Léga ~ Chapitre 1

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Un bâton entre les crocs, Utcha accouru en direction de sa petite maîtresse. Lega éclata d'un rire cristallin lorsque son gros labrador se mit à sautiller autour d'elle. In fine, la chienne couleur crème déposa son trophée aux pieds chaussées de petites sandales dorées de la fillette.

Cette dernière baissa les yeux vers ses orteils, dont l'un était décoré d'une minuscule cicatrice ovale qu'une vilaine chute en vélo lui avait causé il y a de cela déjà quelques années.

S'apprêtant à ramasser le cadeau du canidé, une voix tonitruante les fit brusquement sursauter :

-    NON ! ordonna la mégère vêtue d'un tablier qui avançait vers eux à grands pas.

Avec appréhension, Léga observa les jambons celluliteux avaler à grandes enjambées la distance qui les séparait.

-    Je t'ai déjà dit de pas toucher à ça ! siffla-t-elle à la petite sur un ton irrité.

Par ça, elle entendait toute trouvaille que son toutou lui apportait : jouet perdu au fin fond de l'immense domaine de son père, amas de feuilles mortes collés, et – c'étaient ses trésors préférés – surtout des bâtons.

Comme aujourd'hui.

La gouvernante plantureuse posa ses mains aux doigts courts et boudinés – qui faisaient penser à Léga aux petits boudins blancs qu'aimait déguster son père régulièrement en début de repas – sur les épaules de la petite.

Après ça, toutes deux rejoignirent la cuisine, où la douceâtre odeur d'un gratin de pâtes surchargé de gruyère chatouilla agréablement les narines de Léga.

Le repas se passa calmement. Comme habituellement, la fillette mangeait seule, sa mère étant décédée en couches à sa naissance et son père, un industriel quasi toujours en déplacement, brillait par son absence. De même, la gouvernante ne mangeait jamais en même temps que la mominette : à la place, elle surveillait attentivement que la fillette mangeât correctement – proprement – et suffisamment.

Une fois repue, la gouvernante lui fit sa toilette avant de la coucher. Pour Marta, la nuit se déroula comme à l'accoutumée : une fois ses ingrates besognes faites, elle fit quelques extras puis dormit à poings fermés.

Au petit matin, elle poussa un cri de surprise en découvrant une scène des plus incompréhensibles. La petite, par sécurité, dormait toujours en ayant la porte de la chambre fermée à double-tour, cela dans le but d'éviter un potentiel enlèvement du fait de la fortune colossale que détenait son père.

Or, en ce matin ensoleillé de printemps, aucune petite fille aux boucles d'or ne demeurait dans le grand lit à baldaquin.

Malheureusement pour la bonne, le père de ladite petite fille, Vélès von Schneider, avait choisi ce jour pour retrouver le cocon familial.

-    Où est ma fille ? questionna-t-il sur un ton ferme.

La constance froide, l'homme fixait de ses yeux bleu clair la mégère dont le teint vira au rouge vif.

Tout en balbutiements, la grosse dame promis d'une petite voix aiguë à son maître que Léga devait a priori – si elle ne dormait pas dans son lit – être dans la salle-de-bains faire ses besoins.

Hélas, elle ne s'y trouvait pas plus qu'ailleurs. La pauvre femme remua le manoir de fond en comble sous les menaces du père de la fillette couplés à son regard assassin.

On dut se rendre à l'évidence.

Léga avait disparu.

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