Partie 75 : cartes sur tables

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-         Florian !

Il glissa sa main gauche derrière son dos puis s'inclina.

-          En personne.

Mon chevalier servant. L'homme sans qui je n'aurais pu mener à bien, durant une soirée pompeuse, la mission assignée par Guesdes. Il avait rendu ce moment tolérable voire même appréciable.

-          Qu'est-ce que tu fais là ?!

Il s'approcha. Je tapotais la place près de moi pour l'inviter à s'asseoir. Il ne se fit pas prier.

-          Je bosse.
-          Ici ?
-          Kinsight fait souvent appel à une société de services pour ces événements. Société qui recrute parfois des intérimaires comme moi pour compléter l'équipe. Et toi alors ?

-          Mon mentor travaille chez Kinsight.
-          Le fameux...
-          Il m'a traîné à ce séminaire...
-          Traîner carrément ! , s'exclama-t-il avec amusement.

-          Je t'avoue que j'aurais préféré passer le week-end dans mon lit.
-          C'est vrai que t'as une petite mine.
-          Dis tout de suite que je suis moche ! , plaisantai-je.
-          Jamais !

L'intensité de son objection m'étonna.

-          Comment tu m'as retrouvé ? , repris-je.
-          Le réceptionniste.
-          Le réceptionniste ?
-          Il nous tient informé pour qu'on s'organise en fonction des nouveaux venus.

Il se releva puis se pencha vers moi. Les effluves de son parfum me chatouillèrent les narines.

-          Mademoiselle Abbad ...
-          Je ne me souviens pas t'avoir donné cette info.
-          Juste ton prénom, confirma-t-il.
-          Tu as frappé à la porte...
-          En étant pas sûr que ça soit toi.
-          Quel culot, lançai-je.
-          Quel courage, rectifia-t-il.
-          Tout est une question de point de vue !
-          Je suis du genre à voir le verre à moitié plein.
-          Et moi à moitié vide.
-          Tu devrais adopter ma vision des choses.
-          Tu crois ?
-          Je suis sûr même ! Regarde, un peu d'audace et d'optimisme et nous voilà réunis.

La bonne humeur de Florian était contagieuse.

-          Pas faux, admis-je.

Je massais mes joues endolories par le sourire dont je ne m'étais pas départie depuis son arrivée puis quittai à mon tour le lit dangereusement confortable sur lequel je m'étais installée. Florian consulta son téléphone, se gratta l'arrière du crâne avant de reprendre :

-          Je vais devoir y aller. On se retrouve tout à l'heure ?
-          Ouai j'ai ton numéro. Je t'envoie un message dès que je suis libre.
-          J'espère bien !

Il m'adressa un clin d'œil avant de s'éclipser. Il ne me restait plus que trois minutes pour rejoindre Guesdes. Je me forçais à faire face à l'image que projetait le miroir devant lequel j'étais, à présent, fermement plantée. Comme je le craignais, mon apparence n'était pas glorieuse. La fatigue froissait mes traits. Fatigue que je tentais de dissimuler en appliquant à nouveau un peu de font de teint et de blush et en libérant mes cheveux du chignon qui les maintenait captifs. Ils serviraient de distraction à quiconque posait son regard sur moi. L'élastique dans lequel ils étaient enroulés durant toute la matinée avaient accentué leurs ondulations. Les doigts plongés dans ma chevelure, je me massais rapidement le crâne avant d'entraîner une partie de ma masse capillaire sur le côté droit. Satisfaite du résultat je récupérai quelques affaires puis quittai la chambre. Guesdes adossé au mur patientait depuis, semble-t-il, un moment. Le regard perçant et indescriptible qu'il posa sur moi me laissa confuse. Je n'étais, cette fois-ci, pas en retard. Qu'avait-il encore à me reprocher bon sang ?!

-          Prêt ?
-          Allons-y.

Deux mots. Les quinze minutes de pause n'avaient pas arrangé son humeur.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

J'étais fatiguée. Je n'avais pas envie de supporter cette aura négative qui émanait de lui. Autant régler nos comptes maintenant. J'avais toujours apprécié la franchise. Chez les autres et chez moi. Il était temps de jouer carte sur table quitte à rentrer bredouille...

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