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@ElG_Dreamland ~ Pinterest
Les semelles rouge sang suspendues aux pieds longs et fins de Déa claquaient doucement sur le sol lisse et brillant. Arrivée au bout du couloir, elle poussa la porte à double battants avant d'enchainer une séance de bisous sur des paires de joues déjà plus ou moins poudrées. Ici, tout le monde la connaissait sous le pseudonyme d'Aïsha Kandisha.
Bien qu'ayant la peau très claire, ses yeux d'un noir de jais et sa gigantesque chevelure brune aux boucles épaisses semaient le doute quant à ses véritables origines. Déa se dirigea vers son casier, qu'elle déverrouilla avant de cacher sa clé entre la plante de son pied droit et la semelle de sa toute nouvelle paire de Pleasers, qu'elle avait enfilé tout juste après avoir s'être libérée de ses Louboutin.
Levant la tête, la petite nordique balaya machinalement la pièce du regard. Là, une dizaine de corps à la poitrine siliconée, aux fesses galbées par le bistouri et aux traits faciaux injectés d'acide hyaluronique s'affairaient. Dans le retour du miroir, sa collègue Rubis lui adressa un petit sourire peinturluré de rouge à lèvres écarlate aux reflets irisés décoré de facettes toutes neuves.
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@SlizkoAiArtwork ~ Pinterest
Aïsha l'imita. Sa consœur à la chevelure lisse et teint en un rouge presque aussi flamboyant que le maquillage qu'elle portait aux lèvres avait rejoint le club il y a moins d'un an. À la base, elle avait postulé à ce poste de danseuse exotique sur un coup de tête.
Hélas, les factures accumulées par les charges de son petit appartement d'étudiante en licence de biologie avaient eu raison de ses ambitions initiales. Abandonnant l'université dans laquelle elle pensait acquérir les compétences pour devenir chercheuse en embryologie, la voilà vouée encore un certain nombre d'années à se trémousser en petite culotte sur une ribambelle de parfaits inconnus.
Une par une, les filles sortirent de la pièce, plus stressées qu'impatientes quant à la nuit qui les attendait. Pour faciliter leur tâche et les rendre bien dociles, les gentils clients leur offraient des verres plus ou moins forts tout au long de leur shift...
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Déa sortit la dernière. Volontairement. La favorite, presque la célébrité du strip club fermait la marche comme à l'accoutumée.
Voilà trois ans qu'elle travaillait ici. À l'instar de Rubis, elle avait démarré cette activité à l'âge d'à peine dix-huit ans. Et tout comme Rubis, l'appât du gain - l'argent rapide - avait supplanté son idée première de devenir notaire. Les clients commençaient déjà à s'installer, lorsque Déa, précédée de ses camarades, rejoignit les coulisses.
Toutes se voyaient perchées sur d'immenses talons aiguilles, et vêtues d'une robe si courte que, sans prendre en compte le décolleté et le surplus d'échancrures, le vêtement aurait pu passer pour un t-shirt un poil trop grand. Dans la petite pièce sombre, Aïsha s'assit sur le banc, stressée mais également légèrement pressée.
On était samedi soir, le jour le plus rentable - et de loin - de sa semaine. Bientôt, le DJ monta le son. Un peu à la manière de la sonnerie d'un établissement du secondaire, cette alerte signifiait aux employées qu'il était temps d'aller travailler.
