185 : Le Lagon d'Akai

9 2 3
                                    


Il y a fort longtemps, alors que les humains de Quaranys ne connaissaient rien des mers, les Dieux vivaient encore sur les continents éloignés.

Les Dieux ne s'intéressaient pas encore aux hommes et n'interagissaient donc qu'entre eux. En ce temps-là, Ghiven, le dieu de l'Eau et des Abysses, posa les yeux sur Akai, la déesse des Arts et des Passions.

Lui qui n'avait toujours connu que la froideur des profondeurs et les couleurs ternes tomba follement amoureux de la Déesse Akai dont la chevelure rougeoyante n'avait rien à envier aux plus beaux couchers de soleil et dont les yeux aux mille nuances colorées pétillaient d'une chaleur plus puissante que celle du centre de la Terre.

Ghiven n'avait jamais ressenti l'amour et ne savait donc pas comment réagir. Au début, il fut mal à l'aise, et fuyait la belle déesse. Mais chaque fois qu'il la fuyait, son coeur se serrait et ses yeux se perdaient désespérément dans le vide sombre des abysses, alors qu'il cherchait la lumière.

Ne supportant plus de vivre ce manque perpétuel, Ghiven se décida à se rapprocher d'Akai, mais elle semblait inatteignable. Ils étaient de complets opposés. Alors que Ghiven passait sa vie dans les profondeurs froides et sombres des abysses, Akai apportait lumière et couleurs au monde des hommes et à celui des Dieux.

La passion brûlait et consumait Ghiven au point qu'un jour, Ori ressente ce feu puissant qui habitait le coeur du Dieu des Profondeurs. Ori, étant le dieu étant le plus proche de Ghiven, lui proposa de l'aider à se rapprocher d'Akai.

Désespéré, Ghiven accepta. Pendant de longues années, avec l'aide d'Ori, le Dieu de l'Eau courtisa la Déesse des Arts. Rêvant de partager la vie de la Déesse pour de bon, Ghiven se mit en tête de lui demander sa main. Mais pour cela, il lui fallait un cadeau de taille. Quelque chose qui puisse conquérir le coeur de la Déesse à tout jamais.

Les Dieux, vous savez, ne portent pas de bijoux, Ghiven devait donc trouver un cadeau digne d'une Déesse pour son aimée. Qu'est-ce qui pouvait plaire à Akai, déesse des Arts ?

C'est avec désespoir que le Dieu se mêla aux hommes. Les Humains pouvaient être sages et étaient des êtres de passion, peut-être sauraient-ils quoi offrir à un être cher ?
Il prit alors forme humaine et se rendit à Sadalen, Capitale de l'Ancien Empire pour demander aux hommes le cadeau parfait.
Il erra longuement sans que les hommes ne lui donnent de réponse satisfaisante, l'un conseillait des pierres, l'autre des fleurs, un autre encore proposait une maison.
Désespéré, Ghiven s'assit sur un banc face au mont Archaïk. C'est alors qu'un vieil homme s'approcha et prit place à côté de lui.

"Bonjour, étranger, salua le vieillard avec un sourire, Vous avez l'air bien triste. Quelque chose ne va pas ?"
"Eh bien, expliqua Ghiven, C'est que je veux ravir le coeur de celle que j'aime. Mais je ne sais pas quoi lui offrir pour lui demander sa main."
Le vieillard hocha doucement la tête.
"Je comprends, fit-il, à l'époque où je me suis marié, j'étais face au même problème. Vous voulez savoir ce que j'ai fait ?"
Le Dieu hocha la tête, plein d'espoir.
"J'étais peintre, à l'époque. Je lui ai fait choisir l'un des paysages que j'avais peint. Et lorsqu'elle en eut choisi un, je l'ai emmenée vivre là-bas. C'est comme ça que j'ai demandé ma belle Cassiopée en mariage."
"Vous êtes un homme sage." Approuva Ghiven.
"Certaines femmes sont heureuses avec des bijoux ou des fleurs. D'autres le seront bien plus avec des paysages."
Il était impossible de savoir si l'homme parlait au sens propre ou figuré, mais le Dieu s'était décidé.
Ghiven voulait offrir un paysage à Akai. Au sens propre.

Il alla alors demander des conseils à Chaïra sur les fleurs, les plantes, et les reliefs. Et après avoir imaginé dans les moindres détails le paysage qu'il souhaitait réaliser, il se mit au travail. Ghiven choisit de créer un atoll au centre duquel se trouverait un lagon magnifique. Sur les motus  de l'atoll, il fit pousser des plantes et des fleurs dont les couleurs vives rappelaient les yeux et les cheveux d'Akai et il donna à l'eau environnante une éternelle couleur turquoise symbolisant l'union entre lui et son aimée.

Son oeuvre terminée, Ghiven alla trouver Akai et l'emmena jusqu'au Lagon. Celle-ci adora le présent du Dieu et accepta de s'unir à lui pour l'éternité. 

Ainsi fut créé le Lagon d'Akai. Mais Ghiven n'oublia jamais que l'idée venait des Hommes et pour honorer ceci, il se fit protecteur des Hommes. Même lorsque Chaïra voulut les tuer. Même lorsque les Hommes perdirent de leur pureté.
Car Ghiven savait que sans eux, il n'aurait peut-être jamais pu s'unir à son aimée.

Débarras d'idées insenséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant