Encore une fois, Déa voulut savoir qui ils étaient, mais de nouveau son interlocuteur éluda la question.
« Tu le sauras en temps voulu » voilà ce que répondit Aura l'air énigmatique, avant de poursuivre son récit.
Suite à sa mort - elle lança un regard malicieux en l'évoquant comme si sa fille avait simplement ajouté du sel au lieu d'un morceau de sucre dans son café - Kaël s'était donc démené afin de trouver un moyen de la ramener.
Bien évidemment, il savait que ceci n'était qu'une formalité. Toutefois, sachant qu'il était impossible de ressusciter en retrouvant une nature déjà antérieurement connue, Kaël avait donc le choix entre faire de sa femme ou un mort-vivant, ou un fantôme, ou un vampire.
Déa interrogea sa génitrice quant aux autres abominations existantes - quid des ogres par exemple ? - mais là encore Aura escamota cette difficulté...
En conséquence, Kaël avait effectué le choix sensé de transformer sa femme en ce qu'elle était déjà, à un détail près. Après quoi, on avait invité avec vélocité l'un des semblables de Rubis afin d'effectuer cette procédure...
Bien que disposant maintenant de facultés bien différentes de celles des membres de sa famille, Aura se réjouissait de cette modification. En plus d'avoir mis fin à la sénescence opérée par son organisme, elle se voyait de plus pourvue d'une force et d'une acuité visuelle comme olfactive et gustative bien supérieure à la moyenne des êtres vivants, pishtacos compris.
Sur ce, Aura informa sa fille qu'aujourd'hui elle effectuerait l'une des rares activités parsemant sa monotone existence : du shopping, auquel elle était bien évidemment conviée à participer.
Après que sa fille ait décliné la proposition, la mère à l'apparence à peine plus dégradée que celle de sa progéniture se leva du canapé avant de se diriger vers sa salle-de-bains.
L'ex-femme de Jessen Massen se pomponna donc un certain temps avant de recroiser sa fille occupée à lire, toujours dans le salon.
Aura proposa une seconde fois à cette dernière de venir avec elle, ce que celle-ci déclina sans une once d'hésitation.
La mère de famille haussa les épaules avant de voleter jusqu'à la porte d'entrée du gigantesque appartement puis de s'en aller.
Au moment où sa génitrice commençait à dépenser l'argent qu'elle-même lui avait fait gagner, Déa entendit soudainement le carillonnement de la sonnette l'avertissant de la venue de quelqu'un d'extérieur à la maisonnée.
Posant son livre, la jeune femme poussa un soupir avant d'aller ouvrir à ce perturbateur.
Lorsqu'elle découvrit qui était cet imprévu, la danseuse exotique manqua de tomber dans les pommes.
Elle ne saurait dire si elle était heureuse ou énervée de la voir là, face à elle. Néanmoins, le fait est que devant ses yeux noirs, dans l'encadrement de la jolie porte couleur crème de ce bel appartement payé comptant par Kaël grâce à Aïsha et ses copines se tenait Dagmar, un sourire aux lèvres et bien droite dans un tailleur anthracite passé par-dessus l'enveloppe de Gabriella.
Le parasite lui demanda sur un ton impérieux de bien vouloir la laisser entrer, ce que, déboussolée, Déa accepta sans hésiter.
Suite à quoi, le gros pou s'affala sur les coussins poilus d'un blanc éclatant du canapé de Kaël, avant de sortir une fine aiguille de son sac à main Chanel.