Partie 49 : baume

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Aurélie, pliée en deux, se tenait fermement les côtes tandis que Sanaa tentait d'étouffer un rire en compressant sa bouche.

- Arrêtez ! m'exclamai-je en contrôlant moi-même difficilement mes gloussements.
- S'il-te-plait raconte-nous encore une fois comment vous vous êtes retrouvés dans une boutique de lingerie, me supplia Sanaa qui venait de libérer ses lèvres.
- T'abuses, c'est la troisième fois !
- Ouai mais c'est tellement drôle. J'image la tête D'Adam...
- Je dirai même... Tellement toi, renchérit Aurélie en essuyant ses larmes.
- J'ai paniqué. J'ai proposé le premier truc que j'ai vu.

Le fou rire qui s'était momentanément interrompu reprit de plus belle. Sanaa lui tapota le dos et l'encouragea à respirer.

- Calme toi...
- Mourir de rire ... Elle aura pris l'expression au pied de la lettre.

Aurélie massait à présent ses abdominaux.  En apnée, elle gesticulait dans tous les sens à la recherche de l'oxygène qui manquait cruellement à ses poumons.

- N'empêche le malaise..., repris-je une fois l'hilarité passée.
- Tu m'étonnes !

Les cheveux de Sanaa qui descendaient en cascade sur ses épaules détournèrent un instant mon attention.

- T'as été chez le coiffeur ?
- Ah enfin ! MERCI !

L'enthousiasme manifeste qu'elle venait de témoigner me paraissait disproportionné.

- T'es bien la seule à l'avoir remarqué !
- Ola tu l'as lancé ! , intervint Aurélie.
- Cinq centimètres !
- Et c'est reparti ...
- J'ai coupé cinq centimètres. Et rien. Aucune réaction.
- Personne ne remarque des pointes coupées en même temps.
- On ne peut pas tous être aussi radical que toi. Et mes reflets alors ?
- Quels reflets ? demandai-je innocemment.

Aurélie pointa un doigt moqueur vers une Sanaa bougonne. Je laissais mon regard s'attarder un peu plus longtemps sur sa chevelure en quête du détail qui m'avait échappé.

- Ah je les vois ! , m'exclamai-je victorieuse.
- Bref...
- Ça y est on l'a vexé, commenta Aurélie.
- Pas du tout, renchérit Sanaa.
- Ils sont acajou. Je les vois, insistai-je.

Elle avala une gorgée de thé, dégagea de son visage oblong les quelques mèches qui lui obstruaient la vue, replaça sa tasse sur la soucoupe et croisa ses jambes.

- Passons aux choses sérieuses.

Aurélie applaudit d'excitation.

- Oui !! , s'écria-t-elle.

La cuisse droite contre sa poitrine, elle laissa son menton reposer sur son genou. Sanaa, quant à elle, s'appuya contre le dossier de sa chaise.

- J'ai loupé un truc ? demandai-je méfiante.
- Toi pas tellement. Nous, oui.

Une main accusatrice tendue vers moi, elle manqua de renverser le contenant encore fumant qui se dressait entre nous.

- On veut toute l'histoire.
- T'as vu Noah..., affirma Aurélie.
- Il y a eu rapprochement, rebondit Sanaa.
- Quoi ?! m'offusquai-je
- Vous êtes passés au tutoiement, tempéra-t-elle.
- Deuxième tête à tête avec Adam, reprit Aurélie
- Un bisou ?

La blonde et la brune aux reflets acajou échangèrent un regard malicieux.

- Oui mais de qui ?
- Noah ?
- Adam ? Beaucoup trop d'action !

Leur curiosité à peine contenue m'amusait franchement.

- Vous êtes sérieusement atteintes.

Je tapotai mes joues douloureuses. Une douleur rare. Causée par un sourire dont on ne peut se séparer. Entourée de celles qui font naître ce sourire et le maintiennent en vie.

- On peut parler de vous pour changer ?
- Hum... Nope, déclara Aurélie.
- Et pourquoi ?

Sanaa regroupa ses cheveux sur un côté dévoilant le col officier de sa chemise noire à motif baroque.

- Parce que ce n'est pas intéressant !
- Euh respecte nous quand même, protesta Aurelie en laissant retomber sa jambe.
- Ok... Comment va Alex ?
- Tu sais quoi ? Le respect c'est surfait !

Nouveaux rires. Vieille chaleur humaine. Un baume dont mon coeur meurtri par la vie avait tant besoin.

Déboires chroniquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant