Partie 92 bis : question de priorité

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La chaleur était si intense qu'elle en devenait presque étouffante. La climatisation de l'aéroport était en panne. Les équipes techniques faisaient, d'après les nombreuses annonces sonores, tout pour remédier au plus vite à la situation. Je rangeai dans ma poche arrière le billet d'avion avec lequel je m'éventais depuis dix bonnes minutes pour tirer ma valise hors du carrousel. Elle retomba lourdement au sol.

- Vous avez récupéré toutes vos affaires ?, demandai-je en me redressant.
- Yes !, confirma Florian
- On y va ?, s'impatienta Aurélie.

Alexandre, d'un naturel plus réservé, approuva d'un simple hochement de tête. Il était grand. Très grand. Un mètre quatre-vingt quinze au bas mot. Pourtant il faisait tout pour se faire petit. Ironique. Une hauteur qui attirait les regards et une personnalité qui cherchait à tout prix à les détourner. Il convenait parfaitement à la tornade blonde qu'était Aurélie. Il était prévenant, discret, patient et sincèrement gentil. J'étais heureuse que mon amie se soit laissée convaincre. Quoi de mieux qu'une semaine dans un décor paradisiaque pour hâter leur mise en couple ?

- Pourquoi tu souris ? , s'enquit la concernée en appelant un taxi.
- Et pourquoi pas ?

Mieux valait ne rien dire. Elle craignait l'engagement comme son ombre. Les choses étaient déjà bien assez difficiles comme ça pour Alexandre. Je risquais, en intervenant, de lui mettre des bâtons dans les roues.

- On est aux usa !, s'extasia Florian.

La tête renversée, les yeux rivés sur les palmiers bordant la route, il s'émerveillait d'un rien.

- Quoi ? On n'est pas au Mexique ?!, le taquinai-je en prenant un air faussement déconcerté.
- T'es bien le genre à rater ta correspondance et atterrir au Mexique toi, répliqua-t-il.

Il ferma les yeux, rentra le menton, ouvrit grand la bouche et laissa échapper de sa gorge un disgracieux bruit sonore. Alexandre, contrairement à Aurelie, eu la décence de réprimer son rire.

- C'est qui ça ?
- Qui d'autres que toi a dormi non-stop dans l'avion ?, rétorqua Florian.
- 10 heures de vol quand même... précisa Aurélie. Je sais même pas comment on peut dormir dans une position aussi inconfortable.
- C'est peut-être pour ça qu'elle a ronflé comme un camionneur, se moqua Florian.
- J'ai pas ronflé !, protestai-je.
- Un peu quand même, avoua mon amie.
- C'était gênant...

Je cherchais, vainement, le soutien d'Alexandre du regard. A court d'idées, je jetai ma bouteille d'eau vide sur le fauteur de trouble. Elle heurta lamentablement un Florian hilare. Gagnée par sa gaieté, je luttais, assez mal, contre le plissement de mes lèvres. Il ramassa le contenant en plastique qui s'était échoué à ses pieds et le balança dans la poubelle la plus proche. Un des carrosses jaunes qu'Aurelie avait inlassablement hélé s'arrêta enfin.
Le décalage horaire et la fatigue ne tardèrent pas, une fois confortablement installé dans le véhicule, à gagner le groupe. Le trajet vers notre location de vacances se fit dans le silence le plus complet. Je m'imprégnais du paysage qui défilait rapidement sous nos yeux. Les routes étaient beaucoup plus larges que chez nous. Les trottoirs plus déserts. Les piétons se faisaient rares. Pas étonnant vu le climat et les distances à parcourir pour passer d'un bloc à un autre. La réalité collée assez bien aux fictions télévisées qui m'abreuvaient depuis l'enfance. Captivée par la propreté des lieux, pas le moindre mégot de cigarette ou défection canine sur les trottoirs, je ne me rendis compte tardivement que nous étions arrivés. L'air chaud qui s'engouffra dans l'habitacle du véhicule une fois la portière ouverte étouffa la climatisation. La peau moite d'humidité, je jetai un rapide coup d'œil à l'immeuble qui s'étalait en hauteur sur quatre étages avant de traîner mon bagage à main et ma grande valise jusqu'à l'entrée. Aurélie suivit méthodiquement les instructions données par le propriétaire. Elle récupéra du boîtier sécurisé les clés et déverrouilla le portail.
Nous avions en tout et pour tout 3 chambres. Deux lits simples dans l'une. Un lit double dans les deux autres. Sanaa et Hassan étaient le seul couple officiellement déclaré. Je ne souhaitais pas pour ma part partager mon matelas avec Florian. Les garçons héritèrent donc des lits simples. Ils jetèrent leurs affaires dans un coin de la pièce et se vautrèrent sur leur couche.

Déboires chroniquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant