- Que...
Kagel n'était pas en état de construire une phrase avec verbe, sujet et complément. Il s'étouffait sur son joli canapé en cuir capitonné, ses yeux perçants figés en une expression de stupeur en direction de sa belle-fille. L'homme n'était pas bête : il avait parfaitement compris que Déa les avait empoisonnés, lui et sa femme.Tout au fond de lui, il n'était pas surpris que ce jour arrive. La jeune femme avait beau avoir été élevée dans un foyer en apparence aimant et soudé, elle était bien assez intelligente pour se douter qu'un parent - et deux d'autant plus - tenant à elle ne l'auraient jamais manipulée de la sorte.
Impassible, ses beaux yeux noirs posés avec calme sur Kaël, elle mit alors la coupelle sur la table basse située entre eux deux, avant de se pencher, d'en prélever deux petits carrés dorés et de glisser ces derniers dans sa tasse fumante.
Tout en jetant un coup d'œil au cadavre de sa génitrice, Déa se rappela qu'il était temps de quitter cet appartement. Tandis que Kaël s'étouffait sur le canapé, l'orpheline avala son thé d'un trait, puis leur déroba leurs cartes bancaires avant de quitter définitivement les lieux. Au moment où elle refermait le logement à clé, son beau-père s'éteignit dans un long râle, les yeux grands ouverts tournés vers le plafond.
La jeune femme devait se dépêcher. Tout d'abord, elle monta dans le véhicule d'Axelle avant de se ruer à la banque. Là-bas, elle retira la totalité de son propre argent - idem pour sa complice - puis vida le plus possible les comptes de ses deux parents avant de jeter leurs cartes bancaires à la poubelle.
Après quoi, elles roulèrent deux heures jusqu'à l'aéroport, prirent deux billets sous de faux noms en direction d'une ville ni trop proche ni trop éloignée avant de s'envoler vers leur nouvelle vie.
Dans l'avion, ni l'une ni l'autre n'avala quoi que ce soit. Le stress coupait leur gourmandise, bien qu'a priori, les corps des deux proxénètes ne seraient pas recherchés avant le lendemain... Kagel serait attendu au club, on appellerait sur son téléphone portable, puis sur celui de sa belle-fille et enfin celui de sa femme, afin de savoir où le gérant et Aïsha pouvaient bien se trouver.
Quelqu'un ferait le lien avec l'absence de Rubis. Enfin, on préviendrait la police qui retrouverait alors leurs deux masses sans vie. De là, la traque commencerait. Heureusement, Déa comme Axelle étaient initialement des créatures de la nuit : seul leur mode de vie adapté de force à la société humaine les avait jusqu'ici - hormis avant de devenir danseuses - poussées à vivre le jour et dormir la nuit.
La bonne nouvelle était donc qu'elles pourraient enfin mener la vie qu'elles entendaient, et pourquoi pas trouver d'autres créatures de la même espèce que l'une ou que l'autre - ou les deux.
La mauvaise est que leur existence serait désormais rythmée - au moins pendant un temps - par la peur d'être retrouvée. Comme Kagel le disait lui-même, un vampire n'a rien à craindre d'un humain en face à face. Néanmoins, une fois endormi, attaqué avec une arme ou frappé par plusieurs humains, l'issue était moins prévisible même pour cette catégorie d'êtres.
VOUS LISEZ
Vantablack
HorreurVoici un recueil d'histoires d'horreur inspirées pour la majorité d'entre elles d'une légende urbaine, d'un fait divers ou bien d'un mythe.