Partie 27 : défi accepté

13 2 1
                                    

Je n'étais plus habituée à cette colère froide. Je n'avais pas su, d'entrée jeu, en interpréter les signes. Cette manière particulière d'exprimer le ressentiment ne m'était, en effet, pas étrangère. Fille d'un homme qui ne savait ou ne pouvait pas formuler verbalement ses états d'âme. Un père qui préférait ignorer le problème plutôt que l'attaquer frontalement. Je ne le blâmais pas. Loin de là. Il gérait, à sa façon, les situations difficiles. Mais je ne pouvais pas non plus prétendre que je n'en avais pas été affectée. Le comportement de Guesdes avait ravivé des souvenirs douloureux. Des souvenirs que je préférais maintenir enfermés dans mon subconscient.

- Pardon ?
- Vous souhaitez vous défaire de cet engagement ?

Ces mots. Mes mots.

- Com.. ?

Je n'achevais pas ma question. La réponse se devinait aisément.

- Vous étiez là.
- Je peux savoir ce que vous me reprochez ?
- Rien, répondis-je les yeux rivés au sol.

Je me concentrais sur ma respiration pour en assurer un rythme régulier. Je ne voulais pas que mon corps me trahisse. Qu'il lui révèle les fragilités que je m'appliquais à dissimuler au monde entier. Il tarda à me répondre. J'osai donc jeter un coup d'œil dans sa direction. Le sourcil droit levé, le visage fermé, il attendait.
Avais-je vraiment envie, à une heure aussi tardive, de m'engager dans cette voie ?

- Je suis navrée que vous l'ayez appris de cette façon. Je ne vous reproche rien. Je pense juste que ce binôme ne fonctionne pas.

Il valait mieux ne pas lui exposer la liste de mes griefs. Ça n'était ni pertinent, ni raisonnable. Le rapport de force ne m'était ici clairement pas favorable.

- Savez-vous pourquoi j'ai demandé à être votre mentor ?
- Je pensais, jusqu'à ce soir, que c'était dû au hasard.

Il quitta le mur sur lequel il s'était adossé pour se rapprocher de moi.

- J'ai apprécié votre franchise au gala.
- Ma bêtise vous voulez dire...
- Vous vous êtes montrée spontanée. Vous avez fait preuve d'assurance. Vous avez osé exprimer une pensée.

Il marqua une pause. L'esquisse d'un sourire se dessina sur ses lèvres.

- Une pensée étrange, je vous l'accorde.
- Où voulez-vous en venir ?, le questionnai-je.

Un pas, tout au plus, nous séparait à présent. Je percevais les effluves boisées de son eau de cologne. Cette proximité physique accentua mon trouble.

- J'ai, paraît-il, jusqu'à lundi pour vous convaincre. J'accepte le défi.

Déboires chroniquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant