Chapitre 83:Comprendre son adversaire (Partie 2)

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– Si vous avez raison, le temps nous est compté... soupira Fazar. Que Saga veuille juste prendre le pays ne dérange pas les kramars, nous ne le servirions pas de toute façon. Mais s'il est assez inconscient pour jouer avec des pouvoirs incommensurables... Il n'y aurait pas un seul recoin de ce monde qui pourrait lui échapper. Il pourrait asseoir sa domination sur chaque grain de sable du désert, notre territoire. Si nous voulons continuer d'exister, il doit être arrêté immédiatement !

– Heureux de voir que nous sommes sur la même page, acquiesça Sieg. Chaque seconde compte si nous...

– Y a un truc que vous pas avez pas pigé... grommela la sang-mêlée.

Tout les regards se posèrent sur Farca qui faisait les cent pas en se tenant le menton, tête baissée. Elle réalisa qu'on la fixait et exposa ses pensées.

– Saga a dit que son plan pour Taouy serait dans... Quoi, six semaines ? Mais ça fait déjà un moment qu'il est là et qu'il contrôle une des deux armées ! S'il sait pas encore où est la porte de Taouy, je pourrais le comprendre... Par contre, ça implique un autre truc...

– Il ne connaît peut-être pas l'emplacement exact de chaque porte... reconnut Sieg. Il est possible qu'il profite de sa position actuelle auprès de la famille royale pour faire des recherches, non seulement au sujet de la porte locale, mais aussi les autres... Taouy garde précieusement de nombreux textes anciens qui traitent de divers sujets... Il pense peut-être y trouver un ouvrage qui lui indiquerait où sont toutes les portes... Ou qui lui donneraient au moins des indices...

– Tu as raison, mais t'as pas capté les deux trucs les plus importants qui sont impliquées ici...

Sieg se dévisagea Farca sans comprendre, ce qui agaça l'alchimiste.

– Alors d'abord, pourquoi il se limite à trois mois ? Avant d'arriver ici, il s'était imposé cette limite, mais pourquoi ? Est ce que le temps lui est compté ? Si c'est le cas, je ne vois que deux raisons... Soit il est en train de mourir et que c'est pour bientôt, mais avec le...

Farca jeta un rapide coup d'œil à Fazar, s'étant souvenu à temps qu'ils étaient écoutés et changea son texte.

– ... tu sais quoi que t'as toi même utilisé, ça devrait pas être un problème. Par contre...

– Si, contrairement à ce que je pensais, il n'a pas accès à une quantité illimitée de nous savons quoi, mais qu'il a juste une large réserve de ce pouvoir, il essaye peut-être d'accomplir son but avant d'en être à court... conclut Sieg. Et même si je ne pense pas qu'il en a utilisé autant que moi durant ces cinq dernières années, il est possible qu'il cherche à en économiser un maximum pour son projet final. S'il veut déployer la puissance des Déchus, il aura bien besoin de ça pour la garder sous son contrôle...

Fazar haussa un sourcil, comprenant très bien qu'on lui cachait délibérément quelque chose, mais qu'on ne le lui révélerait pas facilement.

– Si c'est vrai, ce serait une bonne nouvelle pour nous, développa Farca. Parce que dans ce cas là, il n'utilisera pas toute sa puissance contre nous. Le vrai problème, c'est l'autre point que tu as loupé...

Sieg fronça les sourcils, ne voyant pas où la naine voulait en venir. Bélial eut une illumination, une idée inquiétante qui la fit trembler de rage.

– Si ce connard trouve ce qu'il cherche plus tôt que prévu... Qu'est ce qui va l'empêcher d'ouvrir la porte en avance ?

La question secoua Sieg et Fazar, l'annonce que le temps leur était peut être plus compté qu'ils ne le pensaient impliquant que le cataclysme qu'ils redoutaient pouvait leur tomber dessus à tout moment. Chaque seconde était vitale.

L'ancien abandonna le groupe et se dirigea vers le campement.

– Je vais ordonner la lever du camps immédiatement ! Quand votre ami nous aura rejoins, nous nous remettrons en route ! Le temps n'est pas à l'hésitation !

Sieg ne trouva pas la force de bouger. Il avait passé toute sa vie à courir après son grand frère, d'abord par admiration, puis par devoir. Et maintenant qu'il était si proche, si proche, de le rattraper, il apprenait que ce dernier pouvait se volatiliser en un instant. Même s'il avait des pistes concernant ses prochaines cibles, combien de temps faudra-t-il au groupe pour s'y rendre ? Deux mois ? Plus ? Si Saga savait exactement où trouver les prochaines portes ou qu'il en avait une idée claire, il disparaîtrait bien avant qu'ils ne le rattrapent. Encore...

Il avait beau réfléchir à une solution, l'écarlate avait l'impression que le mage aurait toujours une longueur d'avance sur lui, le narguant de son air supérieur. Il venait même à douter de ses chances de pouvoir lui tenir tête s'il réussissait à le trouver.

– Dis, tu penses que Tyrian sera avec lui ?

Sieg cligna des yeux. Il fixa la démone qui se tenait devant lui, masquant mal sa propre inquiétude.

– J'y ai pas mal réfléchi, quand on était sur le bateau... avoua-t-elle. Saga avait des gars qui travaillaient pour lui sans qu'il soit là... Alors... P'têt qu'il a envoyé Tyrian ailleurs... Et dans ce cas, faudra qu'on le trouve... Et puis, j'pense que tu veux demander à ton frère ce qu'il a fait avec les âmes de tes vieux potes... Enfin, potes...

Pas facile de les voir comme tels, c'est sûr...

Réalisant qu'il en avait oublié de se demander ce que Saga comptait faire des âmes des autres Sauveurs, Sieg réalisa que sa partenaire avait partagé les mêmes craintes concernant le seul autre démon encore en vie dans le monde de Lumière. Il avait gardé pour lui cette pensée pour protéger la barbare de celle-ci, mais il n'avait au final que laissé celle qu'il aimait se torturer avec cette incertitude. S'il avait abordé le sujet avec elle, il aurait pu la réconforter bien plus tôt.

Il lui prit les mains et les embrassa avant de lui sourire.

– On les trouvera tout les deux, je te le promets... Si Tyrian n'est pas avec Saga, nous n'aurons qu'à le retrouver... Et si mon frère ne veut pas nous dire où il est, il nous suffira de localiser les autres portes. Je suis prêt à parier qu'il y aura envoyé pour préparer le terrain. Ce ne sera qu'une question de temps avant qu'on le retrouve.

Bélial libéra ses mains pour prendre Sieg dans ses bras. Ses paroles la rassuraient, mais elle avait besoin de le sentir près d'elle pour apaiser sa conscience. L'écarlate le comprit très bien et lui rendit le geste, lui frottant le dos pour l'apaiser.

Farca leva les yeux au ciel et se détourna. Comme elle le redoutait, elle devenait déjà la cinquième roue du carrosse.

Déicide - Volume 1 - Défier le destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant