VIII. "Rose, Rose, Rose"

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Rose

La pluie s'abattait sur moi et je regrettais mon minuscule studio. Quelle idée d'aller dehors avec un temps pareil. Mon crâne semblait également sur le point d'exploser, comme pour me rappeler de ralentir ma consommation d'alcool.

Je tentais d'essorer mes cheveux sans pour autant me faire griller. Heureusement pour moi, le mur derrière lequel j'étais me cachait assez pour me permettre de faire quelque geste. Je jetais un regard à ma montre et constatais que j'étais là depuis maintenant deux heures. Je grognais en imaginant les autres bien au chaud à l'appart, pendant que je me gelais dehors. Mais j'avais choisi. J'avais préféré sortir et venir faire le guet ici, à observer mon passé, plutôt que de rester au chaud, tournée vers le futur.

Des rires attirèrent mon attention, et je me penchais pour voir ce qu'il se passait de l'autre côté. Un groupe de gars, probablement de mon âge, sortirent du bâtiment en se bousculant. Je plissais mes yeux pour mieux distinguer leurs visages, et mon cœur s'accéléra lorsque je le vis. Il était toujours là, son éternelle paire de lunettes sur le nez. La cicatrice sur son front confirma son identité, et ma mâchoire se contracta. Il déambulait dans la cour du bloc, comme s'il était chez lui, entouré de ses acolytes. Ses cheveux blonds étaient plaqués sur son visage par la pluie, mais il ne semblait pas gêné par ça. Il adorait la pluie de toute façon.

J'allais faire demi-tour, pour quitter les lieux discrètement, mais mon pied se posa sur un tesson de bouteille et la pression le fit éclater. Je me figeais, espérant que personne ne m'ait entendu. Seulement, c'était bien trop beau pour être vrai. J'entendis leurs pas se rapprocher, et une fois à quelques mètres de moi, son regard perçant plongea dans le mien. Ses yeux bleus semblèrent me sonder, alors que ses traits se durcirent.

Rose, Rose, Rose, il dit assez fort pour que je l'entende de là où j'étais.

Merde ... je jurais.

Je fis deux pas en arrière, tandis qu'ils se rapprochaient.

Qu'est-ce que tu viens foutre ici Rose ? Il éclata de rire et fit craquer ses phalanges. Je te manque ?

Prends pas tes rêves pour la réalité, je lançais.

J'attendis deux secondes avant de prendre mes jambes à mon cou et partir le plus loin possible. Mes pieds martelaient le sol au rythme de ma course, mais je les entendais derrière moi. Et lorsque j'entendis le cran d'une arme s'abaisser, je regrettais de ne pas avoir la mienne sur moi. Je me revoyais très bien la poser sur la table de mon salon, persuadée que je pouvais sortir sans aujourd'hui. Mais non, il avait fallu que je change mes plans et que je me rende ici, pour satisfaire ma curiosité, comme d'habitude. Je tournais à l'angle de la rue, et le souffle court, je m'arrêtais dans une des ruelles. J'espérais les avoir perdu, ne donnant pas cher de ma peau s'ils me trouvaient. Frénétiquement, mes mains passaient sur mon corps, à la recherche d'une potentielle arme pour me défendre.

Rose.

Je me retournais et plaçais le couteau, que j'avais trouvé dans ma botte, sous son cou. Mais j'avais devant moi le visage fermé de Mekra, et non les yeux bleus de Thomas.

T'es malade putain ! il recula.

Désolée, je chuchotais.

Je le tirais vers la partie sombre de la ruelle pour ne pas être vus et me penchais pour voir si on nous avait vu.

Je peux savoir pourquoi tu te balades avec un couteau et tu me l'as mis sous la gorge ? il gronda.

T'occupes pas de ça, je soupirais. Qu'est-ce que tu fiches ici Mekra ?

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