XLII. "HIT ME !"

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Rose


* Flashback *

Une cigarette coincée entre les lèvres et un énième verre dans les mains, j'observais le ciel. Je fis signe au barman de me resservir et je bu mon verre d'une traite avant d'enfiler ma veste en cuir et de quitter les lieux.

J'avais l'impression de ne vivre que la nuit depuis des semaines. A déambuler dans les rues parisiennes, à la recherche de je ne sais quoi. Il m'était impossible de fermer l'œil. A chaque fois que l'obscurité apparaissait, je me retrouvais, un mois plus tôt, dans cette cuisine. Un couteau dans le corps. Mon bébé encore en vie. Désormais, j'étais seule. Et j'avais cette immonde cicatrice qui traversait mon corps, comme un rappel de mon échec. J'avais était totalement incapable de me sauver, de le sauver. Si je n'avais pas pris la décision quelques années auparavant de partir avec Matteo, j'aurais pu être chez moi, entourée de mes parents, devant la cheminée du salon. Au lieu de ça, j'étais saoule, dans la rue, et la pluie menaçait de s'abattre sur moi, ajoutant un effet dramatique à ma vie déjà pourrie.

Les néons lumineux attirèrent mon attention et je plissais mes yeux pour déchiffrer l'écriture. J'écrasais mon mégot et manquais de tomber à la renverse. Je me rattrapais à la porte en métal et tirais dessus pour entrer dans le bâtiment quelque peu délabré. Je me retrouvais face à un immense ring de boxe, et mes yeux s'écarquillèrent en voyant des hommes s'affronter au centre. Les cris et les encouragements emplirent mon esprit, et inconsciemment, un sourire pris place sur mon visage. Je fendis la foule pour me rapprocher de la lutte qui se déroulait. Après quelques coups de coude bien placés, je finis par arriver au premier rang. Deux types baraqués se frappaient sans relâche alors que les gens autour de moi semblaient parier sur l'un d'eux. Je fixais les énormes liasses de billets passer de main en main. Je ne comprenais pas trop. Mes yeux détaillèrent toutes les personnes présentes et je remarquais qu'aucune femme n'était là. J'aurais dû partir. J'étais loin d'être à ma place, moi la petite brune maltraitée par son petit ami. Mais le temps que je réfléchisse à ce que je devais faire, un mouvement de foule me propulsa sur l'avant du ring. Je titubais et retrouvais mon équilibre de justesse.

Eh bien ! s'exclama l'homme au centre de la salle. On dirait qu'une fillette c'est perdue parmi nous !

Je jetais un regard aux personnes autour de moi qui semblaient amusés par la situation.

Tu devrais rentrer chez toi gamine ! il repris. On cherche de vrais hommes nous.

Je passais une main dans mes cheveux pour les attacher, et fusillais du regard ce type qui appréciait de me rabaisser.

Je suis pas une gamine, je rétorquais.

Mais c'est qu'elle mordrait presque ! il éclata de rire.

Je déglutis en réalisant ce que j'étais en train de faire. Mais l'alcool dans mon sang avait totalement anéanti toute forme de réflexion un temps soit peu logique et je me jetais tête baissée dans les problèmes. J'avais ce besoin immense de prouver que je n'étais pas qu'une gamine, qu'un simple pion dans ce monde. Je m'avançais jusqu'à percuter l'homme et lui souris hypocritement.

Je vais me battre.

Il haussa un sourcil amusé et hocha la tête.

La gamine va se battre ! il annonça. Qui veut lui montrer qu'elle n'a pas sa place ici ?

Un homme qui devait faire deux fois ma taille s'avança tout en faisant craquer ses phalanges. Je déglutis, mais ne baissais pas le regard devant lui. J'avais baissé les yeux bien trop souvent. Il fit un geste de la tête à l'abruti qui nous servait d'arbitre et dès que le combat commença, il chargea. Je tombais à la renverse, et ma tête rencontra le sol avec une force qui me fit tourner de l'œil. J'entendis la foule rire. Parce que je n'étais qu'une blague à leurs yeux. Avec difficulté, je me relevais. Je fis craquer mon cou et à mon tour, je fonçais sur mon adversaire qui me tournait le dos à cet instant. Surpris par mon attaque, il roula, m'entrainant dans sa chute. On échangea plusieurs coups, tous plus durs les uns que les autres. Il finit par me relâcher, et je tombais à genoux, crachant un caillot de sang. Mon corps n'était qu'une boule de douleur. Je passais rapidement une main sur la blessure qui racontait mon histoire et soufflais de soulagement lorsque j'aperçu qu'elle ne s'était pas rouverte.

On dirait que la princesse abandonne, ricana l'arbitre. Dommage. Un si beau p'tit cul pour une lâche c'est triste.

Je passais une main sur mon visage, essoufflée, et me tournais vers eux.

Frappes-moi.

Pardon ? mon adversaire haussa un sourcil.

Frappes-moi, je répétais.

Il éclata de rire, persuadé que je délirais.

FRAPPES-MOI ! je hurlais.

Il haussa les épaules et se jeta à nouveau sur moi. Seulement, cette fois-ci, j'attrapais son bras et le retournais, le faisant tomber à mes côtés. Sans attendre une seconde, j'enjambais son corps pour m'asseoir sur son torse. Mon genoux bloqua sa gorge et ma main gauche saisi ses cheveux. Il écarquilla les yeux lorsque mon poing libre s'abattit sur son visage avec une puissance que je ne me connaissais pas. Les coups s'enchaînèrent, alors qu'un hurlement de rage s'échappait de ma gorge. J'étais hors de moi, comme une autre personne. Une paire de bras me tira en arrière et je me débattis.

Laisses moi l'achever ! je hurlais.

Mais j'étais trop faible face à l'homme qui me tenait et je finis par abandonner. Il me relâcha lorsqu'il fut sûr que je n'allais pas me jeter à nouveau sur le type que je venais de massacrer. J'essuyais le sang qui s'écoulait de mon nez et me tournais vers lui. Il me sourit et une lueur de bienveillance se dessina dans ses yeux. Il me tendit une bouteille d'eau et je le remerciais d'un mouvement de tête. Les hommes présents me dévisageaient comme si j'étais un extraterrestre.

Ignores les, m'indiqua mon bon samaritain. Ils sont simplement choqués de voir qu'une fille sait se battre.

Je sais pas me battre, je rectifiais.

C'est vrai, il sourit à nouveau. Mais tu pourrais apprendre.

Apprendre ?

A canaliser toute ta rage pour en faire quelque chose de productif. Au lieu de massacrer ton adversaire, il lança un regard à l'homme toujours étendu par terre.

Je grimaçais.

Je peux t'apprendre si tu veux, il repris.

Pourquoi pas, j'haussais les épaules.

Au fond de moi, une sombre idée naquit. Celle de me venger. De retrouver Matteo et Charles, de leur retirer tout ce qu'ils possédaient. Et de planter à mon tour un couteau dans leur poitrine. Mais il fallait que je prenne mon temps. Si je me précipitais, je risquais d'y laisser ma vie.

Je m'appelle Dom, il me tendit sa main.

Je la serrais, un fin sourire sur les lèvres.

Rosi- ... Rose. Je m'appelle Rose.

* Fin du flashback *

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