B. La proposition

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À peine sortit de la cryocellule, le sergent Mash fut redressé sans ménagement par deux gardiens. Un troisième se plaça derrière lui, matraque électrique au poing.

Cette démonstration de force n'était pourtant pas nécessaire vu le piteux état du prisonnier. Le teint blafard à cause des produits qu'on lui avait injecté pour supporter la cryogénie, il peinait à se tenir debout seul. La manche de sa combinaison orange était enroulée jusqu'à l'épaule là où aurait dut se trouver son bras mécanique, et son œil bionique était remplacé par un trou béant. En revanche la prothèse de métal qui couvrait la moitié de son crane était bien à sa place, sans doute parce qu'on aurait pas pu la lui retirer sans le tuer.


Varig sentit une bouffée de culpabilité remonter dans sa gorge à ce spectacle, qu'il camoufla du mieux qu'il pouvait sous un masque d'inflexibilité. Il se trouvait à moins de deux mètres de son ancien chef et ne pouvait pas se permettre que ce dernier lise de la faiblesse sur son visage.


-Combien... De temps? articula péniblement le prisonnier d'une voix éraillée.

-Environ six mois, répondit son interlocuteur. Vous pouvez tenir debout seul?


Le soldat planta ses yeux dans les siens. Malgré sa faiblesse physique évidente son regard restait empreint de détermination.


-Je peux essayer, lâcha-t-il.


Varig fit un signe aux gardiens qui hésitèrent quelques instants avant de s'écarter.

Un silence pesant s'installa.


-Joli uniforme, lança finalement Mash.

-Merci, navré de ne pas pouvoir vous retourner le compliment. Dites moi sergent, ça vous dirait d'échanger ce pyjama contre une tenue de combat dernière génération avec vos galons dessus?


Pour la première fois depuis qu'il avait fait sa connaissance près de deux ans plus tôt, Mash sembla déstabilisé.


-C'est une blague? demanda-t-il finalement.

-Au contraire. Je suis très sérieux. L'Empire a besoin de vous.


Le sergent serra le poing, tentant manifestement de maîtriser les émotions contradictoires qui l'agitaient.


-Je sais pas ce qui t'es arrivé après la station Charon, lâcha-t-il enfin. Je sais même pas si t'es encore le type que j'ai connu ou juste le pantin de cette chose qu'on a trouvé là-bas. Mais moi j'ai changé... Carlsson nous a fait arrêter et accuser de haute trahison. La cour martiale m'a collé dans cette saloperie de frigo avec mes hommes pour avoir voulu protéger l'Empire! Alors tu crois vraiment que tu peux te pointer le bouche en cœur comme ça et me faire le coup du putain de recruteur patriote?!


Le gardien derrière lui activa sa matraque électrique dans un vrombissement agressif et le saisit fermement par l'épaule. Sans prévenir, le sergent lui expédia son unique coude en plein nez. L'homme trébucha et s'étala sur le sol avec un cri de douleur, le visage en sang. Les autres gardiens dégainèrent aussitôt leurs propres matraques, prêts à se jeter sur le fautif.


-Assez! tonna Varig. Reculez, tous.


La Dernière Étoile - Tome 1: AscensionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant