Pishtaco ~ Chapitre 8

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Goran Dahl posa un index court et épais sur ses lèvres fines surplombées d'une moustache naissante. À travers le rayon de lumière qui passait sous la porte du placard à balai, une ombre accompagnée de grognements venait de passer juste devant leur cachette.

Au moment où les livres étaient tombés, le père de Søren les avait précipités - lui et Hedda - dans le petit placard à balai situé dans un recoin de la cuisine. Serrés tous les deux contre l'un des côtés du ballon d'eau chaude, ils attendaient, tremblant et suant de terreur, que la chose quitte les lieux.

Heureusement pour eux, le flair de la bête semblait plutôt mauvais... Ils l'entendirent aller et venir, grogner à tout va et frapper ça et là comme si le bruit provoqué par les coups qu'il donnait aux meubles et au mur allaient les faire apparaître.

Soudain, la sonnette se fit entendre. Sa mélodie douce et agréable à l'oreille semblait incroyablement déplacée au vu de leur situation. Les bruits de pas, mi-traînants mi-marchants s'arrêtèrent tout net.

La chose sortit lentement de la pièce. Hedda, horrifiée ne put contenir un sonore gémissement de terreur. Car elle le savait : son frère et sa sœur étaient supposés la rejoindre.

Le bête émit un son guttural interrogateur, et Hedda parvint sans problème à imaginer une sorte de loup-garou au corps recouvert de poils longs et bruns, lever la tête au son qu'elle avait émis afin d'en localiser la provenance.

Brutalement, les mains épaisses de Goran Dahl se plaquèrent contre la bouche de la petite fille. Lui aussi craignait pour sa vie, en témoignait sa poigne toute tremblante.

Les quelques secondes suivantes furent les plus longues de leur vie. Lentement, ils perçurent avec horreur que les pas de la chose avaient repris. Le problème étant qu'ils avaient stoppé leur progression en direction de l'extérieur de la cuisine, pour revenir dans cette dernière.

Hedda se retint - non sans mal - de ne pas hurler d'effroi. La tâche fut d'autant plus ardue que l'intrus décida pour cette deuxième inspection non pas de taper partout mais de se coller aux murs et meubles afin de dénicher leur cache.

Les mains de Goran appuyèrent encore plus fort, devinrent légèrement glissantes sous le coup de la transpiration. Hedda avait à peine l'espace suffisant entre ses narines et l'extérieur pour respirer normalement.

Subitement, ce qui devait arriver arriva. La chose planta ses pieds puants tout contre le cagibi. Par chance, sa porte coulissante ressemblait à s'y méprendre à un mur très subtilement décollé du mur.

Une odeur nauséabonde envahit bientôt le petit espace quasiment plongé dans le noir. Hedda faillit être prise d'une quinte de toux quand Goran Dahl faillit lui s'évanouir.

À l'odeur pestilentielle qu'elle dégageait il reconnu immédiatement cette créature, celle-là même qui avait arraché les yeux noirs de jais de sa femme alors qu'elle était encore en vie, tout juste avant de les enfourner dans sa cavité buccale à l'émanation putride puis de les croquer la bouche grande ouverte sous les orbites creuses de Galla, juste avant que ces derniers ne reçurent en conséquence les postillons de sa dégustation.

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