LXXXVI. "Are you ok ?"

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Mekra

La nuit ne m'avait jamais paru aussi noire. Surtout à cet instant précis, mes pensées sombres m'empêchant de décolérer. Mes poings se serrèrent tandis que mes pieds continuaient de me porter je ne sais où. Comment est-ce que j'avais réussi à me mettre dans cette situation ? J'avais toujours tout fait pour l'éviter. Malgré mes airs, je n'avais pas enchaîné les conquêtes comme certains de mes frères. Je préférais la stabilité, et aujourd'hui cette même stabilité me l'avait mise dans le cul. Comme un immense doigt d'honneur à tous mes efforts. Parce que je ne cessais d'en faire, des efforts. Pour garder un équilibre, une relation saine. Et six ans plus tard, je me retrouvais presque aussi désemparé que lorsque j'avais vu Rosalinda se faire incarcérer. Là aussi, je ne pouvais rien faire. Je n'avais aucun pouvoir sur la situation. Et savoir qu'Hanna pouvait me faire un coup pareil me mettais dans une colère noire. Elle allait devoir décider seule. Peut importe ce que je dirais, je n'aurais aucune garantie venant d'elle. Je pourrais lui dire d'avorter. Mais aucune preuve qu'elle le ferait réellement. A moins que je ne la traine jusque là-bas pour être sûr. Seulement c'était impossible. Je n'avais jamais levé la main pour forcer une femme à faire quelque chose. Enfin, sauf avec Rose, où de nombreuses fois nos gestes avaient dépassé les limites. Mais jamais je ne toucherais Hanna. Encore moins alors qu'elle se trouvait dans cet état.
Je passais mes mains sur mon crâne en jurant. Une fois de plus je m'étais fait avoir. Et je me mis à penser à mes gars, ma famille. Qu'est-ce qu'ils allaient penser ? J'imaginais déjà les cris de rage et les mots durent qu'ils prononceraient. A mon encontre, mais surtout à celle d'Hanna. Framal allait péter les plombs. Il avait beau faire semblant, je voyais bien que son regard sur Hanna avait changé depuis quelques temps. Comme s'il s'était rendu compte d'une chose qui m'était toujours invisible.
Mon regard se pose sur l'enseigne qui me faisait face. De l'autre côté de la route, un bar bondé semblait le tendre la main. Comme une invitation à noyer mes pensées dans un verre de whisky. Cependant, le nom de la rue dans laquelle je me trouvais me fit tilter. A quelques mètres, le balcon d'un appartement dans lequel je n'avais pas encore eu l'occasion de mettre les pieds se dessinait. J'avais l'impression d'être à nouveau confronté à un choix qui déterminerait la suite de ma vie. Encore une fois.
Mon pied frappait nerveusement le sol, et je fermais les yeux quelques secondes avant de reprendre ma route. Les néons du bar continuaient d'illuminer la nuit dans mon dos alors que je me traînais vers l'immeuble, une boule a l'estomac. De toute façon elle ne pouvait pas me haïr plus que maintenant alors peut-être qu'elle pourrait m'aider.

Le cœur battant à la chamade, je gravis les marches. Ma respiration se faisait plus rare. Pourtant je n'avais presque aucune raison de paniquer face à elle. Presque. Je finis par atteindre son étage, et me stoppais devant sa porte. Le numéro vingt-quatre me lorgnait, attendant que j'abatte mon poing dessus. D'un geste imprécis, je toquais à la porte.

Le silence qui suivit me parut long. Peut-être un peu trop. Et pendant un instant, je me ms à penser qu'elle n'était peut-être pas là. Après tout, je ne connaissais plus son emploi du temps. Et l'heure bien trop tardive pour une visite me rappela à l'ordre. Mais je frappais à nouveau. Plus fort cette fois. Parce que j'avais besoin de lui parler. J'avais besoin d'elle malgré tout.

Je cru entendre du bruit derrière la porte en bois, mais cette dernière ne s'ouvrit pas.

Rosalinda ! je criais en tapant à nouveau.

Mais le silence me répondit. Elle était surement derrière la cloison, attendant que je disparaisse de là. Et je ne pouvais pas la blâmer. On s'était tellement battu que je ne méritais pas qu'elle m'ouvre. Mais je voulais lui parler. Je posais ma tête contre le bois frais en soupirant.

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