- Søren ?
Même en répétant son nom plusieurs fois et de plus en plus fort, la petite fille ne le débusqua pas. S'approchant des buissons qui séparaient leurs deux maisons, elle ne distingua rien de plus vivant que les plants qui remuaient légèrement au gré du vent.Hedda frissonna. Par peur de réveiller sa mère, elle choisit de ne pas retourner dans la chambre de Daegan. À la place, et au lieu de les attendre, elle traversa le petit jardin d'entrée puis se dirigea vers celui de Goran Dahl. L'herbe de celui-ci aurait en effet bien eu besoin d'un coup de tondeuse...
La petite fille le traversa rapidement, jetant des regards de tous les côtés au fur-et-à mesure de sa progression. Arrivée tout au bout, elle tourna à gauche, puis en avançant encore quelques mètres, elle se retrouva nez-à-nez avec un petit portail en bois.
Hedda observa que le loquet avait été détaché. En temps normal, Goran le laissait constamment fermé, surtout l'hiver... Elle en conclut qu'en raison du froid, Søren avait préféré ne pas les attendre, elle et sa sœur. Par-dessus le portillon, la nuit l'empêchait presque de distinguer les marches étroites qui menaient à la cave.
Peu rassurée, elle ouvrit le petit portail doucement, par peur cette fois-ci de réveiller le père de Søren. Pour la même raison, elle se tut alors qu'elle aurait simplement pu appeler ce dernier et par la suite comprendre que quelque chose clochait.
Soudain, une pierre cogna contre le rempart de l'escalier. Le bois se fissura au moment où Hedda sursauta. Pour la première fois de la soirée, la petite fille réalisa que peut-être que celle qui avait frappé le volet de sa fenêtre n'avait pas été lancée par Søren.
La terreur la poussa sans réfléchir à courir tout le long des petits escaliers. Manquant de se rompre le cou, elle bondit puis trébucha avant de se retrouver pile en face de la porte de la cave. Heureusement pour elle celle-ci n'était pas fermée à clé. Hedda l'ouvrit brutalement, toute tremblante de froid et d'épouvante.
Au moment où elle la referma brutalement, elle aurait juré entendre le son grinçant du portillon se refermer.
La petite fille se mit soudain à hurler. Elle se retourna vers la pièce, à la recherche d'un objet suffisamment lourd pour empêcher la bête inconnue de la rejoindre.
Hedda finit par jeter son dévolu sur un fauteuil recouvert d'un tissu vert criard, qu'elle poussa contre l'entrée. Brusquement, elle se souvint que sa sœur - et peut-être son petit frère - allaient probablement eux aussi croiser le lanceur de pierres.
Paniquée, la petite fille se mit soudain à pleurer. Pendant une fraction de seconde, elle se dit que l'intrus était peut-être Søren, mais pourquoi donc ne l'aurait-il pas tout simplement appelée par son prénom ?
Sa sortie nocturne lui parut soudain bien stupide. Hedda se laissa tomber sur le long canapé recouvert d'un plaid tout doux, qu'elle humidifia rapidement de ses larmes. Tout à coup, ses pleurs cessèrent. Recroquevillée sur elle-même en position fœtale, elle se releva lentement et s'assit en tailleur.
La cave menait à la cuisine de la maison de Goran Dahl, Hedda s'en souvenait car l'été, lorsqu'elle s'y trouvait avec les trois autres, Søren multipliait les allers et retours pour leur apporter à manger...
Au moment où elle se remit sur pieds, une série de coups rapides et bruyants perça soudain ses tympans. Cette fois-ci, Hedda hurla pour de bon.
L'adrénaline la propulsa contre l'armoire remplie de livres plus ou moins moisis, derrière laquelle la petite fille croyait, à tort, qu'elle serait forcément à l'abri. De toute ses forces, elle écarta la bibliothèque qui coulissa doucement et laissa place à une cuisine toute blanche au mur carrelé couleur crème.
À l'instant où Hedda traversa la cave et mis les pieds dans l'autre pièce, elle entendit à quelques mètres de ses oreilles que le bois de la porte d'entrée de la cave venait tout juste d'être percé par les coups de poing violents de l'intrus.
La fille d'Yrsa réitéra ses cris de terreur, qui firent écho aux grognements qui n'avaient rien d'humain, poussés par ce qui avait par le passé été Rasmus.Des larmes de désespoir, d'horreur et de panique coulèrent le long de ses joues pâles. Tremblante des pieds à la tête, elle fit glisser dans l'autre sens - non sans mal - la bibliothèque de chêne. Priant intérieurement pour que la chose ne l'ait pas découverte, elle courut en direction du salon.
Là, à sa grande stupeur, elle tomba nez-à-nez face au père de Søren. Hedda se demanda sérieusement si tout cela était bien réel. Elle avait l'impression d'être entrée dans un monde cauchemardesque. Pinçant son avant-bras dépourvu de graisse - ou presque - elle pleura d'autant plus fort lorsqu'elle eut la certitude qu'il ne s'agissait pas là d'un rêve lucide.
Levant un sourcil inquisiteur, Goran Dahl pâlit devant le visage embué de larmes de sa petite voisine. Hedda semblait en pleine crise d'hystérie, criant et pleurant dans tous les sens.
- Qu'est-ce que...Posant sa tasse de café tiède sur la table basse en face de ses gros genoux, ses yeux gris agrandis par la terreur, il sut à cet instant ce qui avait mis Hedda dans cet état. La petite lui sauta dans les bras, à la recherche du réconfort d'une grande personne. L'homme lui tapota la tête, lui-même ne sachant pas vraiment comment se sortir de ce pétrin.
Søren avait perdu sa mère dans des circonstances à peu près similaires à celles qui avaient arrachées Rasmus à sa famille - à la différence près que Galla ne fumait pas...
Pendant que les yeux trempés d'Hedda humidifiaient son t-shirt, Goran réfléchissait soudain à grande vitesse.Tout à coup, on entendit au loin une porte s'ouvrir brutalement, puis le bruit d'une masse importante s'écraser au sol. La petite fille cria de manière encore plus aiguë, Goran se mit à trembler.
Quelques secondes plus tard, les coups reprirent, cette fois ci suivis du son plus léger mais plus proche de livres chutant d'une étagère.
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Vantablack
HorrorVoici un recueil d'histoires d'horreur inspirées pour la majorité d'entre elles d'une légende urbaine, d'un fait divers ou bien d'un mythe.