J. Requiem - seconde partie

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Après avoir donné les ordres qui ne pouvaient pas attendre, Varig s'offrit quelques heures d'un sommeil agité. À son réveil, il prit une douche rapide et s'habilla d'un uniforme propre. Tandis qu'il achevait de boutonner la veste, ses mains se figèrent. Il regarda son reflet, cherchant à lire sur son propre visage ce qu'il ressentait.

En vain. Ses traits ne reflétaient ni tristesse, ni aucune émotion d'ailleurs. Ses yeux rouges le fixaient froidement.


Incapable de supporter cette vision, il abattit soudain son poing sur le miroir, le fissurant dans un craquement sinistre.


-Merde, lâcha-t-il à voix basse en appuyant son front contre le verre froid. Merde.


Il se sentait vide. Terriblement vide, et seul.

Mais ce n'était pas le cas; il remarqua soudain une silhouette familière dans le miroir fracassé, assise sur son lit.


-Qu'est-ce que tu fais là? demanda-t-il avec une colère contenue.


Le chevalier se tourna vers elle, et elle lui rendit son regard sans ciller. Ses yeux étaient rouges, comme les siens. Il serra les poings.


-Alors? Tu as perdu ta langue? insista-t-il.

-Ce n'est pas contre moi que tu devrais diriger ta colère, répondit-elle avec une patience inattendue. Je veux t'aider.

-M'aider? Comme quand tu m'avais prévenu sur Aurélia que j'étais trop proche de mes hommes, lâcha amèrement Varig. Tu sais quoi? Tu avais raison. Cette mission est un désastre, J est mort pour rien. Je ne suis pas fait pour commander.


L'Inquisiteur se leva. Elle était aussi grande que lui, avec une musculature inhabituelle pour une femme. Sa carrure contrastait avec la finesse de son visage, encadrée par ses cheveux blonds.


-J a choisit de mourir pour vous sauver la vie, corrigea-t-elle. Il n'est pas mort pour rien; et grâce à son sacrifice je commence à comprendre ce que les sentiments qui vous lient peuvent apporter.


Varig eut un rire sans joie.


-Tu ne comprends décidément pas grand chose. Je me fiche que ce soit utile; je ne veux pas... Je ne peux pas en perdre un autre.

-Vous êtes des soldats, remarqua Appollyon. Les soldats meurent à la guerre; c'est leur destin. Garde les là où tu peux les protéger.

-Je n'ai pas protégé J, lâcha Varig.

-Tu as sauvé tous les autres. Nous l'avons fait.


Elle lui effleura doucement la joue.


-Et ton aide à un prix, se souvint soudain le chevalier. Une vie.


L'Inquisiteur se détourna et marcha jusqu'au mur projetant un paysage stellaire donnant l'illusion d'un hublot.


-Tu es encore trop faible pour me donner ce que tu m'as promis, lâcha-t-elle. Je le savais déjà sur Aurélia. Je vais t'aider à devenir plus fort pour que tu honore notre pacte un jour.

-J'imagine que je n'ai pas le choix.


Elle se tourna vers lui.


-Nos buts convergent. Je te guiderais, et grâce à ta force tu pourras protéger ce qui t'es cher. C'est un marché plus qu'honnête.


Varig aurait aimé trouver quelque chose à répliquer, mais le raisonnement de l'Inquisiteur était sans faille.


-Tu dois parler à la fille, ajouta Appollyon. Elle ne doit pas dire de ce qu'elle a vu de nous, à personne.

-Oui, je le ferais.


Elle se tourna à nouveau vers les étoiles.


-Crois le ou non, mais tout ce qui arrive dans cet univers répond à un plan. Un plan qui englobe chacun d'entre nous, de la poussière stellaire aux étoiles... La mort de ton ami était écrite, comme tout le reste.

-Je ne crois pas à vos dieux, lâcha Varig en s'approchant.

-Je sais. Pourtant tu parles à leur messager.


Le chevalier ouvrit la bouche pour répliquer, mais Appollyon avait disparu.

La Dernière Étoile - Tome 1: AscensionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant