Déicide - Volume 1 - Défier le destin

Chapitre 59: Tempérer son ardeur (Partie 1)

Sarian regrettait d'avoir accepté l'offre de la barbare.
Il avait d'abord cru que la laisser s'entraîner avec d'autres aventuriers pour qu'ils s'améliorent tous leur serait bénéfique, au moins pour évaluer la force de Bélial. Il avait juste espéré qu'elle retiendrait ses coups.

Il enjamba le troisième sacrifié qui gémissait au sol, et s'approcha de la jeune femme qui faisait signe à un homme en armure qui se demandait si s'assommer lui même lui épargnerait bien des tourments.

– Je ne voudrais pas critiquer vos méthodes... toussa Sarian en interpellant la démone. Cependant, j'ai besoin qu'au moins quelques un de mes hommes soient en état de tenir une épée quand nous passerons à l'action... Ou au moins marcher sans aide...

Bélial fronça les sourcils, disant qu'elle retenait ses coups.

– C'est comme ça que je faisais, quand j'aidai à l'entraînement des gamins de mon clan !

Tu veux parler des jeunes démons qui font presque la même taille qu'un adulte humain à douze ans ? Qui s'échauffent en se balançant des rochers à la gueule ? T'es sûre que c'est comparable ?

Bélial se retourna en entendant un fracas, voyant que l'on venait enfin de libérer la personne qu'elle avait encastré dans un mur un peu plus tôt. Elle se demanda alors si elle ne devait pas retenir un peu plus ses forces.

– Ce qui m'étonnes le plus, c'est que Sieg puisse t'envoyer au tapis quand tu es sérieuse... soupira la sang-mêlée qui dosait ses mixtures un peu plus loin en prévision du combat.

– Je reconnais qu'il est surprenant... acquiesça Sarian. Je me souviens encore de la fois où il est parvenu à blesser le dragon rubis avec une seule attaque... Ce coup lui avait coûté toute sa mana, mais il a réussi à créer une faille dans sa protection d'écailles qui nous a permis d'abattre le monstre ! Une attaque spectaculaire !

L'alchimiste se figea dans son travail. Elle jeta un coup d'œil vers la démone qui fronçait également les sourcils.

– Attendez... articula Farca. Vous êtes en train de me dire que Sieg a été capable de blesser un dragon rubis ? Si je me souviens bien, c'est un exploit digne d'un aventurier de rang huit ça, non ?

– Je sais que je n'y serais pas arrivé, en tout cas... Et je n'aurais jamais pu rivaliser avec sa vitesse ! Quand il bougeait, c'était comme si... comment dire...

– ... Comme s'il était aussi rapide que l'éclair ?

Bélial avait suggéré cela sans y penser, mais une fois qu'elle l'avait dis, elle réalisait le véritable sens de ses propres paroles.

– Et bien oui, maintenant que vous me le dîtes ! Je me souviens même avoir vu des étincelles autour de lui pendant un instant quand il s'arrêtait de bouger ! J'imagine que vous avez pu le voir en faire de même !

Les demoiselles échangèrent un regard lourd de sens. Elles expliquèrent à Sarian qu'il l'avait utilisé une seule fois, et que l'opération avait failli lui coûter la vie. L'aventurier reconnut ne pas comprendre, car il avait vu le bretteur maintenir une telle vitesse pendant une pleine minute sans en souffrir.

– Vous êtes sûres de ce que vous me dîtes ? Je ne comprends pas comment il pourrait moins bien maîtriser une technique qu'il maniait parfaitement il y a quelques années... Ce n'est pas comme si c'était du à son âge, il est encore bien jeune !

J'avoue que je me posais la question, depuis quelques temps... Quand il voyageait avec Alice, il ne semblait pas avoir de mal à utiliser cette technique...

