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- Et ça s'est passé où exactement ? s'enquit Saga en proie à une forte curiosité morbide.
Effectivement, l'affaire commençait sérieusement à l'intéresser.
Une fille ayant pu devenir dans une vie alternative - celle où une ou un autre élève aurait libéré une place au sein de sa classe - l'une de ses camarades s'était fait faucher par un train...
La nouvelle habitante de Skien avait bien remarqué la différence de considération face à cet événement vis-à-vis de l'une et l'autre de ses deux meilleures copines.
Alors que Sigrid racontait les faits en partie mal à l'aise mais d'un air également excité en raison de l'effet que les mots qu'elle proférait provoquaient chez Saga, Ikka quant à elle paraissait... comment dire ? Terrorisée.
Comme si elle avait vu un fantôme.
- Elle s'appelait comment ? Entièrement ? les interrogea la curieuse.
Ikka lui répondit dans un souffle. Svea Asheim.
Depuis cet instant, la petite fille morte ne quitta plus l'esprit de Saga.
Alors que leur bus s'apprêtait à arriver et que le trio courut afin de ne pas le rater une seconde fois, qu'il s'engouffra peu de temps après dans le véhicule puis se remit à papoter de potins plus acceptables publiquement, la nouvelle gardait dans un coin de sa tête l'image abominable d'un corps de fillette coupé en deux, séparé entre deux voies de chemin de fer.
Étrangement, cette vision la révulsait autant qu'elle l'attirait.
Il fallait qu'elle la voit, cette ancienne scène de crime. Peut-être que des traces de son sang devenu sec depuis des mois maintenant était encore présent entre ces rails ?
Alors que le bus s'arrêtait devant la maison cossue de ses parents, Saga dit au revoir à ses copines avant de descendre du bus.
Tandis que les passagers de la machine roulante regardaient avec envie cette maison hors de prix achetée à crédit par sa mère capricieuse et son père soucieux des apparences, la fillette y pénétra puis déposa ses chaussures à l'entrée.
Comme d'habitude, c'est son chat Koukaki qui vint lui dire bonjour en premier.
Et probablement en dernier de toute la journée comme à l'accoutumée car ses parents, cadres supérieurs, ne disposaient pas de beaucoup de temps pour leur fille unique, d'où l'adoption de son félin afin de lui tenir compagnie durant ces très longues absences.
Bonne élève, Saga prit son goûter avant de s'atteler à ses devoirs.
Toutefois, alors qu'en temps normal, un ventre plein, son chat sur les genoux et quelques minutes de pause par-ci par-là suffisaient à assurer son efficacité, en cette fin d'après-midi force est de constater qu'elle était tout bonnement incapable de se concentrer.
Incapable de lire un simple énoncé de l'un des exercices qu'elle essayait pourtant de faire, Saga ne parvenait pas à chasser de son esprit la vision extraordinairement horrible du corps de cette inconnue tranché en deux, le bassin en bouillie, les jambes broyées, mais les bras, la tête et le torse eux intacts.
Les pieds aussi, chevilles comprises ainsi qu'une partie de ses tibias s'en étaient plutôt bien sortie.
