Les feux d'artifice multicolores pleuvent au-dessus du fleuve.
Celui-ci se trouve là entouré de centaines de spectateurs, contemplant avec grand intérêt les débuts d'un spectacle qu'ils ne seront pas prêts d'oublier...
Sur l'un des quais, pressée tout contre sa mère, Pauline fait remarquer à sa mère qu'une fine pluie de paillettes rougeoyantes se dépose sur la peau nue de ses bras.
Cette dernière baisse la tête un court instant vers sa fillette, essuie vivement ses bras agrémentés de fines particules très probablement issus de la surface des pétards avant d'enjoindre sa fille de profiter du spectacle.
Voilà plusieurs semaines que toutes deux attendent impatiemment la survenance de cet événement.
Le père de Pauline ne pouvant se libérer, c'est donc seule que Daphné partage avec leur fille cette représentation exceptionnelle.
La succession de tirs décoratifs en direction du ciel se poursuit, sous le regard toujours aussi attentif de l'assemblée cosmopolite.
Pour ces Jeux Olympiques, une armada de photographes, caméramans et journalistes de tous genres décrivent, immortalisent, commentent avec passion la moindre minute de cette inauguration.
Puis soudain, le spectacle céleste prend fin, provoquant déception et en même temps impatience auprès de l'assistance.
C'est alors qu'est observée un drôle de remous au beau milieu du cours d'eau.
Sans exception, des milliers de paires d'yeux se posent alors sur l'étendue aquatique, intrigués, effrayés également pour une petite partie d'entre eux plus pessimistes.
La Seine a de la chance.
Elle n'a pas de soucis.
Elle se la coule douce.
Le jour comme la nuit.
Et elle sort de sa source.
Tout doucement sans bruit.
Pauline est la première parmi cette armée de spectateurs à comprendre que quelque chose d'anormal - même pour pareil événement - est sur le point de se produire.
Elle contemple ses bras chamarrés de lilliputiennes poussières écarlates brillantes même dans le noir de la nuit.
Sans pouvoir lui en expliquer la raison profonde, Pauline comprend qu'il faut partir, s'éloigner le plus possible du lit de la Seine.
Devant le refus catégorique de sa mère, la petite à la grande intelligence a l'idée de prétexter une envie pressante, qui provoque certes l'exaspération de sa mère, mais également l'effet escompté.
Effectivement, Daphné n'a absolument pas envie d'être désignée comme étant la mère de la petite fille s'étant fait pipi dessus lors de la cérémonie d'inauguration des Jeux Olympiques.
Tandis que le duo s'extirpe avec difficulté du troupeau, un élément plus qu'imprévu, y compris pour les organisateurs de l'événement se matérialise sous les yeux époustouflés et terrifiés du public.
En effet, alors que normalement, la suite aurait dû se composer de la venue de plusieurs vedettes de l'industrie musicale, voilà qu'un gigantesque requin, de couleur grise et blanche s'éjecte à moitié, avec vélocité et férocité, du lit du fleuve avant d'attraper de sa gueule le corps un peu trop éclaboussé de paillettes d'un spectateur situé au bord du quai.
Pauline comprend alors quelle chance inouïe, quelle intuition extraordinaire elle a eu lorsque les cris alertant l'ensemble du troupeau du dernier spectacle advenu parvient jusqu'à ses minuscules oreilles.
Effectivement, quelques instants auparavant, c'est elle-même et ses paillettes écarlates qui se trouvait à l'exact emplacement de la victime du prédateur.