194 : Solemn

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- On l'a fait !!

Beryl lâcha un rire clair, heureuse. 

Ça y est ! J'ai réussi à partir de ce monde ! Finally ! Je vais pouvoir à nouveau Voyager ! Et peut-être même, retrouver mes pouvoirs maintenant que je ne suis plus dans ce monde de sorcellerie !

La Créatrice se tourna vers sa compagne de Voyage.

- Tu as vu, Iris ? Je te l'avais dit que ça marcherait cette fois !

La jeune fille observait les alentours, le regard émerveillé.

- Oui... oui je suis... enfin libre !, s'exclama-t-elle

Beryl lui sourit, ravie de la voir si heureuse. Iris posa un regard flamboyant sur la Créatrice, et un sourire étrange étira ses lèvres.

- Merci Beryl... Sans toi, je ne serais jamais sortie d'ici.

La demoiselle s'approcha d'Iris en riant.

- Anytime, dear ! Alors ! Par où veux-tu commencer ? Ici on est à Deorosi, l'un de mes mondes ! Mais je peux techniquement t'emmener partout où tu le souhaites à partir de là ! 

- Deorosi ?, souffla Iris avec un sourire, J'aime bien. C'est... appétissant.

Beryl leva un sourcil.

- Appétissant ? Comment ça ?

Le sourire d'Iris s'étira encore. Mais cette fois-ci, il avait quelque chose d'effrayant, de malsain. Beryl eut un mouvement de recul, le visage empli d'appréhension. Un rire s'échappa des lèvres fines d'Iris.

- Quoi..? Tu n'as pas encore compris pourquoi personne ne pouvait sortir de Sahikha ?

Elle attrapa le poignet de Beryl en un mouvement fluide et approcha ses lèvres de son oreille.

- Sahikha, siffla-t-elle à la manière d'un serpent, était une prison. Et... tu sais ce que cette prison était censée garder ?

Beryl se tétanisa alors qu'Iris s'écartait doucement pour lui faire face.

- Solemn, la Démone Serpent... Connue pour dévorer les rêves et les mondes.

Elle effectua une révérence.

- Nous n'avions pas encore eu l'occasion de nous présenter correctement, je crois... Créatrice.

Sur le visage de la sorcière améthyste passèrent une foule de sentiments. De la peur, de l'incompréhension... mais également un sentiment de trahison et de la colère.

- Qu'est-ce que...

- Oh, ne fais pas cette tête, Beryl... tu sais bien que je te trouve mignonne à croquer quand tu t'énerves...

Beryl recula de quelques pas.

- Tu.. Iris... tu....

Le sourire démoniaque de la demoiselle continua de s'étirer.

- Beryl, très chère... appelle-moi par mon nom, veux-tu ? Solemn ne te plaît pas ? Ou alors c'est que tu ne veux pas y croire ?

Lentement, la partie inférieure du corps d'Iris se mua en un corps de serpent recouvert d'écailles jaune pâle. Elle glissa doucement vers la Créatrice. Celle-ci, toujours emplie d'incompréhension, ne put qu'effectuer quelques pas en arrière.

Les larmes naquirent dans les yeux de la demoiselle, et roulèrent lentement sur ses joues. Solemn l'attrapa par le menton et lui essuya doucement les larmes.

- Voyons, ma jolie, ne pleure pas. Je ne te ferais pas de mal. Estime que c'est en remerciement pour m'avoir libérée. Par contre... je suis affamée... cela fait une éternité que je n'ai pas mangé de monde et l'odeur de celui-ci est appétissante.

D'un geste vif et sec, Beryl attrapa le poignet de la Démone et plongea son regard déterminé dans les yeux de celle-ci.

- Si tu veux toucher à Deorosi, il faudra me passer sur le corps, gronda-t-elle.

Pour toute réponse, la serpentine Solemn gloussa. 

- Oh vraiment ? Je n'avais pas réalisé que notre relation allait si loin... Me laisseras-tu te dévorer..? Il est vrai que tu dois avoir bon goût... Si l'aperçu que j'en ai eu quand j'ai goûté à tes lèvres ne m'a pas trompée, tu promets d'être un dessert de qualité...

Au rappel de leur baiser, le coeur de la Créatrice se serra. Mais elle se reprit bien vite. Il n'y avait pas le temps pour les regrets. Son monde et probablement tous les suivants étaient en danger. Et elle ne laisserait pas cette démone les dévorer. Elle n'était pas une Créatrice pour rien.

Elle prit de la distance et ferma les yeux.

Esprits de défense et d'offense, entendez mon appel
De la justice faites de moi le scalpel
Armez mon bras qui aujourd'hui s'abat
Sur le vice qui s'étend ici-bas !

Répondant à son incantation muette, deux armes furent invoquées dans ses mains. 
Un cimeterre dans la main droite, un bouclier rond au bras gauche. 

En d'autres circonstances, Beryl se serait probablement attardée sur les gravures précises et millimétrées, elle aurait probablement loué la beauté du motif en lune, ou de l'étoile. Elle aurait sûrement apprécié le mélange des métaux dorés et argentés, ou fait un commentaire sur le velours d'un violet profond qui entourait la poignée de l'épée. 
En d'autres circonstances, Beryl aurait probablement longuement admiré le travail d'orfèvre, les véritables oeuvres d'art qu'elle avait en main.

Mais là, rien ne comptait. Rien d'autre que leur efficacité.

Car Beryl s'était battue pour beaucoup de choses, pour beaucoup de gens. Beryl s'étaient battue pour beaucoup de raisons, mais aujourd'hui le combat était différent.

Aujourd'hui elle combattait pour personne d'autre qu'elle-même. Mais elle gagnerait. Parce que personne ne s'attaquait à ses mondes sans en subir les conséquences.

Aujourd'hui, Beryl ne combattait pas en compagne de route, en sauveuse ou en guerrière.

Aujourd'hui, Beryl combattait en tant que Créatrice. Et personne n'avait jamais osé la défier dans ce rôle-là.

Débarras d'idées insenséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant