Partie 100 : chaleur humaine

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Lumières aveuglantes. Bleu, rouge. Un son qui me perforait jusqu'à l'os. Un véhicule avec une inscription à l'effet aussi dévastateur qu'une carotide tranchée. Un mot mis en avant par un bandeau bleu, « police ». Étais-je lucide ou étais-je plongée dans un souvenir que ma conscience s'évertuait pourtant à enterrer ? J'avais oublié de respirer. Le cri d'urgence lancé par mes poumons me rappela à l'ordre. Respire Jena. Respire. Mon corps refusait de bouger. Paralysé par la peur. Combien de temps étais-je restée ainsi immobile avant qu'une main ne se glisse dans la mienne, ne m'invite à contourner la voiture et entrer dans mon bâtiment ? Toutes les actions réalisées par mes membres étaient automatiques. Je me contentais de suivre la force qui m'entraînait loin de cette affreuse vision. Les doigts d'un homme appelèrent l'ascenseur avant de se poser sur mon épaule et d'y exercer une légère pression. L'esprit embrumé par l'angoisse, j'ignorais tout le reste. Qui est mort ? La question m'obsédait. Venaient-ils pour moi ? Cette possibilité secoua tout mon être. Quelque chose ou plutôt quelqu'un m'enveloppa. Son parfum, boisé, et sa chaleur m'irradièrent et calmèrent les battements affolés de mon cœur.

- Les clés Jena, murmura une voix à mon oreille.

De toute évidence, il connaissait mon nom. De quelles clés parlait-il ? Une main caressa ma tête.

- Tout va bien. Tu as les clés de chez toi ?

Une douce mélodie produite par une riche voix grave. Je tendis mon sac. Il s'en saisit et récupéra ce qu'il convoitait.

- J'ai froid, chuchotai-je en entrant.

Porte claquée, serrure fermée, il échangea quelques mots avec une personne que je supposais être Hannah avant de m'emmener dans ma chambre. Le grincement des gonds capta provisoirement mon attention. Nous étions seuls. Enfermés dans cette pièce à l'abri... peut-être. Il m'entraîna doucement vers mon lit. Réticente au départ à m'allonger je finis par le faire lorsqu'il occupa, en premier, le matelas. Une immense fatigue me submergea.

- Ils vont venir me chercher ? , demandai-je naïvement.
- Qui ?

Silence. Le tremblement de mes lèvres brièvement interrompu par ma réponse :

- La police.

Il m'encercla de ses bras et me serra fort, très fort. La tête enfouie dans son torse, un peu désorientée, je le laissais faire.

- Dors. Personne ne va venir te chercher, promit-il après un long moment.

Il remonta d'une main la couverture. La chaleur qui m'enveloppa et la promesse qu'il me fit suffirent à m'apaiser. Bercée par sa respiration et le bruit de son souffle, je sombrai assez vite dans une douce inconscience.

Déboires chroniquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant