverture d'une porte, mais je préfère ne pas te froisser...

Les deux associés firent face au cristal et posèrent chacun une main dessus. Saga ferma les yeux et commença à incanter un sort.

– Au plaisir de ne jamais te revoir, sale peste !

Sur ces dernières paroles du démon, ils disparurent dans un éclair de lumière, laissant Bélial seule à pleurer la mort de sa mère.

Déicide - Volume 1 - Défier le destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant