188 : Iris

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En Sahikha, la magie est violette. Lorsque quelque chose est violet, c'est qu'il est chargé en magie. Ceci étant, sur les êtres vivants, la teinte est plus rare. La magie a du mal à s'exprimer avec toutes les couches de conscience et d'essence que représente quelque chose de vivant.

C'est pour ça que seules les Sorcières les plus puissantes voient leur yeux prendre une nuance magique. Leurs yeux, plus rarement leur peau ou leurs cheveux. Mais généralement ça ne se manifeste que sous forme de reflet fugace, insaisissable. La couleur violette s'exprime rarement plus. Et lorsque l'iris entière d'un oeil est coloré de violet, alors on sait que la sorcière est vraiment très puissante.

Aussi, voir cette étrange femme à la chevelure améthyste débarquer dans sa boutique effraya Iris. 

Son regard d'or se posait avec émerveillement sur les étagères remplies d'herbes séchées et de talismans de l'endroit, comme si elle n'avait jamais vu une boutique de magie. Iris soupira. C'était sans doute une noble qui s'amusait de voir le "désordre pauvre" d'une boutique de bas étage.

La jeune femme améthyste dirigea finalement son regard sur la vendeuse et lui offrit un sourire pétillant.

- Bonjour !, fit-elle d'une voix chantante

Iris se para de son plus beau sourire commercial. Il ne valait mieux pas vexer une sorcière aussi puissante.

- Bonjour, comment puis-je vous aider ?

La demoiselle prit un air embêté.

- Et bien voilà... Je me suis retrouvée dans ce monde je ne sais pas comment et...

Iris roula des yeux. Pourquoi était-ce toujours à elle d'orienter les Echoués ?

- Vous êtes sortis du cercle de champignon, c'est ça ? J'ai une mauvaise nouvelle, vous êtes coincée ici pour toujours. Faites votre deuil, vous pourrez pas partir.

Le visage de l'arrivante se décomposa.

- Quoi ? Mais... j'ai jamais entendu parler d'un monde qui laisse entrer mais pas ressortir !

Iris plongea un regard blasé dans celui de sa "cliente".

- Bienvenue en Sahikha, c'est comme ça que ça marche ici. Vous feriez mieux de vous habituer à votre nouvelle vie.

La demoiselle plissa les yeux, contrariée.

- Pfff... Il va encore falloir que je trouve un moyen détourné et impossible de partir d'ici. Il faudrait que je me fasse un absolu de Voyage, un jour.

Iris leva les yeux au ciel. Cette fille n'avait visiblement pas compris le "pour toujours". Elle s'apprêtait à lui expliquer, mais fut coupée dans son élan.

- C'est pas grave !, s'exclama soudainement la demoiselle, autant apprécier le temps que je suis ici. Quelle est la monnaie de votre monde ?

- Le dequil. Mais vous pouvez obtenir à peu près n'importe quoi avec du troc.

- Oh ! Quelle bonne nouvelle ! J'adore les mondes avec du troc ! Bien, est-ce que vous auriez quelque chose pour... euh... défaire un sortilège quelconque ?

Iris leva un sourcil.

- C'est à dire ?

- Eh bien... avant d'arriver ici, mes cheveux étaient genre... plus rouges. Et je les aimais bien de cette couleur. Je pense que quelque chose a dû me jeter un sort pour changer leur couleur ou je ne sais quoi, parce que depuis que je suis ici, ils sont de cette couleur violette qui est, certes très jolie, mais qui est quand même vachement plus voyante que le rouge que j'avais. Et j'ai tout fait pour l'enlever mais ça ne part pas.

Iris pinça les lèvres.

- Violet c'est la couleur de la magie, misstinguette. Je peux rien faire pour la faire partir. Si t'as suffisamment de magie pour que tes cheveux aient viré de cette couleur, rien dans cette boutique ne pourra les faire changer.

La demoiselle parut contrariée de cette révélation.

- Je vois, grogna-t-elle, Est-ce que ça partira quand je quitterais ce monde au moins ?

Iris ne put s'empêcher d'écraser son visage dans sa main.

- Tu ne peux pas quitter ce monde. C'est littéralement la première chose que je t'ai dite. Qu'est-ce que t'as pas compris dans "coincée ici pour toujours" ?

La jeune femme balaya la question de la main.

- Oui non mais, j'ai franchi des murs infranchissables, tué des dieux immortels, survécu à des attaques mortelles... Je pense sincèrement pas que ce monde me retiendra si je veux en partir.

Iris fronça les sourcils. Vu la couleur indéniable des cheveux de la jeune fille, la vendeuse pouvait difficilement douter de ses dires.

- Et bien bonne chance, mademoiselle..?

- Sand ! Beryl Sand.

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