La sang-mêlée repensa aux paroles d'Adam, quelques jours plus tôt. Était-il possible que Sieg ne pouvait vraiment plus utiliser toutes ses capacités ? Mais pour quelle raison ?
Farca se demandait s'il n'aurait pas abusé de la technique qui l'avait laissé dans un état déplorable dans le laboratoire, en fuyant le Ragrar, mais quelque chose lui disait qu'il lui manquait encore une information capitale.

Bélial, quand à elle, préférait partager ses pensées à haute voix.

– Mais il lui arrivé quoi, depuis ? S'il est vraiment aussi balèze, il aurait du battre le machin noir du labo sans notre aide, non ? J'comprends pas ce...

La barbare fut interrompue par le gardien qui se frayait un passage à travers la foule, suivi de Linda et une femme tremblante de peur.

– Nous Avons Un Problème ! Un De Vos Espions Est Revenu Avec De Graves Nouvelles !

Pour changer nos habitudes...

Sarian observa la messagère, la reconnaissant immédiatement. Il lui demanda de se calmer pour leur faire un rapport.

La femme semblait terrifiée, regardant chaque recoin de la salle avec appréhension, comme si elle s'attendait à voir une horreur se jeter sur elle à tout moment. Farca fouilla dans son sac, et lui demanda de respirer les vapeurs d'une potion. La messagère s'exécuta, et se détendit vite.

– Désolée... Mais si vous aviez vu la même chose que moi... Un fantôme rôde dans la résidence du comte...

– Un fantôme ! Ne me dîtes pas que vous avez risqué de briser votre couverture pour des histoires à dormir debout ! s'indigna Sarian sans cacher sa colère. N'allez pas répéter de telles âneries aux autres, nous n'avons pas besoin...

-Je sais ce que j'ai vu ! insista la messagère. Je n'ai jamais cru aux fantômes, mais quand j'ai vu ce spectre apparaître de nul part et malmener facilement l'elfe borgne...

Sarian se tut. Il pensait qu'elle n'avait qu'entendu une rumeur, ou au pire simplement pris peur en voyant quelque chose qu'elle n'avait pas su interpréter rationnellement. Mais la messagère décrivait une scène dont elle donnait des détails de plus en plus précis. Linda coupa le débit de parole de la messagère en posant sa main sur son épaule.

– Je connais Uniali depuis que nous étions enfants... expliqua-t-elle. Elle a toujours eu la tête sur les épaules, et fais preuve de raison plus que quiconque que je connais. C'est pour ça que j'ai recommandé de l'employer en tant qu'espionne, elle ne ferait rien de stupide qui risquerait sa mission ou sa vie. Si elle dit qu'il y a un fantôme dans la résidence, je la crois sur parole.

Farca avait écouté l'échange en se frottant le menton, et décida d'intervenir.

– Vous savez, je suis une femme de science... Je penses rationnellement...

– Je viens de dire... s'énerva Linda.

– Et c'est pour ça que vous pouvez me croire quand je vous dis que je sais pertinemment bien que les fantômes existent...

Linda s'arrêta, ne s'étant pas attendu à ce développement. Farca continua, expliquant que ses recherches l'avaient menée à des endroits peu recommandables où elle avait vu des choses qui avaient remis en cause toutes ses connaissances du réel et l'irréel.

J'en suis un parfait exemple...

– Et la plupart de ces esprits sont des vraies saloperies ! Ils aiment tourmenter les vivants, et adorent détruire leurs vies pour leur propre plaisir ! Ils prennent leur pied en prenant possession des gens et...

Farca s'immobilisa, une folle pensée venant de traverser son esprit. Elle se tourna vers Sarian qui eut la même illumination qu'elle.

– C'est pour ça que le comte s'est rallié aux pirates... souffla-t-il sans oser y croire. Nous n'avions jamais compris pourquoi il avait soudainement tourné le dos à tout ses principes... Quand il a rencontré ces vauriens le premier jour, il s'est fait posséder !

– Oui... Tout comme il compte posséder ce prisonnier, quand il aura fait enlever les sceaux qui le protègent...